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12 mars 2008 3 12 /03 /mars /2008 14:01
ECRITS POLITIQUES
FRANKLIN DELANO ROOSEVELT
COMBATS POUR DEMAIN

(autres textes) 


CHAPITRE CINQUIEME  - Troisième partie
L'Organisation internationale et la Paix
Franklin-Delano-Roosevelt-en-1944-copie-1.jpg

LES COLONIES. « L'HISTOIRE DES ILES PHILIPPINES PEUT SERVIR DE MODÈLE AUX AUTRES PETITES NATIONS DU MONDE »

    Bien qu'un drapeau étrange, celui d'un agresseur perfide, flotte provisoirement sur le territoire philippin, c'est avec la plus grande confiance dans la victoire finale que les Nations Unies commémorent aujourd'hui l'anniversaire de la naissance de leur membre le plus jeune.

    Voilà sept ans que fut instauré le Commonwealth philippin. A cette époque, les Etats-Unis exerçaient la souveraineté sur les îles Philippines depuis une quarantaine d'années. Mais comme je le disais en 1935, lors de l'inauguration du Commonwealth : « En acceptant d'exercer notre souveraineté nous n'avons fait qu'assumer une obligation, celle de servir le peuple philippin jusqu'au jour où il pourrait devenir indépendant et prendre sa place parmi les nations du monde. »

    Permettez-moi de remonter à l'époque où, après la victoire remportée par l'amiral Dewey dans la baie de Manille, l'Amérique étendit sa souveraineté aux îles Philippines. Une très grande partie du peuple américain pensait que les Etats-Unis montraient peu de sagesse et beaucoup d'impertinence en maintenant au rang de colonie 'un peuple de plusieurs millions d'êtres humains qui avaient déjà manifesté leur, désir d'indépendance.

    Cependant les Etats-Unis et les chefs du peuple philippin commencèrent bientôt à exécuter un plan à longue portée, grâce auquel, le jour où le peuple philippin serait capable de voler de ses propres ailes, les îles Philippines seraient pourvues d'établissements d'instruction publique, d'un service de santé, d'organismes commerciaux et de moyens de communication. En même temps nous accordâmes aux Philippines une autonomie locale de plus en plus étendue.

    En 1934, au cours de conférence cordiales, les autorités philippines et américaines décidèrent que l'on pouvait fixer avec précision le moment où les îles Philippines deviendraient tout à fait indépendantes. Cet événement devait se produire à l'expiration d'une période de dix ans pendant laquelle les Philippines jouiraient d'une complète autonomie locale et seraient gouvernées d'après leur propre constitution avec le statut de dominion.

    Mis en vigueur en 1935 sous la présidence de mon vieil ami, Manuel Quezon, ce statut fonctionna si bien que le 7 décembre 1941 nous étions ensemble à l'oeuvre et nous nous étions mis d'accord pour fixer à 1946 l'indépendance complète des Philippines. Pendant tout ce laps de temps nos deux nations et nos deux peuples avaient tenu leurs engagements mutuels. Ils avaient une confiance inébranlable dans leur bonne foi respective — leurs relations amicales furent cimentées d'une manière indissoluble par l'épreuve tragique qu'ils subirent pendant les mois douloureux qui suivirent l'agression traîtresse du Japon.

    Les courageux Philippins — soldats et civils —se battirent aux côtés des Américains dans des conditions extrêmement défavorables. Ils étaient résolus à verser leur sang pour défendre leur liberté. Combien largement ils la méritent, cette liberté !

    J'aime à croire que l'histoire des Philippines telle qu'elle évolua au cours des quarante-quatre dernières années, peut vraiment servir de modèle aux autres petites nations du monde. C'est un modèle de ce que les hommes de bonne volonté espèrent réaliser dans l'avenir — un modèle de civilisation globale qui n'admet aucune restriction due à la religion, aux opinions ou à la race.

    Mais nous ne devons pas perdre de vue qu'une civilisation de ce type requiert l'existence préalable de deux facteurs importants. Il faut d'abord une période de préparation au cours de laquelle on propage l'instruction en même temps qu'on reconnaît et qu'on satisfait les besoins physiologiques, sociaux et économiques du pays. Il faut ensuite entraîner le pays à exercer la souveraineté complète ; à cet effet il faut lui accorder une autonomie de plus en plus grande, commençant par le gouvernement local et se développant par étapes successives, jusqu'à l'indépendance politique totale.

    Les Etats-Unis eux-mêmes ne sont parvenus à leur indépendance nationale pleine et entière qu'après une série d'étapes préliminaires. Les assemblées communales des colonies de la Nouvelle-Angleterre, les organismes locaux analogues qui existaient dans les autres colonies, nous conduisirent progressivement au gouvernement par comtés et, plus tard, au gouvernement par états. Tout ce processus de formation et de développement politique précéda l'institution du gouvernement fédéral permanent de 1789.

    En aucun lieu du monde l'indépendance politique ne peut être durable si elle n'a été précédée d'une période d'entraînement analogue. Certains peuples doivent recevoir une formation plus poussée et plus prolongée ; d'autres n'ont pas besoin d'une formation préliminaire aussi développée et aussi longue.

    Dans le passé récent, l'histoire des Philippines se résume en une période de collaboration, de développement et de mise au point sur le plan national. A supposer même que nous en ayons douté, nous sommes sûrs, maintenant, que notre gouvernement a adopté la meilleure ligne de conduite.

    Le plan suivi en l'occurrence est intimement lié à la philosophie et aux idéaux des Nations Unies. La doctrine qui inspire les ambitions et qui meut la cruauté de nos ennemis — à savoir, qu'il existe une race de maîtres appelée à gouverner tous les autres peuples — cette doctrine est en bonne voie d'anéantissement, et pour toujours.

    Les Etats-Unis et les Philippines sont déjà en train d'étudier les problèmes économiques qui se poseront dans l'avenir — lorsque le Président Quezon et son gouvernement se trouveront à nouveau réinstallés dans la capitale de Manille. Au cours d'une conférence que nous avons tenue la semaine passée, le Président Quezon et moi-même nous avons convenu de former une Commission mixte comprenant des représentants de nos deux pays ; elle aura pour tâche d'étudier la situation économique qui sera celle de la future nation philippine et de rechercher les moyens d'en assurer la stabilité et la sécurité.

    Ce fait témoigne de l'extrême bonne foi qui existe désormais entre nos deux gouvernements.

    Mais c'est plus encore : ce fait symbolise, d'une manière réaliste, notre résolution farouche et notre certitude absolue de chasser des Philippines jusqu'au dernier Japonais.

    Président Quezon, je vous salue en cet anniversaire qui se présente sous d'heureux auspices, et je salue en vous le peuple des îles Philippines. Je salue son courage. Je salue son indépendance.


Franklin Delano Roosevelt

 

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12 mars 2008 3 12 /03 /mars /2008 13:52
ECRITS POLITIQUES
FRANKLIN DELANO ROOSEVELT
COMBATS POUR DEMAIN

(autres textes) 


CHAPITRE CINQUIEME  - Seconde partie
L'Organisation internationale et la Paix
fdroosevelt.jpg
L'UNION PANAMERICAINE

    L'amitié entre nations comme entre individus, exige que l'on sonne le rassemblement de toutes les forces de l'humanité de manière à créer une atmosphère de compréhension et de collaboration étroites. Elle implique des obligations et des responsabilités réciproques, car ce n'est que par le respect sincère des droits d'autrui et par une exécution scrupuleuse des obligations qui y correspondent, qu'une vraie fraternité peut régner parmi tous les membres de la communauté.

    Les qualités essentielles d'un vrai panaméricanisme sont exactement celles qui sont incluses dans l'expression du bon voisinage, c'est-à-dire, la compréhension mutuelle et, grâce à cette compréhension, une appréciation sympathique des points de vue d'autrui. C'est seulement en agissant en conformité avec ces principes que nous pouvons espérer construire un édifice dont la confiance, l'amitié et la bonne volonté seront les pierres angulaires.

    C'est dans cet esprit que toutes les républiques américaines montrent une profonde compréhension de la doctrine de Monroe dont on a tant parlé depuis plus d'un siècle. Elles comprennent que cette doctrine avait, et a encore, pour but, de maintenir l'indépendance des peuples du continent américain, en empêchant les puissances des autres continents de mettre la main sur une portion quelconque du territoire actuellement indépendant dans cette région du globe.

    Les républiques américaines, avec les années, comprennent plus clairement que cette doctrine panaméricaine de défense implique que chaque Etat américain doit reconnaître l'indépendance des autres Etats américains. Chacun de nous doit grandir par le progrès de la civilisation et du bien-être social et non par l'acquisition de territoires au détriment du voisin.

    Dans cet esprit de compréhension et de collaboration mutuelles sur le continent, il est impossible que vous et moi ne soyons pas émus par toute querelle à main armée entre nos voisins. Je n'hésite donc pas à vous dire, à vous, membres honorables du Comité directeur de l'union panaméricaine, que je considère les conflits actuels entre quatre de nos républiques soeurs comme des pas en arrière.

    Votre américanisme et le mien doivent être un édifice bâti sur la confiance, cimenté par une sympathie qui n'admet que l'égalité et la fraternité. Il trouve sa source et son essence dans le coeur des hommes ; il siège dans le temple de l'intelligence.

    Nous tous, nous avons des problèmes particuliers et, à parler franchement, l'intérêt de nos propres citoyens doit, chaque fois, primer. Mais il est également vrai qu'il est d'une importance vitale pour chaque nation de ce continent que tous les gouvernements américains entreprennent immédiatement tout ce qu'il sera possible de faire pour abolir les barrières douanières, restrictions inutiles et artificielles qui arrêtent actuellement entre les peuples des républiques américaines les courants profitables du commerce.

    Je suis heureux de vous transmettre ce message à vous, messieurs qui appartenez au Comité directeur de l'union panaméricaine, car je considère l'union comme l'expression ultime de l'unité spirituelle des deux Amériques.

    C'est à cette unité ferme et agissante que l'humanité doit tendre ; elle est un des éléments indispensables à la prospérité des affaires mondiales.

 

Franklin Delano Roosevelt

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12 mars 2008 3 12 /03 /mars /2008 13:40
ECRITS POLITIQUES
FRANKLIN DELANO ROOSEVELT
COMBATS POUR DEMAIN

(autres textes) 


CHAPITRE CINQUIEME  - Première partie
L'Organisation internationale et la Paix

Roosevelt1944.gif
WILSON ET L'ENTENTE ENTRE LES PEUPLES

    La compréhension doit être le terrain sur lequel croîtront les fruits de l'amitié. » Ces paroles prononcées par le président Wilson dans son discours à Mobile en 1913 peuvent parfaitement servir de base à la politique du Gouvernement des Etats-Unis. Cette politique s'applique également à la compréhension de nos problèmes intérieurs et de nos relations internationales.

    Woodrow Wilson était professeur et quand il employait le mot « compréhension » il l'entendait non pas dans l'esprit des hommes d'état et des chefs politiques, des chefs d'entreprise et des rois de finance ; il l'appliquait plutôt aux peuples de l'univers qui vont constamment apprendre à l'école des vérités premières, de telle sorte qu'eux et leurs voisins puissent mener une vie plus sûre, plus heureuse et plus complète.

    Sur tous les continents, dans tous les pays, Woodrow Wilson a facilité la compréhension entre les peuples. On peut admettre, je pense, que les événements de ces derniers mois, plus que dans aucune autre période analogue de notre histoire, ont amené les personnes à s'intéresser au gouvernement ; aux problèmes du gouvernement ; pourtant cet intérêt et cette compréhension récents, le peuple américain n'aurait pu les manifester si Woodrow Wilson ne lui avait donné l'élan et ne l'avait mis sur la voie de la compréhension dans son discours d'il y a vingt ans.

    Dans ce discours prononcé à Mobile, le président Wilson le premier, a fait cette déclaration nette que les « Etats-Unis ne chercheront jamais plus à conquérir un seul mètre carré de territoire », et les Etats-Unis ont adopté cette déclaration. Le président Wilson est allé plus loin en ajoutant — s'adressant particulièrement à nos voisins d'Amérique latine — que les intérêts matériels ne primeraient jamais la liberté humaine.

    Néanmoins, par suite des bouleversements qu'apporta la grande guerre, on n'a pu appliquer entièrement cette politique de désintéressement. Nous tous nous avons là notre part de responsabilité.

    Je n'hésite pas à dire que si j'avais participé à la campagne politique dans quelque autre pays, j'aurais été fortement tenté de miser sur les craintes de mes compatriotes et d'accuser les Etats-Unis de tendances impérialistes en vue d'un agrandissement égoïste.

    En tant que citoyen de quelque autre république, j'aurais pu difficilement croire à l'altruisme de la plus riche république américaine.

    Il m'apparaît donc clairement, en tant que Président de la République des États-Unis, que le moment est venu d'ajouter à la déclaration du président Wilson cette nouvelle déclaration : la politique des Etats-Unis s'opposera dorénavant à toute intervention armée.

    Le maintien d'un gouvernement constitutionnel dans les autres pays d'Amérique ne crée pas une obligation sacrée pour les seuls Etats-Unis. Le maintien de la loi et la bonne marche d'un gouvernement dans cet hémisphère intéresse avant tout chaque nation, prise, en particulier, à l'intérieur de ses propres frontières. Ce n'est que, si et lorsque le désordre sévit dans les autres pays du continent, que cette situation intéresse ces derniers. J'insiste sur ce point que, dans ce cas, cette situation intéresse le continent tout entier, où nous sommes tous voisins.

    C'est la compréhension de cette doctrine — non pas seulement par les dirigeants, mais encore par les peuples de toutes les républiques — qui a permis à la conférence de Montevideo d'aboutir au résultat qu'elle a obtenu. L'état d'esprit qui existe actuellement entre les nations de l'Amérique tout entière est le meilleur que l'on ait pu constater, à n'importe quelle époque que l'on remonte.

    Dans le reste du monde, la succession des événements n'a pas permis, ces derniers temps, aux projets du Président Wilson d'aboutir.

    Un observateur superficiel dirait que cet échec provient de la recrudescence du nationalisme dans le monde. Mais un tel observateur veut parler d'un nationalisme pris au sens étroit et restrictif, et de cette sorte de nationalisme que, dans chaque pays, l'immense majorité du peuple appuierait.

    Je m'oppose à cette représentation de la population actuelle de l'univers.

    Ce n'est pas aux populations que l'on peut reprocher de menacer la paix, mais à leurs dirigeants politiques.

    Le courageux appel lancé par le Président Wilson au monde pour bannir toute guerre future, frappa l'imagination des masses. Mais, pour le plus grand nombre des soi-disant hommes d'Etat réunis à Paris pour établir un traité de paix ou prétendu tel en 1919, cet appel resta lettre morte. Je vis ce spectacle de mes propres yeux, j'entendis leurs paroles de mes propres oreilles. Avantages politiques, prestige personnel, agrandissement national, tels furent les soucis au milieu desquels la Société des Nations vit le jour ; dès son enfance, elle en supporta le lourd handicap.

    Malgré tout, grâce à la Société des Nations, directement ou indirectement à ses principes, tous les Etats du monde ont tâtonné à la recherche d'un moyen meilleur que ceux qu'ils avaient utilisés jusque là pour régler leurs différents.

    La Société des Nations a fourni l'occasion de nombreuses rencontres diplomatiques : elle a servi à organiser des débats internationaux, et en maintes occasions, elle a aidé à la réglementation de l'hygiène, du travail, du commerce et de l'éducation ; enfin, elle a permis le règlement de nombreuses disputes, grandes et petites, entre nations grandes et petites.

    Aujourd'hui, plus que jamais, les Etats-Unis coopèrent ouvertement avec l'organisation de Genève.

    Je crois traduire la pensée de mes compatriotes si j'affirme que les anciennes politiques, les anciennes alliances, les combinaisons et balances de pouvoirs, se sont avérées inefficaces pour le maintien de la paix mondiale. La Société des Nations, en encourageant, comme elle le fait l'extension des pactes de non-agression, les accords sur la réduction des armements, est le pilier sur lequel s'échafaude la paix mondiale.

    Nous ne sommes pas membres de la Société des Nations et nous n'envisageons pas de le devenir. Mais nous lui apportons toute notre coopération dans tout domaine qui, en dehors de la politique représente un effort sincère pour protéger la vie et le bien-être des dirigeants politiques et à tout mouvement de tendance impérialiste.

    Si vous évaluez la population du globe à un milliard et demi d'habitants, vous ne risquerez pas de vous tromper en déclarant que quatre-vingt-dix pour cent au moins de ces êtres se contentent de nos jours des limites territoriales de leurs pays respectifs et qu'en outre ils consentiraient à réduire leurs armements si toutes les autres nations promettaient de faire de même. Derrière ce qui menace la paix mondiale, il y a la crainte et peut-être même la possibilité que les dix autres pour cent ne suivent un gouvernement qui recherche l'expansion territoriale au détriment des voisins et qui, sous divers prétextes, refuse de réduire ou d'arrêter les armements, même si tous les autres gouvernements adhèrent à un pacte de non-agression et de réduction des armements.

    De tout temps, jusqu'à la guerre mondiale de 1914-1918, les guerres ont été faites par les gouvernements. Woodrow Wilson a mis en doute la nécessité de ces guerres : ce qui a donné à penser aux peuples qui créent et qui changent leurs gouvernements. Ils se sont demandés avec Woodrow Wilson s'ils ne pourraient pas, un jour, empêcher eux-mêmes les gouvernements de faire la guerre.

    Proposons à la nouvelle génération, en reprenant simplement le mot de Wilson, que dorénavant, au lieu de guerres faites par les gouvernements, on jouisse d'une paix faite par les peuples.


Franklin Delano Roosevelt

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11 mars 2008 2 11 /03 /mars /2008 14:27
ECRITS POLITIQUES
FRANKLIN DELANO ROOSEVELT
COMBATS POUR DEMAIN

(autres textes) 


CHAPITRE QUATRIEME  - Quatrième partie
La Guerre
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LES SEULS TERMES SUR LESQUELS NOUS TRAITERONS AVEC UN GOUVERNEMENT DE L'AXE SONT LES SUIVANTS :
" REDDITION SANS CONDITIONS " »

 

    Voici près de deux ans, j'assistais au dernier dîner de l'Association des Journalistes accrédités auprès de la Maison Blanche. Il est passé, depuis, beaucoup d'eau sous les ponts... et plusieurs personnes ont franchi l'océan en avion.

    Il y a deux ans — bien des mois avant notre entrée en guerre — je vous parlais du sujet qui nous préoccupait alors plus que tout : de notre résolution de transformer l'Amérique en arsenal de la démocratie. A ce moment, presque tous les Américains étaient résolus à participer pleinement au salut de la civilisation menacée par les barbares. Nous étions même alors engagés dans cet effort de production qui marquera dans l'histoire. Nous avons poursuivi notre tâche avec courage, avec adresse, et surtout avec succès.

    Mais ce soir, c'est un autre sujet qui nous préoccupe plus que tout : notre résolution de nous battre jusqu'au bout, de lutter jusqu'au jour où les forces des Nations Unies défileront en triomphe dans les rues de Berlin, de Rome, et de Tokyo.

    En septembre dernier, j'ai fait dans le pays une tournée d'inspection. J'ai vu le travail de nos usines de guerre. J'ai vu nos camps d'entraînement — ceux de l'armée, de la marine, de l'aviation. J'ai vu ces Américains, hommes et femmes, patrons et employés, travailler d'arrache-pied pour améliorer le programme de production. J'ai vu nos soldats, nos marins, nos pilotes américains à l'instruction ; ils se préparaient pour les combats à venir.

    Me voici aujourd'hui de retour d'un de nos fronts d'outre-mer. J'y ai vu mises en oeuvre contre l'ennemi notre production de guerre et l'activité de nos camps d'entraînement. J'ai vu nos troupes sur le front. J'ai inspecté leur excellent matériel. J'ai parlé à nos soldats ; j'ai ri et mangé avec eux. J'ai vu nos hommes — les soldats de la Nation — dans l'île de la Trinité, à Belém et à Natal, au Brésil, au Libéria, en Gambie. Sur tous ces territoires, on ne se bat pas, mais on fait un travail pénible, dangereux, essentiel ; l'endurance et le moral de nos soldats y sont mis à une terrible épreuve. Cette épreuve, ils la supportent magnifiquement.

    J'ai vu aussi nos hommes — et quelques-unes de nos femmes — en Afrique du Nord. Là-bas, c'est la guerre. Ces Américains savent qu'avant la fin de cette guerre, beaucoup d'entre eux auront donné leur vie. Mais ils savent aussi qu'ils se battent pour détruire la puissance des ennemis de leur patrie — qu'ils se battent pour fonder une paix qui sera réelle et durable et pour que le monde connaisse un avenir meilleur.

    Nos soldats en campagne sont dignes de la foi profonde et des grands espoirs que nous avons placés en eux. Les hommes de notre marine n'en sont pas moins dignes, eux sans qui nul corps expéditionnaire américain ne pourrait débarquer en sécurité sur des rives étrangères. Les hommes de notre marine marchande en sont dignes au même titre, eux qui transportent le matériel de guerre et le ravitaillement indispensables, eux sans qui ni les Etats-Unis ni leurs Alliés ne pourraient poursuivre la lutte.

    Il n'est pas un Américain qui puisse regarder ces hommes — ces soldats et ces marins — sans émotion et sans fierté. Il n'est pas un d'entre nous qui n'ait profondément conscience de ses responsabilités à leur égard.

    Le secret qui entourait nécessairement mon voyage a fait qu'à chacune de mes visites, dans les endroits où je me suis arrêté, l'étonnement de nos combattants était total. L'expression de leurs visages témoignait de cette surprise.

    Je souhaiterais de pouvoir rendre visite, dans les mêmes conditions imprévues, à nos hommes qui se battent sur les autres théâtres d'opérations —à ceux de nos bases navales des îles du Pacifique, de l'Australie, de l'Alaska et des îles avoisinantes ; à nos soldats des îles de l'Atlantique, des deux Guyanes, du Canal de Panama, de l'Islande, de Grande-Bretagne, de l'Afrique Centrale, du Proche Orient, des Indes, de la Birmanie, de la Chine. Je voudrais pouvoir leur dire face à face la fierté qu'ils inspirent à leur gouvernement et à leur patrie, en accomplissant magnifiquement leur tâche, en contribuant à resserrer l'étau qui, lentement, mais sûrement, étouffe nos ennemis.

    Dans chacun des bataillons de notre armée, à bord de chacun de nos navires de guerre, vous trouverez des citoyens américains de toutes les professions, de toutes les régions, de toutes les origines, de toutes les religions et de toutes les opinions politiques.

    Demandez à ces hommes pourquoi ils se battent. Chacun vous répondra : « Je me bats pour mon pays ». Demandez-leur ensuite ce qu'ils veulent dire par là, et vous aurez des réponses qui seront, en apparence, extrêmement variées. L'un vous dira qu'il se bat pour avoir le droit de dire ce qui lui plaît, de lire et d'entendre ce qu'il veut. Un autre dira qu'il se bat parce qu'il ne veut à aucun prix voir la croix gammée flotter sur l'église de son village. Un autre soldat vous répondra qu'il se bat pour avoir le droit de travailler et pour que sa famille puisse prendre trois bons repas par jour. Un quatrième soldat vous dira qu'il se bat dans cette guerre mondiale pour que ses enfants et ses petits-enfants ne soient pas forcés de retourner en Europe, ou en Afrique, ou en Asie, pour « remettre ça ». Mais en réalité, toutes ces réponses n'en font qu'une. Chaque Américain combat pour la liberté. La liberté individuelle de chaque Américain, celle de sa famille, dépend aujourd'hui et dépendra plus encore à l'avenir de la liberté de leurs voisins de tous les pays. Car le monde aujourd'hui n'est qu'un immense voisinage. C'est pour cette raison que la guerre, qui commença en des régions qui semblent si éloignées, s'est étendue à tous les continents et à la plupart des îles de l'océan, engageant ainsi l'avenir et la liberté de tout le genre humain. Si la paix qui suivra ne reconnaît pas l'unité du monde contemporain et le fait que nous sommes tous des voisins, si elle ne rend pas justice au genre humain tout entier, les hommes devront vivre sous la menace constante d'une nouvelle guerre mondiale.

    Je me suis entretenu avec de nombreux membres de nos forces armées, depuis la côte et les îles des Amériques jusqu'à l'Afrique Occidentale. Beaucoup de nos soldats et de nos marins se préoccupaient de la situation à l'arrière, dans le pays même. Toutes sortes de bruits et de rumeurs pleines d'exagération leur parviennent. Ils apprennent qu'on se plaint trop chez nous, qu'on ne s'incline pas assez souvent devant la réalité de la guerre. Ou encore, que des chefs syndicaux égoïstes menacent de proclamer des grèves qui diminueraient fortement notre production de guerre ; ou que tels groupements agricoles cherchent à exploiter la situation en augmentant les prix et en négligeant la production des denrées alimentaires. On leur dit aussi que nombreux sont les gens qui se plaignent amèrement des privations que leur imposent les mesures de rationnement et de répartition. Enfin et surtout, on leur dit que de sérieuses querelles de parti nous divisent ici, à Washington, sur les questions les plus minimes. Je leur ai dit que la plupart de ces bruits ne sont que de grossières exagérations ; que peuple des Etats-Unis, dans son ensemble, met tout son coeur, toutes ses forces, et toute son âme à gagner la guerre ; que notre population fait avec joie l'abandon d'un peu de son confort, use moins de chaussures et consomme moins de sucre, boit moins de café, se déplace moins souvent en automobile, renonce à certains privilèges et profits, et cela pour la cause commune.

    Mais je n'ai pas pu dissimuler à nos troupes que quelques malhonnêtes gens, quelques politiciens et quelques publicistes, heureusement fort peu nombreux, ont placé leur ambition ou leur cupidité au-dessus des intérêts de la nation.

    Nos troupes savent que les nazis, les fascistes, et les Japonais se donnent beaucoup de mal pour empoisonner certains Américains, grâce aux contre-vérités de leur propagande. Mais nos troupes savent aussi une chose : vous aurez beau entasser l'une sur l'autre les taupinières de la fourberie, vous n'en ferez pas une montagne qui puisse duper beaucoup de gens, ou bloquer le chemin de la victoire et de la paix véritable.

    Ce qui est indispensable pour parvenir à une paix véritable, c'est que les hommes qui se battent pour nous aient l'assurance de trouver, à leur retour dans leurs foyers, un pays dont l'économie soit assez solide et assez saine pour garantir du travail à ceux qui en veulent.

    Je suis convaincu que l'initiative privée pourra fournir l'immense majorité de ces emplois — et que, dans les cas où cela ne sera pas possible, le Congrès des Etats-Unis votera les lois nécessaires pour qu'il soit possible de garantir à tous un gagne-pain.

    Il y a encore quelques personnes qui affirment que nous ne pourrons pas arriver à ce résultat, ni aux autres objectifs que nous nous sommes fixés pour la période d'après-guerre, si nobles, si raisonnables que puissent être ces buts. En vous parlant de ces sceptiques professionnels, de ces hommes de peu de foi, je ne trouve pas de meilleur mot que « chicaneur ».

    Il ne s'agit pas simplement de chicane au sens étymologique. « Chicaneurs », cela évoque pour nous l'idée d'hommes petits, bas, spécieux et mesquins. En un mot : de tout petits esprits. C'est le genre d'hommes qui cherchent toujours à cacher la vérité sous un écran de fumée ou de brouillard.

    Les chicaneurs d'aujourd'hui tentent de dissimuler les vérités essentielles de cette guerre. Ils cherchent à brouiller le présent et l'avenir, à obscurcir nos buts si clairs, et les principes élevés dont les peuples libres, dès à présent, peuvent annoncer l'éclatante victoire.

    C'est à l'époque de la Révolution Américaine et de la Révolution Française que furent établis les principes fondamentaux qui régissent nos démocraties. La base de tout notre édifice démocratique est le principe qui place la source de l'autorité gouvernementale dans le peuple, et dans le peuple seul.

    Un de nos buts de guerre, exprimé dans la Charte de l'Atlantique, est de rendre à nouveau maîtresses de leurs destinées les populations aujourd'hui vaincues. Il ne doit subsister aucun doute — nulle part — quant à l'inébranlable décision prise par les Nations Unies, de rendre aux peuples vaincus l'exercice de leurs droits sacrés.

    La souveraineté française réside dans le peuple de France. L'expression de cette souveraineté a été provisoirement suspendue par l'occupation allemande. Une fois que les armées triomphantes des Nations Unies auront chassé l'ennemi commun, les Français seront représentés par un gouvernement dont ils auront fait eux-mêmes le choix.

    Ce choix sera fait librement, dans tous les sens du terme. Il n'est pas une nation au monde qui, laissée libre de choisir, soit disposée à se donner un gouvernement fasciste, ou nazi, ou féodal et belliqueux, comme le gouvernement japonais. Ces formes de gouvernement résultent d'une prise de pouvoir, suivie d'une mutilation de la liberté. C'est pourquoi les Nations Unies sont en droit d'opposer à ces formes de gouvernement deux simples mots : « Jamais plus ! »

    Le droit des peuples de disposer d'eux-mêmes, tel qu'il est inscrit dans la Charte de l'Atlantique, n'entraîne pas le droit pour un gouvernement, quel qu'il soit, de commettre des meurtres massifs, ni le droit de réduire à l'esclavage son propre peuple ou d'autres peuples.

    Le monde entier peut être assuré que cette guerre totale — et ce sacrifice de vies humaines dans le monde entier — ne sont pas effectués dans le dessein ni même avec l'arrière-pensée la plus lointaine de maintenir au pouvoir, où que ce soit, les Quisling ou les Laval.

    Notre réponse à ces tentatives affolées, grâce auxquelles l'ennemi essaie d'échapper aux conséquences de ses crimes, est toute trouvée. Nous répondrons, toutes les Nations Unies répondent, que les seuls termes sur lesquels nous accepterons de traiter avec un gouvernement ennemi quelconque, ou avec n'importe quelle faction de l'Axe, ce sont les conditions proclamées à Casablanca c'est la REDDITION SANS CONDITIONS.

    Cette politique qui exclut tout compromis n'est pas dirigée contre les populations des pays de l'Axe, auxquelles nous ne voulons pas de mal. Mais nous entendons bel et bien punir et châtier sans rémission leurs chefs coupables et barbares.

    Il faut vraiment que les Nazis soient à bout de nerfs pour croire qu'ils trouveront des procédés de propagande qui réussiraient à dresser les gouvernements et les peuples des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne, et de la Chine contre la Russie — ou encore la Russie contre les autres.

    Le courage et l'endurance incomparables dont a fait preuve le peuple russe en résistant à l'envahisseur, puis en le repoussant, et la manière géniale dont les grandes armées russes ont été dirigées et conduites par M. Staline et les chefs militaires se passent de tout commentaire.

    A la lumière tragique de la guerre, les gouvernements et les peuples de toutes les Nations Unies ont vu clair. Je puis vous affirmer en pleine connaissance de cause que ces gouvernements et ces peuples sont convaincus de la nécessité absolue où nous sommes de rester unis après la guerre pour établir une paix fondée sur des principes durables.

    Soyez sûrs que si le Japon devait être le premier des partenaires de l'Axe à être battu, toutes les Nations Unies concentreraient tous leurs efforts et toutes leurs ressources pour écraser l'Allemagne.

    Et, inversement, pour qu'il ne subsiste aucun doute dans l'esprit des nazis ou des Japonais, pour qu'ils soient bien persuadés que nous sommes unis dans la poursuite de la guerre jusqu'à la victoire totale dans le monde entier, le Premier Ministre britannique a voulu se lier par un traité formel. Ce traité aurait stipulé que, si l'Allemagne était vaincue avant le Japon, toutes les ressources de l'Empire Britannique en matériel et en hommes se joindraient à celles de la Chine et des Etats-Unis pour l'assaut décisif et final contre le Japon. J'ai dit à M. Churchill qu'aucune déclaration ni aucun accord formel à ce sujet n'étaient le moins du monde nécessaires ; que la parole d'un gentleman anglais suffisait au peuple américain ; et qu'il était absolument évident que nous étions tous complètement d'accord dans notre détermination de détruire les forces de la barbarie en Asie, en Europe et en Afrique. En d'autres termes, notre politique à l'égard de nos ennemis japonais est exactement la même que notre politique à l'égard de nos ennemis nazis : c'est une politique de durs combats sur tous les fronts, une politique visant à terminer la guerre aussi vite que nous le pouvons, mais sans compromis et par une reddition sans conditions.

 

Franklin Delano Roosevelt

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11 mars 2008 2 11 /03 /mars /2008 14:18
 
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FRANKLIN DELANO ROOSEVELT
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CHAPITRE QUATRIEME  - Troisième partie
La Guerre
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L'AMÉRIQUE EN GUERRE

 
    Les attaques criminelles que les Japonais ont déclenchées à l'improviste dans le Pacifique constituent le degré le plus bas de l'immoralité internationale qui a régné durant cette décade. De puissants et d'habiles gangsters se sont concertés pour faire la guerre au genre humain tout entier. Aujourd'hui, ils lancent un défi aux Etats-Unis. Les Japonais ont traîtreusement violé la longue paix qui s'était établie entre nous. Des soldats américains ont été tués à l'ennemi. Des bateaux américains ont été coulés, des avions américains ont été détruits.

    Le Congrès et le peuple des Etats-Unis ont relevé ce défi. De concert avec les autres peuples libres, nous luttons pour préserver le droit de vivre en liberté, et selon des principes conformes à la dignité humaine, parmi nos voisins du monde entier, sans avoir à craindre d'agression.

    J'ai dressé le bilan complet de nos relations avec le Japon. Il sera soumis au Congrès. Cette histoire commence par la visite du Commodore Perry au Japon, il y a 88 ans. Elle se termine par la visite de deux émissaires japonais au Sous-Secrétaire d'Etat, dimanche dernier, une heure après que les forces japonaises eurent lâché leurs bombes et déchaîné leurs mitrailleuses contre notre drapeau, nos soldats et nos civils.

    Je puis vous affirmer avec la plus entière assurance que nul Américain, aujourd'hui comme dans mille ans, ne pourra considérer sans une légitime fierté les efforts patients que nous avons accomplis au cours de ces années en vue d'établir, dans la région du Pacifique, une paix juste et honorable pour toutes les nations, petites ou grandes. Aujourd'hui comme dans mille ans, aucun homme honnête ne pourra refouler un sentiment d'indignation et d'horreur devant l'acte perfide que les chefs de guerre japonais ont perpétré à l'ombre même du drapeau de paix que leurs envoyés spéciaux portaient parmi nous.

    La voie qu'a suivie en Asie le Japon, durant ces dix dernières années, est parallèle à celle qu'ont suivie Hitler et Mussolini en Europe et en Afrique. Aujourd'hui, il ne s'agit plus d'un parallèle, mais d'une collaboration si bien calculée que tous les continents du monde et tous les océans ne forment plus qu'un seul champ de bataille gigantesque aux yeux des stratèges de l'Axe.

    En 1931, le Japon envahissait le Mandchoukouo — sans avertissement.

    En 1935, l'Italie envahissait l'Ethiopie — sans avertissement.

    En 1938, Hitler occupait l'Autriche — sans avertissement.

    En 1939, Hitler envahissait la Tchécoslovaquie — sans avertissement.

    Un peu plus tard, en 1939, Hitler envahissait la Pologne — sans avertissement.

    En 1940, Hitler envahissait la Norvège, le Danemark, les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg — sans avertissement.

En 1940, l'Italie attaquait la France, et plus tard la Grèce — sans avertissement.

    En 1941, les puissances de l'Axe attaquaient la Yougoslavie et la Grèce, et subjuguaient les Balkans — sans avertissement.

    En 1941, Hitler envahissait la Russie — sans avertissement.

    Et maintenant, le Japon a attaqué la Malaisie et la Thaïlande, puis les Etats-Unis — sans avertissement.

    C'est toujours le même procédé. Nous voici dans la guerre. Nous y sommes tous, et nous y serons jusqu'au bout. Chaque homme, chaque femme et chaque enfant participe à la plus formidable entreprise de l'histoire américaine. Nous devons prendre part en commun aux mauvaises nouvelles comme aux bonnes nouvelles, aux défaites comme aux victoires — au sort changeant de la guerre.

    Jusqu'ici, les nouvelles ont toutes été mauvaises.

    Nous avons subi de sérieux revers à Hawaï. Dans les Philippines, nos forces armées auxquelles s'est joint le courageux peuple philippin, ont traversé une rude épreuve mais se défendent avec vigueur. Les nouvelles que nous recevons de Guam, de Wake et de Midway sont encore confuses, mais nous devons nous attendre à ce qu'on nous annonce la prise de ces trois postes avancés. Nul doute que nos pertes, durant ces premiers jours de combat, ne soient élevées. Je partage profondément l'angoisse des familles de nos soldats et de celles qui ont des êtres chers dans les villes que l'on vient de bombarder. Je ne puis que leur donner solennellement l'assurance qu'elles recevront des nouvelles aussi rapidement que possible.

    Notre gouvernement met sa confiance dans la fermeté du peuple américain ! Nous communiquerons les faits au public aussitôt qu'ils auront reçu une confirmation officielle définitive. Mais nous ne divulguerons les nouvelles, au moment où elles nous parviennent, que si, de façon directe ou indirecte, elles ne fournissent pas à l'ennemi des renseignements précieux.

    Je demande instamment à mes compatriotes de rejeter toutes les rumeurs qui contiennent de perfides allusions à quelque désastre total, et qui ont vite fait de se répandre en temps de guerre. Il ne faut pas les accepter sans examen.

    Ainsi, par exemple, je puis vous avouer franchement que le résultat des premières enquêtes ne me permet pas de déterminer avec précision l'étendue des dommages infligés à nos unités navales à Pearl Harbour. On peut craindre qu'ils ne soient sérieux. Mais nul ne saurait dire à quel point les dégâts sont graves avant de savoir dans quelle mesure ils pourront être réparés, et dans combien de temps les réparations nécessaires pourront être effectuées.

    Je citerai encore, à titre d'exemple, la nouvelle, annoncée dimanche soir, selon laquelle un porte-avions japonais a été repéré et coulé au large de la zone du Canal de Panama.

    Lorsque, dans les circonstances actuelles, vous apprenez des nouvelles émanant de source soi-disant digne de foi, soyez certains, désormais, qu'elles ne sauraient être attribuées à une personne investie de l'autorité. Un bon nombre de ces rumeurs et de ces nouvelles proviennent de source ennemie. Aujourd'hui, par exemple, les Japonais prétendent qu'en une seule attaque contre Hawaï, ils ont obtenu la suprématie navale dans le Pacifique.

    C'est là un vieux truc de propagande dont les Nazis ont fait mille fois usage. Ces estimations fantastiques ont évidemment pour but de répandre parmi nous la peur et la confusion, et de nous induire à divulguer des renseignements d'ordre militaire que nos ennemis s'efforcent désespérément d'obtenir.

    Notre gouvernement ne se laissera pas prendre à ce piège — le peuple des Etats-Unis non plus.

    Il importe que chacun de nous se souvienne qu'en temps de guerre la liberté et la rapidité des communications sont nécessairement restreintes. Il est impossible de recevoir à bref délai, des zones de combat éloignées, des rapports précis et détaillés. Et ceci s'applique tout particulièrement aux opérations navales. A l'époque de la radio, les commandants des unités navales doivent souvent s'interdire de nous donner des informations par cette voie, pour la simple raison qu'elles deviendraient du même coup accessibles à l'ennemi, et lui dévoileraient leur position et leurs plans de défense et d'attaque.

    Les confirmations et les démentis officiels concernant les opérations en cours auront nécessairement du retard, mais nous ne cacherons pas au pays les faits qui nous seront connus, à condition que cette divulgation ne serve pas l'ennemi.

    A tous les journaux et à tous les postes de radio — à tous ceux qui se font lire ou se font entendre du public américain — je dis ceci : « Vous assumez la plus lourde responsabilité envers la nation, dès maintenant et durant toute la guerre.

    Si vous croyez que votre gouvernement ne vous révèle qu'une part insuffisante de la vérité, vous avez le droit de le dire. Mais, en l'absence de tout renseignement de source officielle, le patriotisme vous interdit de répandre des nouvelles qui n'ont pas été confirmées, en laissant croire que ce sont des vérités d'évangile.

    Chaque citoyen, à quelque catégorie sociale qu'il appartienne, partage cette même responsabilité. La vie de nos soldats et de nos marins — tout l'avenir de notre nation — dépend de la manière dont chacun de nous remplit ses obligations envers son pays.

    Et maintenant, un mot au sujet du passé récent et de l'avenir.

    Dix-huit mois se sont écoulés depuis que l'écroulement de la France a fait comprendre au monde civilisé tout entier ce qu'est la force mécanisée que les nations de l'Axe ont édifiée au cours de nombreuses années. L'Amérique a tiré le meilleur parti de ce répit d'un an et demi. Sachant que nous pouvions être attaqués à bref délai, nous avons aussitôt commencé à accroître notre puissance industrielle et notre capacité de répondre aux exigences de la guerre moderne.

    Nous avons gagné un temps précieux en expédiant de grandes quantités de notre matériel de guerre aux nations qui étaient encore en état de résister aux agressions de l'Axe. Notre politique reposait sur cette vérité fondamentale que toute nation qui résiste à Hitler et au Japon ne défend pas seulement son propre pays mais aussi le nôtre.

    Cette politique a trouvé sa justification. Elle nous a donné le loisir — loisir inestimable —d'organiser la production américaine.

    Les usines fonctionnent. On se hâte d'en construire d'autres. Un flot continu de tanks, d'avions, de canons et de bateaux, d'obus et de pièces d'équipement — voilà ce que ces dix-huit mois nous ont donné.

    Mais ce n'est que le commencement de ce qui reste encore à faire. Nous devons être prêts à affronter une longue guerre contre des bandits astucieux et puissants. L'attaque contre Pearl Harbour pourra se répéter sur n'importe quel point des deux océans, ou de nos côtes, ou du reste de notre hémisphère. Ce ne sera pas seulement une longue guerre, ce sera une guerre difficile. C'est en nous fondant là-dessus que nous établissons tous nos plans. C'est à cette aune que nous mesurons nos besoins — qu'il s'agisse d'argent, de matériel ou de la production, doublée et quadruplée, qui ne cesse de s'accroître. Cette production ne doit pas seulement suffire aux besoins de notre armée, de notre flotte et de notre aviation. Elle doit aussi renforcer les autres armées, les autres flottes et les autres forces aériennes qui combattent les nazis et les chefs de guerre japonais dans les deux Amériques et dans le monde entier.

    Ce matin, j'ai encore étudié le problème de la production. Votre gouvernement vient d'adopter deux plans d'action en ce qui la concerne. En premier lieu, nous accroîtrons la production — y compris celle des matières premières essentielles —en travaillant sept jours par semaine dans toutes les industries de guerre. En second lieu, nous accroîtrons notre capacité de production en construisant de nouvelles usines, en agrandissant d'anciennes usines, et en utilisant pour les besoins de la guerre un grand nombre d'usines plus petites.

    Sur le chemin difficile que nous avons suivi ces derniers mois, nous avons rencontré parfois des obstacles et des difficultés, de l'indifférence et de l'insensibilité. Il y a eu des querelles et des disputes. Tout cela appartient au passé. Tout cela est oublié, j'en suis sûr.

    L'essentiel, c'est que le pays possède à Washington une organisation groupée autour d'hommes et de femmes qui sont des experts reconnus dans leurs domaines respectifs. Le pays n'ignore pas, je pense, que les personnes qui assument des responsabilités dans chacun de ces nombreux domaines, travaillent en commun dans un esprit de coopération qui n'a jamais été dépassé.

    Ce qui nous attend, c'est un dur travail épuisant nuit et jour, à toute heure. J'allais dire que ce qui nous attend, c'est le sacrifice. Mais il serait faux d'employer ce terme. Les Américains ne considèrent pas que ce soit un sacrifice que de faire tout ce qu'ils peuvent, de donner tout ce qu'ils ont de meilleur à leur nation, quand cette nation lutte pour son existence et son avenir. Que l'on soit jeune ou vieux, ce n'est pour personne un sacrifice que de servir dans l'armée ou dans la marine des Etats-Unis. C'est plutôt un privilège.

    Ni pour l'industriel, ni pour l'ouvrier, ni pour le cultivateur, ni pour le commerçant, ni pour le cheminot, ni pour le médecin, ce n'est un sacrifice que de payer plus d'impôts, d'acheter plus de bons d'armement, de travailler plus longtemps et plus dur, pour remplir la tâche à laquelle il peut se consacrer le plus utilement. C'est plutôt un privilège.

    Ce n'est pas un sacrifice que de nous passer de beaucoup de choses auxquelles nous sommes accoutumés si la défense nationale exige que nous nous en privions.

    De l'examen auquel je me suis livré ce matin, je conclus que, pour le moment, il ne sera pas nécessaire de restreindre la consommation des denrées alimentaires. Il y en a assez pour nous tous aujourd'hui, et il en reste assez pour en expédier à ceux qui luttent à nos côtés.

    En revanche, les civils auront certainement à souffrir d'une pénurie de métaux de diverses espèces, car notre programme de production accrue prévoit l'utilisation, en vue de la guerre, de plus de la moitié de la quantité des principaux métaux qui ont servi à la fabrication d'articles pour l'usage de la population civile. Il nous faudra renoncer définitivement à un grand nombre de choses.

    Je suis sûr que, dans la nation tout entière, les individus, en ce qui les concerne, sont résolus à gagner cette guerre. Je suis sûr qu'ils seront heureux de participer aux frais que cette guerre entraîne, tant qu'elle dure. Je suis certain qu'ils renonceront joyeusement aux avantages matériels auxquels on leur demande de renoncer.

    Je suis sûr qu'ils préserveront ces grandes forces spirituelles sans lesquelles nous ne pouvons parvenir à notre but.

    Je répète que les Etats-Unis ne peuvent accepter rien de moins qu'une victoire complète et définitive. Non seulement il importe que toute trace de la perfidie japonaise soit effacée, mais que, partout, les sources de la brutalité internationale soient taries, complètement et définitivement.

    Hier, dans un message au Congrès, j'ai dit : « Nous agirons de façon à être bien sûrs que cette forme de perfidie ne nous mette plus jamais en danger ». Pour acquérir cette certitude, nous devons entreprendre la grande tâche qui nous est assignée en commençant par renoncer une fois pour toutes à l'illusion de pouvoir nous isoler jamais du reste de l'humanité.

    Au cours de ces quelques années — et tout particulièrement au cours de ces trois derniers jours — nous avons appris une terrible leçon.

    L'obligation que nous avons contractée envers nos morts — l'obligation sacrée que nous avons contractée envers leurs enfants et nos enfants —nous interdit d'oublier jamais cette leçon.

    Et voici ce que nous avons appris : pour aucune nation, pour aucun individu, il n'existe de sécurité dans un monde dominé par les principes de la violence. Il n'existe pas de défense inexpugnable contre un agresseur puissant qui se faufile dans les ténèbres et frappe sournoisement. Nous avons appris que notre hémisphère, baigné par deux océans, n'est pas à l'abri des attaques — et que, sur aucune carte, notre sécurité ne se laisse mesurer en kilomètres.

    Nous pouvons bien reconnaître que nos ennemis ont brillamment accompli leur triste exploit, qu'ils ont exécuté cette manoeuvre avec une précision et un art impeccables. C'était un acte foncièrement malhonnête, mais nous devons nous faire à l'idée que la guerre moderne telle que la conçoivent les nazis, est un métier infâme. Nous ne l'aimons point, cette guerre, nous ne voulions pas nous y engager — mais nous y sommes entrés, et nous nous battrons jusqu'à la limite de nos forces.

    Je ne pense pas qu'il se trouve un Américain qui doute le moins du monde de notre capacité d'infliger aux auteurs de ces crimes le châtiment qu'ils méritent.

    Votre gouvernement sait que, durant des semaines, l'Allemagne a répété au Japon qu'il ne partagerait pas avec elle les dépouilles, quand la paix serait conclue, s'il n'attaquait les Etats-Unis. L'Allemagne a promis au Japon que s'il participait au conflit, la zone entière du Pacifique passerait totalement et définitivement sous sa domination. Et cette zoné ne comprend pas seulement l'Extrême-Orient, pas seulement les îles du Pacifique, mais aussi la côte occidentale de l'Amérique du Nord, de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud.

    Nous savons aussi que l'Allemagne et le Japon conduisent leurs opérations militaires et navales selon un plan établi en commun. D'après ce plan, tous les peuples et toutes les nations qui n'aident pas les puissances de l'Axe sont considérés par chacune de celles-ci comme des ennemis communs.

    Telle est leur grande stratégie, elle est simple et évidente. C'est pourquoi le peuple américain doit se rendre compte qu'à cette stratégie on ne peut en opposer qu'une autre, de même nature. Il faut que nous comprenions, par exemple, que les succès japonais dans le Pacifique sont utiles aux Allemands pour leurs opérations en Libye ; que tout succès allemand dans le Caucase doit inévitablement faciliter aux Japonais les opérations contre les Indes néerlandaises ; qu'une attaque allemande contre Alger ou le Maroc fraie la voie à une attaque allemande contre l'Amérique du Sud et le Canal de Panama.

    Mais, en revanche, il importe aussi que nous sachions que la résistance des francs-tireurs en Serbie ou en Norvège, nous sert ; qu'une offensive russe qui a du succès nous sert ; et qu'une victoire britannique, sur terre, ou sur mer, dans n'importe quelle partie du monde, nous rend plus forts.

    Souvenez-vous toujours que l'Allemagne et l'Italie, sans se soucier d'une déclaration de guerre officielle, se considèrent, en ce moment, comme étant en guerre avec les Etats-Unis, tout comme elles sont en guerre avec la Grande-Bretagne et la Russie.

    Et l'Allemagne met dans la même catégorie toutes les autres républiques des deux Amériques. Nos républiques soeurs de cet hémisphère ne peuvent qu'en tirer honneur.

    Le but véritable que nous poursuivons est bien au-dessus et bien au-delà du triste champ debataille. Lorsque nous avons recours à la force, comme nous devons le faire en ce moment, nous n'en sommes pas moins résolus à orienter cette force vers le bien suprême, alors même que nous l'employons pour combattre le mal.

    Nous autres Américains, nous ne sommes pas des destructeurs, nous sommes des constructeurs.

    Nous voici en plein dans la guerre, maintenant, non pas pour faire des conquêtes, non pas pour exercer une vengeance, mais pour préparer à nos enfants un inonde où cette nation — et tout ce que cette nation représente — sera à l'abri des menaces.

    Nous sommes décidés à éliminer le danger que le Japon fait peser sur nous. Mais à quoi nous servirait cette victoire, si le reste du monde était dominé par Hitler et Mussolini ?

    Nous allons gagner la guerre, et nous allons gagner la paix qui la suivra.

    En ces heures difficiles, et durant les sombres jours qui peut-être nous attendent, nous saurons que l'immense majorité des hommes est avec nous. Un grand nombre d'entre eux luttent à nos côtés. Tous prient pour nous.

    Car, en défendant notre cause, nous défendons aussi la leur — notre espoir et leur espoir de liberté sous le règne de Dieu.


Franklin Delano Roosevelt
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11 mars 2008 2 11 /03 /mars /2008 14:00
 
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CHAPITRE QUATRIEME  - Seconde partie
La Guerre
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HISTOIRE DES RELATIONS DES ETATS-UNIS AVEC LE JAPON

    Le 8 décembre 1941, j'ai présenté personnellement au Congrès un message où je lui demandais de déclarer la guerre en réponse à l'attaque déloyale que le Japon avait déclenchée contre les Etats-Unis.

    Afin de porter les faits à la connaissance du Congrès, et de les rendre publics, je présente ce résumé historique de la politique passée de notre pays, en ce qui concerne la zone du Pacifique, et des événements qui conduisirent à l'agression japonaise contre nos forces armées et notre territoire. Ci-joints les divers documents et la correspondance qui se rapportent à ce chapitre d'histoire.

I

    Il y a un peu plus d'un siècle, en 1833, les Etats-Unis concluaient avec le Siam leur premier traité en Extrême-Orient. Ce traité tendait à assurer la paix et des relations confiantes entre les deux pays.

    Dix ans plus tard, Caleb Cushing était envoyé en Chine pour y négocier notre premier traité qui fut conclu en 1844.

    En 1853, le Commodore Perry frappait aux portes du Japon. Au cours des quelques années qui suivirent, ces portes s'ouvrirent peu à peu, et le Japon, qui s'était toujours tenu à l'écart, commença d'adopter ce que nous nommons la civilisation occidentale. En ces jours lointains, les Etats-Unis usèrent de toute leur influence pour protéger le Japon durant cette phase de son évolution.

    En ce qui concerne la zone du Pacifique, les Etats-Unis ont constamment insisté, ainsi qu'ils l'ont fait à propos de toutes les autres régions du inonde, sur l'importance fondamentale qu'avait pour la paix du monde le respect du principe de l'égalité de traitement pour toutes les nations. Aussi, chaque fois qu'une nation avait tendance à empiéter sur l'indépendance et la souveraineté des pays d'Extrême-Orient, les Etats-Unis se sont-ils efforcés de décourager cette tentative partout où ils le pouvaient.

    Il y eut une période où cette attitude américaine fut de la plus grande importance pour le Japon. De tout temps, elle a été précieuse à la Chine et à d'autres pays d'Extrême-Orient.

    A la fin du XIXe siècle, la souveraineté sur les Iles Philippines passa de l'Espagne à notre pays. Les Etats-Unis s'étaient engagés à poursuivre à l'égard des Philippins une politique tendant à faire d'eux une nation libre et indépendante. Cette politique a été pratiquée avec persévérance.

    A cette époque, la Chine était devenue l'objet de ce qu'on a appelé « la course aux concessions ». On allait jusqu'à parler d'un partage éventuel de la Chine. C'est alors que fut institué en Chine le principe de la « porte ouverte ». En 1900, le gouvernement américain déclara que sa politique tendait à « chercher une solution susceptible de procurer à la Chine une sécurité permanente et la paix..., à protéger tous les droits garantis à des puissances amies par les traités et la loi internationale, et à sauvegarder le principe de l'égalité de traitement pour toutes les nations du monde en ce qui concerne le commerce dans toutes les parties de l'Empire chinois. »

    Depuis ce jour, nous n'avons cessé de défendre le principe de la « porte ouverte » dans tout l'Extrême-Orient.

    En 1908, le gouvernement des Etats-Unis et le gouvernement du Japon conclurent un accord par un échange de notes. Dans cet accord, les deux gouvernements se déclaraient unanimement résolus à soutenir « par tous les moyens pacifiques à leur disposition l'indépendance et l'intégrité de la Chine, ainsi que le principe de l'égalité de traitement pour toutes les nations en ce qui concerne le commerce et l'industrie dans cet Empire ». Ils déclaraient encore que « les deux gouvernements étaient désireux d'encourager le développement libre et pacifique de leur commerce dans le Pacifique », et que « la politique des deux gouvernements tendait au maintien du statu quo dans cette région ». Les Etats-Unis ont toujours mis en pratique les principes énoncés dans cet accord.

    En 1921, après la fin de la première guerre mondiale, neuf puissances qui avaient des intérêts dans le Pacifique occidental se réunirent à Washington. La Chine, le Japon et les Etats-Unis participaient à cette conférence. L'un de ses buts principaux était le maintien de la paix dans le Pacifique. Ce but devait être atteint par la réduction des armements et par des règlements qui posaient des limites à la concurrence dans le Pacifique et dans les régions d'Extrême-Orient. Divers traités et accords furent conclus au cours de cette conférence.

    L'un de ceux-ci est le « Traité des Neuf Puissances ». Il garantissait le respect de la souveraineté de la Chine et le principe de l'égalité de traitement pour toutes les nations en ce qui concerne le commerce et l'industrie dans la Chine entière.

    Les Etats-Unis, l'Empire britannique, la France, l'Italie et le Japon conclurent également un traité pour la limitation des armements navals.

    Le cours des événements qui a conduit tout droit à la crise actuelle a commencé il y a dix ans. Ce fut à ce moment-là — en 1931 — que le Japon inaugura sur une grande échelle sa politique actuelle de conquête en Chine. Il débuta par une invasion de la Mandchourie, qui faisait partie de la Chine. Le Conseil et l'Assemblée de la Société des Nations essayèrent aussitôt d'amener le Japon à renoncer à cette conquête. Durant plusieurs mois, la Société des Nations continua ses efforts, appuyée par les Etats-Unis. C'est ainsi que le 7 janvier 1932, le gouvernement des Etats-Unis fit savoir au Japon et à la Chine qu'il ne reconnaîtrait aucune situation, aucun traité ou accord résultant de la violation des traités existants.

    Cette agression barbare du Japon en Mandchourie a donné un exemple, et fourni un modèle qui devaient bientôt être imités par l'Italie et l'Allemagne en Afrique et en Europe. En 1933, Hitler prenait le pouvoir. Il était évident que l'Allemagne, une fois réarmée, s'embarquerait dans une politique de conquête de l'Europe. L'Italie — qui alors était encore sous la domination de Mussolini — avait résolu, elle aussi, de poursuivre une politique de conquête en Afrique et dans la Méditerranée.

    Au cours des années suivantes, l'Allemagne, l'Italie et le Japon convinrent d'échelonner leurs actes d'agression dans leur intérêt commun, et ainsi, de réduire en esclavage le reste du monde.

    En 1934, le Ministre japonais des Affaires Etrangères envoya une note amicale aux Etats-Unis où il se déclarait fermement convaincu qu'il n'existait, pour les deux gouvernements, aucune question « qui ne fût susceptible d'être résolue à l'amiable ». Il ajoutait que le Japon « n'avait pas la moindre intention de créer des complications à une autre puissance, quelle qu'elle fût. Notre Secrétaire d'Etat, Cordell Hull, répondit sur le même ton.

    Mais en dépit de ces manifestations amicales, et presque aussitôt après, les actes et les déclarations du gouvernement japonais ne tardèrent pas à démentir ces assurances — du moins en ce qui concernait les droits et les intérêts des autres nations en Chine.

    Sur ces entrefaites, notre gouvernement fit connaître au Japon ses vues et celles du peuple américain selon lesquelles aucune nation ne pouvait se permettre de fouler aux pieds les droits et les intérêts légitimes d'autres états souverains.

    Le Japon commençait à démanteler la structure de la paix qui se fondait sur les traités de la Conférence de Washington. En effet, en décembre 1934, le gouvernement japonais manifesta son intention de dénoncer le traité du 6 février 1922, qui avait limité la course aux armements navals. Par la suite, il élargit encore son programme de réarmement.

    En 1936, le gouvernement japonais s'associa ouvertement avec l'Allemagne en signant le pacte anti-Komintern. Ce pacte, comme nous le savons tous, était en apparence dirigé contre l'Union Soviétique ; mais son vrai but était de dresser une ligue fasciste contre le monde libre, en particulier contre la Grande-Bretagne, la France et les Etats-Unis.

    Après que l'Allemagne, l'Italie et le Japon eurent formé cette association, le terrain fut tout préparé pour une entreprise de conquête universelle.

    En juillet 1937, se sentant prêtes, les forces armées japonaises entreprirent des opérations militaires de grande envergure contre la Chine. Bientôt les chefs de guerre japonais, laissant tomber le masque d'hypocrisie, déclarèrent publiquement leur intention de conquérir et d'assurer au Japon une position dominante dans toute l'Asie orientale, dans le Pacifique occidental et le Pacifique méridional.

    Ils faisaient ainsi leur, la thèse allemande selon laquelle 70 ou 80 millions d'Allemands étaient supérieurs — par leur race, par leur éducation, par leurs capacités et par leur puissance — à toute autre race en Europe — supérieurs à environ 400 millions d'autres êtres humains dans cette zone. Et le Japon, suivant cet exemple, annonçait à son tour que 70 ou 80 millions de Japonais étaient supérieurs à 7 ou 800 millions d'autres habitants de l'Orient — dont la plupart étaient d'origine plus ancienne et possédaient une culture et une civilisation plus développées que les leurs. Un orgueil démesuré les incitait à se rendre maîtres d'une région qui comprenait presque la moitié de la population totale de la terre, ce qui leur permettrait de dominer complètement les grandes routes maritimes et les routes commerciales importantes pour le monde entier.

    Les opérations militaires qui se déroulaient en Chine ne tenaient aucun compte des droits américains. Des soldats japonais tuèrent des Américains. Ils blessèrent ou insultèrent des hommes, des femmes et des enfants américains. Les forces armées japonaises coulèrent des navires américains, y compris un bâtiment de guerre, le Panay. Elles bombardèrent des hôpitaux américains, des églises, des missions, des écoles américaines. Elles détruisirent des biens américains. Elles créèrent des difficultés au commerce américain, et dans certains cas, elles l'éliminèrent complètement.

    Pendant ce temps, les Japonais infligeaient à la Chine des dommages incalculables, et de terribles souffrances au peuple chinois. Ils lésaient gravement aussi les intérêts des autres nations —bafouant tous les principes de paix et de bonne volonté parmi les hommes.

II

    Cependant, les méthodes de la conquête brutale sévissaient en Europe et dans la Méditerranée.

    Hitler et Mussolini s'étaient lancés dans une entreprise de conquête illimitée. Depuis 1935, sans l'ombre d'une excuse, et sans avoir été provoqués, ils attaquèrent, conquirent et asservirent économiquement et politiquement quelque seize nations indépendantes. La machine de guerre qu'ils avaient montée en vue de cette conquête illimitée comprenait, et comprend encore, non seulement d'énormes effectifs, mais aussi de puissantes organisations qui avaient pour but de tramer des complots et des intrigues, d'établir un système d'intimidation, de mener la propagande et de pratiquer le sabotage. Cette machine de guerre, d'une puissance sans pareille, a des ramifications dans le monde entier ; les opérations et les plans japonais se sont méthodiquement insérés dans ce réseau.

    Tandis que l'Allemagne, l'Italie et le Japon conjuguaient leurs efforts et nouaient des rapports toujours plus étroits au cours de ces années, j'acquis la conviction que cette coalition finirait par attaquer les Etats-Unis et l'hémisphère occidental — si elle triomphait sur d'autres continents.

    L'existence même des Etats-Unis, en tant que grand peuple libre, l'existence même de la famille des nations américaines du Nouveau Monde eût constitué en soi un défi permanent à l'Axe. Les dictateurs de l'Axe auraient choisi leur heure pour montrer, de façon très claire, que leur plan de destruction englobait les États-Unis et le Nouveau Monde.

    C'est ce qu'ont fait l'an passé, en 1940, Hitler et Mussolini, lorsqu'ils ont conclu avec le Japon un traité d'alliance nettement dirigé contre les Etats-Unis.

    La stratégie du Japon dans la zone du Pacifique était l'exacte contre-partie de celle d'Hitler en Europe. Ici et là, grâce à des procédés d'infiltration, d'encerclement, d'intimidation, et finalement par la voie des armes, les peuples voisins ont été subjugués un à un. Chaque nouvelle acquisition était le point de départ d'une nouvelle agression.

III

    Poursuivant cette politique de conquête, le Japon s'insinua d'abord en Mandchourie, et finalement s'en empara. Puis il envahit la Chine. Depuis quatre ans et demi, il essaie de la subjuguer. Passant ensuite par la Mer de Chine, tout près des Philippines, il envahit l'Indochine et s'en empara également. Aujourd'hui, les Japonais ont étendu leur domination à la Thaïlande tout entière, et cherchent à occuper la Malaisie et la Birmanie. Les Philippines, Bornéo, Sumatra et Java sont déjà marquées sur leur agenda. Il est probable qu'au bas de la page sont inscrits les noms de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande et de toutes les autres îles du Pacifique, y compris les îles Hawaï et le grand archipel des îles Aléoutiennes.

    A l'est des Philippines, le Japon viola le mandat qui, après la première guerre mondiale, mettait sous sa garde les Iles Carolines, les Marshall et les Mariannes, non seulement en les fortifiant, en les fermant à tout commerce, sauf le sien, mais en allant jusqu'à en interdire l'accès à tout étranger.

    Les porte-paroles japonais, selon leur coutume, dissimulèrent ces conquêtes sous un voile de formules innocentes en apparence. Ils parlaient de « Nouvel Ordre » en Asie orientale et aussi de « sphère de co-prospérité dans une grande Asie orientale ». En réalité, ce qu'ils avaient en vue, c'était l'asservissement de chaque nation qu'ils pourraient soumettre, et l'enrichissement, non pas de toute l'Asie, ni même du peuple japonais, mais des chefs de guerre qui avaient accaparé le pouvoir de l'état. Là encore, ils imitaient le procédé nazi.

    Par cette suite d'agressions, les Japonais ont obligé divers pays — y compris le nôtre — à masser, pour leur défense dans le Pacifique, des forces armées et de grandes quantités de matériel qui, autrement, eussent pu être utilisées contre Hitler.

    C'était exactement ce qu'Hitler souhaitait. La diversion que créait son allié japonais contraignit les nations éprises de paix à établir et à maintenir un vaste front de guerre dans le Pacifique.

IV

    Tandis que les Japonais mettaient en exécution ce programme d'agression, le gouvernement des Etats-Unis s'était constamment efforcé de persuader le gouvernement japonais que, dans son intérêt même, le Japon devait maintenir et cultiver des relations d'amitié avec les Etats-Unis et avec tous les pays qui croient à la possibilité d'une évolution pacifique.

    Après le début des hostilités entre le Japon et la Chine, en 1937, le gouvernement américain fit savoir au gouvernement japonais et au gouvernement chinois qu'il se tenait prêt à leur offrir ses bons offices aussitôt qu'ils jugeraient tous deux le moment opportun. Durant les années de guerre qui suivirent, notre attitude à cet égard resta constante.

    En octobre 1937, à l'invitation du gouvernement belge, 19 pays qui ont des intérêts en Extrême-Orient, y compris les États-Unis, envoyèrent à Bruxelles des représentants chargés d'examiner la situation en Extrême-Orient à la lumière du Traité des Neuf Puissances. Ces délégués devaient s'efforcer de régler le différend entre le Japon et la Chine par des moyens pacifiques. Seuls de toutes les puissances, le Japon et l'Allemagne déclinèrent l'invitation. Le Japon était lui-même un des signataires originels de ce traité. La Chine, qui avait signé le Traité des Neuf Puissances, et l'Union Soviétique, qui ne l'avait pas signé, assistaient l'une et l'autre à cette conférence.

    Quand elle s'ouvrit, les pays qui y étaient représentés firent de nouvelles tentatives pour persuader le Japon d'y participer. Une fois de plus, le Japon refusa.

    Le 24 novembre 1937, la Conférence adopta une résolution demandant que « les hostilités fussent suspendues et que l'on eût recours à un règlement pacifique ». Le Japon ignora la Conférence et ne fit aucun cas de cette recommandation.

    Il devenait évident que si le cours des événements n'était pas changé en Extrême-Orient, la zone du Pacifique serait condamnée à subir les mêmes dévastations que l'Europe.

    C'est pourquoi, en cette année 1941, les Etats-Unis, tentant un dernier effort pour régler le conflit par des voies pacifiques, entamèrent des pourparlers avec le Japon.

    Ces pourparlers se poursuivirent durant neuf mois, dans le but de réaliser un accord acceptable pour les deux pays.

    Tout au long de ces pourparlers, le gouvernement américain tint compte non seulement des intérêts légitimes des Etats-Unis, mais aussi de ceux du Japon et d'autres pays. Quand surgissaient des questions qui avaient trait aux droits légitimes et aux intérêts d'autres pays, le gouvernement américain se mettait en contact, comme il convenait, avec les représentants de ces pays.

    Au cours de ces négociations, les Etats-Unis ont constamment défendu certains principes fondamentaux qui doivent régir les relations internationales, notamment :

    Le principe de l'inviolabilité de l'intégrité territoriale et de la souveraineté de toutes les nations.

    Le principe de la non-intervention dans les affaires intérieures des autres pays.

    Le principe de l'égalité — y compris l'égalité de traitement en ce qui concerne le commerce.

    Le principe du recours à la coopération internationale en vue de prévenir les conflits ou de les régler par des voies pacifiques.

    Le gouvernement japonais, il est vrai, fit à plusieurs reprises des déclarations autorisées où il manifestait des intentions pacifiques. Mais chaque fois que l'on examinait ces propositions de plus près, on s'apercevait que le Japon n'avait nullement l'intention de modifier en quoi que ce soit ses visées agressives sur la zone tout entière du Pacifique. Bien qu'il prétendît sans cesse ne vouloir assurer que la paix et une prospérité plus grande en Asie orientale, il continuait à attaquer brutalement les Chinois.

    En outre, le Japon ne manifestait pas le moindre désir de rompre son alliance impie avec l'hitlérisme.

    Au mois de juillet de cette année, le gouvernement japonais, de connivence avec Hitler, extorqua au gouvernement français de Vichy l'autorisation de masser des forces armées dans le sud de l'Indochine. Et il se mit aussitôt à y expédier des troupes et du matériel.

    Sur quoi les pourparlers entre le gouvernement américain et le gouvernement japonais furent suspendus.

    Mais au cours du mois suivant, sur les instances pressantes du gouvernement japonais qui, de nouveau, faisait profession de ses intentions pacifiques, les négociations furent reprises.

    A ce moment-là, le gouvernement japonais proposa que les chefs responsables des deux gouvernements se rencontrassent pour discuter ensemble les moyens d'ajuster les relations entre les deux pays. J'eusse été heureux de faire dans ce but des milliers de kilomètres pour voir le Premier Ministre du Japon. Mais je sentais que, auparavant, il serait opportun d'obtenir quelque assurance concernant la possibilité même d'un accord sur les principes fondamentaux. Le gouvernement américain fit tous ses efforts pour obtenir une assurance de cette nature — mais en vain.

    Les diverses propositions faites par le gouvernement japonais et l'attitude adoptée par notre gouvernement sont exposées dans un document que le Ministre des Affaires étrangères a présenté le 2 octobre 1941 à l'ambassadeur du Japon. Par la suite, diverses formules d'accord furent proposées et discutées. Mais le gouvernement japonais n'en continuait pas moins sa politique de guerre et de conquête.

    Finalement, le 20 novembre 1941, le gouvernement japonais présenta une nouvelle proposition de caractère restreint. Le Japon demandait aux Etats-Unis de lui fournir tout le pétrole dont il avait besoin, de suspendre les mesures de bloquage et de cesser d'aider la Chine. Mais cette proposition ne contenait rien qui permit de croire que le Japon renoncerait à ses opérations belliqueuses et à ses buts de guerre.

    Il est évident qu'une telle proposition n'offrait aucune base pour un règlement pacifique ou même pour un arrangement provisoire. Dans le but de clarifier les questions en suspens, le gouvernement américain soumit au gouvernement japonais, le 26 novembre, un plan précis et simple pour un règlement d'ensemble.

    Dans ses grandes lignes ce projet d'accord entre les Etats-Unis et le Japon se divisait en deux parties. Dans la première on avait esquissé une déclaration de politique conjointe où les deux gouvernements affirmaient que leur politique nationale tendrait à l'établissement de la paix dans toute la zone du Pacifique, que leurs deux pays ne nourrissaient pas d'ambitions territoriales ou d'intentions agressives en ce qui concernait cette région, et qu'ils fourniraient un appui efficace à certains principes de paix essentiels sur lesquels se fonderaient leurs relations réciproques et leurs relations avec toutes les autres nations. Cette première partie prévoyait également que les Etats-Unis et le Japon s'engageraient à soutenir et à appliquer des principes économiques libéraux dans leurs rapports mutuels ainsi que dans ceux qu'ils entretiennent avec d'autres nations. Ces principes, qui étaient énumérés dans la proposition, se fondaient sur la thèse de l'égalité de traitement dans le domaine commercial.

    La deuxième partie exposait les mesures qui devaient être prises par les deux gouvernements — mesures se rapportant à une situation qui excluait la présence d'armées japonaises ou étrangères en Indochine française ou en Chine.

    Dans cette deuxième partie, également, on définissait sur les bases suivantes les engagements réciproques qui devaient être pris par les deux gouvernements :

    a) Les Etats-Unis et le Japon devaient s'efforcer d'amener la conclusion d'un pacte multilatéral de non-agression entre les gouvernements qui ont des intérêts particuliers dans le Pacifique ;

    b) Ils devaient s'efforcer d'amener les principaux intéressés à conclure un accord tendant à respecter l'intégrité territoriale de l'Indochine, n'y pas chercher et à n'y pas accepter de traitement préférentiel en ce qui concerne l'économie ;

    c) Ils devaient s'engager à ne soutenir en Chine aucun autre gouvernement que le gouvernement national de la République Chinoise, dont la capitale temporaire est Tchungking ;

    d) Ils devaient abandonner leurs droits extraterritoriaux en Chine et s'efforcer d'obtenir que les gouvernements qui exercent actuellement de tels droits y renoncent ;

    e) Ils devaient négocier un accord commercial fondé sur l'application réciproque de la clause de la nation la plus favorisée ;

    f) Chacun des deux gouvernements devait débloquer les fonds détenus par les ressortissants de l'autre ;

    g) Ils devaient se mettre d'accord sur un plan qui permettra de stabiliser le taux du change dollar-yen ;

    h) Ils devaient stipuler qu'aucun accord antérieurement conclu par l'un des deux gouvernements avec une tierce puissance ne pourrait être interprété par celle-ci d'une façon qui contrevienne aux intentions principales du présent accord ;

    i) Ils devaient user de leur influence pour amener d'autres gouvernements à donner leur adhésion aux principes fondamentaux de politique et d'économie prévus dans l'accord ainsi proposé.

    Au beau milieu de ces pourparlers, nous apprîmes que de nouveaux contingents japonais et de grandes quantités de fournitures de guerre étaient envoyés en Indochine. Vers la fin de novembre, ces mouvements de troupes s'accentuèrent. Durant la première semaine de décembre, de nouveaux mouvements de troupes japonaises révélèrent que, sous le couvert des négociations en cours, il se préparait des attaques sur des objectifs non spécifiés. Je demandai aussitôt au gouvernement japonais une déclaration franche au sujet de ses concentrations de troupes en Indochine. Je ne reçus qu'une réponse évasive et spécieuse. En même temps, les opérations japonaises progressaient à un temps de plus en plus rapide.

    Nous ne savions pas alors ce que nous savons maintenant : nous ignorions qu'à ce moment même, les Japonais étaient en train de mettre à exécution leur plan d'attaque déloyale contre nous.

    J'étais résolu, néanmoins, à épuiser toutes les tentatives concevables en vue de la paix. C'est dans cet esprit qu'au soir du 6 décembre dernier, j'adressai un message personnel à l'Empereur du Japon.

    A la proposition du 26 novembre que lui avait faite le gouvernement américain, le gouvernement japonais ne donna aucune réponse, jusqu'au 7 décembre. Ce jour-là, l'Ambassadeur japonais et le représentant spécial que le gouvernement japonais avait envoyé aux Etats-Unis pour participer à des négociations pacifiques remirent un long document à notre Secrétaire d'Etat. Une heure auparavant, les Japonais avaient déclenché, dans le Pacifique, leur abominable attaque contre le territoire américain et les citoyens américains.

    Voici comment notre Secrétaire d'Etat qualifiait ce document, peu d'instants après en avoir pris connaissance : « Je tiens à souligner que, dans mes conversations avec vous, au cours de ces neuf derniers mois (il s'agit de l'Ambassadeur du Japon), je n'ai jamais prononcé une parole qui ne fût vraie. Les archives en témoignent d'une façon irrécusable. Durant mes cinquante années d'activité au service de l'Etat, je n'ai jamais vu de document qui déformât davantage la vérité et qui fût plus rempli d'infâmes mensonges — mensonges si énormes que je n'aurais jamais cru jusqu'à ce jour qu'il pût se trouver sur notre planète un gouvernement capable d'en proférer de pareils. »

    Je suis entièrement d'accord avec chaque mot de cette déclaration.

    Pour rétablir les faits dans leur exactitude historique, il est indispensable, en lisant cette partie de mon message, de bien se souvenir que l'attaque aérienne et sous-marine déclenchée dans les îles Hawaï a commencé le dimanche 7 décembre à 13 h. 20, heure de Washington (7 h. 50, heure d'Honolulu du même jour — lundi 8 décembre, 3 h. 20, heure de Tokyo).

    A mon message du 6 décembre (21 heures, heure de Washington — 7 décembre, 11 heures, heure de Tokyo) à l'Empereur du Japon où j'invoquais sa coopération et l'invitais à entreprendre avec moi de nouveaux efforts pour préserver la paix, j'ai finalement reçu une réponse le 10 décembre (6 h. 23, heure de Washington — 10 décembre, 20 h. 23, heure de Tokyo). Cette réponse était contenue dans le rapport télégraphique de l'Ambassadeur des Etats-Unis à Tokyo, daté du 8 décembre, 13 heures (7 décembre, 23 heures, heure de Washington).

    Dans son rapport, notre ambassadeur déclarait qu'à 7 heures du matin du 8 décembre (7 décembre, 17 heures, heure de Washington) le Ministre japonais des Affaires Etrangères l'avait mandé à sa résidence officielle et lui avait présenté un mémorandum daté du 8 décembre (7 décembre, heure de Washington) dont le texte avait été transmis à l'Ambassadeur japonais à Washington. Il s'agissait précisément du mémorandum que celui-ci avait présenté au Secrétaire d'Etat, à 14 h. 20, le dimanche 7 décembre (lundi, 8 décembre,4 h. 20, heure de Tokyo). Le Ministre japonais des Affaires Etrangères — ajoutait notre Ambassadeur — avait été en contact avec l'Empereur, et l'Empereur souhaitait que ce mémorandum fût considéré comme sa réponse à mon message. En outre, rapporte notre Ambassadeur, le Ministre des Affaires Etrangères fit une déclaration orale qui commençait textuellement par ces mots : « Sa Majesté a exprimé sa gratitude et dit combien elle appréciait le message cordial du Président ». Le Ministre des Affaires Etrangères ajouta qu'en ce qui concernait nos demandes d'éclaircissements au sujet de l'accroissement des forces japonaises dans l'Indochine française, Sa Majesté avait ordonné à son gouvernement de faire connaître ses vues au gouvernement américain. La déclaration se terminait textuellement par les paroles suivantes :

    « Le plus vif désir de Sa Majesté, c'est de voir régner la paix dans le Pacifique et, par conséquent, dans le monde. Afin que ce désir puisse se réaliser, Sa Majesté a exigé, jusqu'ici, que son gouvernement poursuive sérieusement ses efforts. Sa Majesté espère que le Président a pleinement conscience de ce fait ».

    Mais la vraie réponse du Japon, celle qu'avaient donnée ses chefs de guerre et qui, de toute évidence, avait été formulée plusieurs jours auparavant, prit la forme d'une attaque à l'improviste contre nos territoires, en divers points du Pacifique.

    Tels sont les faits que l'histoire enregistrera avec stupeur, douleur, horreur et dégoût. Nous voici en guerre. Nous luttons pour nous défendre. Nous luttons pour la défense de notre existence nationale, de notre droit de vivre en sécurité, de notre droit de jouir des bienfaits de la paix. Nous luttons pour la défense des principes de légalité, de justice et d'ordre — contre un ennemi qui entreprend, avec une sauvagerie inouïe, d'abolir ces principes mêmes et d'imposer à l'humanité un régime de domination impitoyable par l'emploi de la force arbitraire et du pouvoir absolu.

 

Franklin Delano Roosevelt

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11 mars 2008 2 11 /03 /mars /2008 13:28
 
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CHAPITRE QUATRIEME  - Première partie
La Guerre

Roosevelt-december-8-1941.jpg 
« LES HOSTILITÉS ONT COMMENCÉ »

    Hier, 7 décembre 1941, date qui restera marquée d'une honte éternelle —les Etats-Unis d'Amérique ont été l'objet d'une attaque soudaine et préméditée de la part des forces aériennes et navales de l'Empire du Japon.

    Les Etats-Unis étaient en paix avec cette nation et, à la demande du Japon, menaient encore avec son gouvernement et son empereur des pourparlers en vue du maintien de la paix dans le Pacifique. En fait, une heure après que les escadrilles japonaises eurent commencé à bombarder Oahu, l'ambassadeur du Japon près les Etats-Unis, et son collègue, transmettaient au Secrétaire d'Etat une réponse officielle à un récent message américain. Bien que cette réponse mît en évidence l'inutilité de poursuivre les négociations diplomatiques en cours, elle ne contenait ni menaces, ni allusions à la guerre ou à une attaque armée.

    On se souviendra que la distance entre Hawaï et le Japon montre clairement que cette attaque a été préméditée il y a bien des jours ou même bien des semaines. Pendant ce temps, le gouvernement japonais a délibérément cherché à tromper les États-Unis en faisant de fausses déclarations et en exprimant l'espoir que la paix serait maintenue.

    L'attaque d'hier sur les îles Hawaï a infligé de graves dommages aux forces militaires et navales américaines. Un grand nombre d'Américains ont perdu la vie. En outre, on annonce que des bateaux américains ont été torpillés en haute mer entre San-Francisco et Honolulu.

    Hier, le gouvernement japonais a également déclenché une attaque contre la Malaisie.

    La nuit dernière, les forces japonaises ont attaqué Hong-Kong.

    La nuit dernière, les forces japonaises ont attaqué Guam.

    La nuit dernière, les forces japonaises ont attaqué les îles Philippines.

    La nuit dernière, les forces japonaises ont attaqué l'île de Wake.

    Ce matin, les Japonais ont attaqué l'île de Midway.

    Le Japon a donc déclenché par surprise une offensive qui s'étend à toute la région du Pacifique. Les faits d'hier parlent par eux-mêmes. Le peuple américain s'est déjà fait une opinion et comprend bien la portée du danger qui menace la vie même et la sécurité de notre nation.

    En ma qualité de commandant en chef de l'armée et de la marine, j'ai donné l'ordre de prendre toutes les mesures nécessaires à notre défense. Nous nous souviendrons toujours de la nature de l'agression qui a été commise contre nous.

    Peu importe le temps qu'il nous faudra pour refouler cette invasion préméditée ; le peuple américain, fort de son droit, se fraiera un chemin jusqu'à la victoire totale.

    Je crois être l'interprète de la volonté du Congrès et du peuple en déclarant que non seulement nous nous défendrons jusqu'à l'extrême limite de nos forces, mais que nous agirons de façon à être bien sûrs que cette forme de perfidie ne nous mettra plus jamais en danger.

    Les hostilités ont commencé. Il n'y a pas à se dissimuler que notre peuple, notre territoire et nos intérêts sont en péril.

    Confiants en nos forces armées, nous remporterons l'inévitable triomphe grâce à la résolution inébranlable de notre peuple. Et que Dieu nous aide !

    Je demande au Congrès de déclarer que depuis la lâche attaque non provoquée du Japon, du dimanche 7 décembre, l'état de guerre existe entre les Etats-Unis et l'Empire du Japon.

 

Franklin Delano Roosevelt

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10 mars 2008 1 10 /03 /mars /2008 17:45
 
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CHAPITRE TROISIEME  - Quatrième partie
Contre la tyrannie et les dictateurs
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IL N'Y A PAS DE COMPROMIS AVEC LA BARBARIE. NOUS DEVONS ETRE LE GRAND ARSENAL DE LA DÉMOCRATIE

Le combat de la démocratie contre la conquête du monde est aidé considérablement et doit l'être encore davantage par le réarmement des Etats-Unis et l'envoi de chaque once, de chaque tonne de munitions et d'approvisionnements dont nous pouvons disposer pour secourir ceux qui sont sur le front. Il n'est pas plus contraire à la neutralité que nous agissions ainsi, qu'il ne l'est pour certains voisins de l'Allemagne de lui envoyer chaque jour de la semaine, de l'acier, du minerai, de l'huile et autres matières premières de guerre.

Nous préparons notre propre défense, de toute urgence, et dans son sens large, nous devons y inclure les besoins de guerre de la Grande-Bretagne et des autres nations libres qui luttent contre l'agression.

Ce n'est pas une question de sentiment, ou d'opinion personnelle discutable. C'est une question de tactique pratique et réaliste, basée sur l'avis d'experts militaires, qui sont bien au courant de la guerre actuelle. Ces experts de l'armée de terre et de la marine, comme les membres du Congrès et de l'Administration, n'ont qu'un seul but : la défense des États-Unis.

La nation fait un gros effort pour produire tout ce qui est nécessaire en cette alerte — et aussi vite que possible. Ce grand effort rend nécessaire de grands sacrifices.

Je ne voudrais demander à personne de défendre une démocratie, qui, à son tour, ne défendrait pas chacun de ses membres contre le besoin et les privations. Ce pays ne sera pas affaibli par la carence du gouvernement à son devoir de protection du bien-être économique du citoyen.

Si notre capacité de production dépend des machines, on ne doit jamais oublier que c'est l'habileté et la force des travailleurs qui font marcher ces machines.

Puisque le gouvernement est décidé à protéger les droits des travailleurs, le pays a le droit de s'attendre à ce que les hommes qui font marcher les machines s'occupent exclusivement des besoins urgents de la défense.

Le travailleur a la même dignité humaine et a droit à la même sécurité sociale que l'ingénieur, le directeur ou le propriétaire. Ce sont les travailleurs qui fournissent la main-d'oeuvre qui produit les destroyers, les avions et les chars.

Le pays compte sur nos arsenaux pour travailler sans l'interruption des grèves et des lock-outs. Il compte et veut que le patronat et les travailleurs s'entendent à l'amiable ou par les voies légales pour continuer à produire les approvisionnements qui sont si douloureusement nécessaires.

Dans le plan économique de notre grand programme de défense, nous faisons, comme vous le savez, tout pour maintenir la stabilité des prix et celle du coût de la vie.

Il y a neuf jours, j'ai annoncé la création d'une organisation plus efficace pour diriger notre effort gigantesque de production de munitions. L'affectation de grandes sommes d'argent et une direction bien coordonnée ne sont pas en elles-mêmes suffisantes. Les canons, les avions, les navires, et bien d'autres choses, doivent être construits dans les usines et les arsenaux de l'Amérique. Ils doivent être produits par les travailleurs, les directeurs et les ingénieurs, avec l'aide des machines qui • doivent, elles-mêmes, être construites par des centaines de milliers de travailleurs, partout dans le pays.

Pour cette grande oeuvre, il y a eu une coopération magnifique entre le Gouvernement, l'industrie et les travailleurs ; et j'en suis très reconnaissant.

Il a été fait appel au génie industriel américain, sans rival dans le monde pour la solution des problèmes de production ; il a mis ses ressources et ses talents en oeuvre. Des fabricants de montres, de machines agricoles, de linotypes, de caisses enregistreuses, d'automobiles, de machines à coudre, de tondeuses à gazon, de locomotives, font maintenant des fusées, des caisses à bombes, des pieds de lunettes télescopiques, des obus, des révolvers et des chars.

Mais notre effort présent est insuffisant. Nous avons besoin de plus de bateaux, de plus de canons, de plus d'avions, — de plus de tout. Cela ne sera possible que si nous écartons l'idée « des affaires comme d'habitude ». Cette tâche ne peut se faire, ajoutant aux productions actuellement existantes ce dont le pays a besoin pour sa défense.

Notre effort de défense ne doit pas être arrêté par ceux qui ont peur des conséquences futures d'un suréquipement. Les conséquences possibles de l'échec de notre effort de défense, seraient, dès maintenant, beaucoup plus à craindre.

A la fin des besoins actuels de notre défense, un remaniement habile des besoins de paix du pays réclamera toute la nouvelle capacité de production — sinon plus.

Il n'est pas de politique pessimiste pour l'avenir de l'Amérique qui puisse retarder l'expansion immédiate des industries essentielles à la défense. Nous en avons besoin.

Je veux qu'il soit évident nue le but du pays est de construire maintenant, avec toute la rapidité possible, toutes les machines, tous les arsenaux et toutes les usines dont nous ayons besoin pour créer notre matériel défensif. Nous avons les hommes, le savoir-faire, les ressources, et plus que tout, la volonté.

Si et là où la production de denrées de consommation ou de luxe dans certaines industries nécessitait l'usage de matières premières essentielles à notre but de défense, je sais que cette production s'arrêtera et qu'elle s'arrêtera bénévolement pour céder la place à notre objectif premier et nécessaire.   

Je fais appel aux propriétaires d'usines, aux directeurs, aux travailleurs, à nos propres fonctionnaires, pour qu'ils n'épargnent pas leurs efforts pour produire ces munitions rapidement et sans limites. En même temps que je fais cet appel, je vous donne la garantie de ce que, nous tous, qui sommes les officiels de votre Gouvernement, nous dévouerons également de tout notre coeur, à la grande tâche qui est devant nous.

Quand les avions, les navires, les canons, les obus, sortiront, alors votre Gouvernement pourra choisir, avec l'aide de ses experts défensifs, la meilleure manière de les utiliser pour la défense de cet hémisphère. La décision relative à la quantité à envoyer à l'étranger et à celle qui doit rester à la mère patrie doit être prise en considération de nos besoins militaires supérieurs.

Nous devons être le grand arsenal de la démocratie. Pour nous, ceci est une alerte aussi sérieuse que la guerre. Nous devons nous atteler à notre tâche avec la même résolution, la même conscience, le même esprit de patriotisme et de sacrifice que nous montrerions si nous étions en guerre.

Nous avons fournis aux Britanniques une grande aide matérielle, et nous lui en fournirons une bien plus grande à l'avenir.

Il n'y aura pas « d'étranglement » dans notre résolution d'aider la Grande-Bretagne. Ni dictateur, ni association de dictateurs n'affaibliront cette décision en agitant la menace des méthodes par lesquelles ils vont y parer.

Les Britanniques ont reçu une aide militaire de valeur inappréciable de la part de l'héroïque armée grecque, et des forces de tous les gouvernements en exil. Leur force augmente. C'est celle d'hommes et de femmes qui placent la liberté au-dessus de la vie.

Je crois que les puissances de l'Axe ne gagneront pas cette guerre. Je base cette opinion sur les meilleurs et les derniers renseignements. Il n'y

 a pas d'excuse au défaitisme. Nous avons toutes les bonnes raisons d'espérer la défense de notre civilisation et la construction d'une civilisation meilleure dans l'avenir.

J'ai la conviction profonde que le peuple américain est maintenant décidé à faire un effort plus grand que jamais pour augmenter la production des moyens de défense et faire face à la menace à notre foi démocratique.

En tant que Président des Etats-Unis, je demande cet effort national. Je le demande au nom de ce pays que nous aimons et honorons et que nous avons la chance et la fierté de servir. Je le demande à notre peuple, avec la foi absolue que notre cause commune connaîtra un succès éclatant.


Franklin Delano Roosevelt
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10 mars 2008 1 10 /03 /mars /2008 17:36
 
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(autres textes)

 

CHAPITRE TROISIEME  - Troisième partie
Contre la tyrannie et les dictateurs
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NOUS AIDERONS CEUX QUI ARRÊTENT LES DICTATEURS DANS LEUR MARCHE VERS LA DOMINATION DU MONDE.

    Dans le calme relatif de cette semaine, j'ai compris plus clairement que jamais que notre époque réclame du courage, et encore du courage, de l'action, et encore de l'action. C'est pourquoi il faut aujourd'hui rendre hommage au nom d'Andrew Jackson, parce qu'il fut d'abord, et avant tout, un grand Américain, qui mit son dévouement au pays au-dessus de ses idées de parti, et fournit un symbole éternel de l'âme rude et courageuse de notre peuple.

    Une lourde responsabilité pesait sur les épaules d'Andrew Jackson.

    A ce moment-là, la menace contre l'Union Fédérale venait de l'intérieur. C'était celle de la sécession. Bien plus, cette menace venait des états mêmes que représentait Jackson, elle venait même, des membres de son propre parti. Elle s'inspirait du refus de reconnaître l'autorité suprême des Etats-Unis. Par ses actes, Jackson se plaça bien au-dessus à la fois de la sécession et de l'esprit de parti.

    Maintenant, ce n'est pas un péril de sécession qui menace notre Union et notre Démocratie. Il vient d'une grande partie du monde qui nous entoure et qui se resserre chaque jour sur nous.

    A nouveau, pour accomplir cette oeuvre, nous autres Américains — presque tous — nous sommes élevés au-dessus des considérations de partis politiques.

    Bien avant la présidence de Jackson, le système de gouvernement à deux partis s'était enraciné comme principe de base de la vie politique américaine. Il avait montré ses avantages comme moyen d'obtenir une discussion libre et franche des arguments comme façon de formuler une nouvelle politique pour faire face à de nouvelles conditions, et pour fixer les responsabilités dans les affaires gouvernementales, partie essentielle de notre conception d'élections libres.

    Les dictateurs ne peuvent comprendre qu'ici, en Amérique, notre peuple puisse garder deux partis et en même temps rester une nation une et indivisible. L'esprit totalitaire est trop étroit pour comprendre la grandeur d'un peuple qui peut se diviser par l'adhésion aux partis au moment des élections, mais qui demeure, en tout temps, uni dans l'amour de la patrie et l'idéal démocratique.

    Sous le régime dictatorial, il ne peut y avoir de division de partis. Car tous les hommes doivent penser sur ordre, parler sur ordre, écrire sur ordre, vivre et mourir sur ordre. Dans ces pays la nation n'est pas au-dessus du parti, comme chez nous ; le parti est au-dessus de la nation, le parti est la nation.

    Tout homme et toute femme doit suivre le sentier rectiligne et étroit des idées du parti, et, à dire vrai, même pas celles du parti, mais celles du dictateur qui possède le parti.

    Dans notre pays, les divergences intérieures sont exprimées au bureau de vote ; chez les dictateurs, on les supprime au camp de concentration.

    L'année dernière, nous avons eu une élection américaine, dans laquelle le peuple (démocrates, républicains, indépendants et autres), grâce au suffrage secret, et sans l'aiguillon des baïonnettes des troupes d'assaut, ont élu leurs représentants locaux, d'état et nationaux.

    Nous sommes décidés à agir de telle façon que les Américains puissent avoir, d'année en année, des élections libres.

    Toutes les grandes libertés qui forment la base de notre démocratie américaine sont part et portion de cette idée d'élections libres, avec la libre expression du choix entre les candidats des partis politiques. Car, de telles élections garantissent l'impossibilité d'étouffer la liberté de parole, la liberté de la presse et des ondes, la liberté de conscience.

    Tels sont les principes éternels que menacent, en ce moment, l'alliance des dictateurs.

    C'est à nous de défendre ces principes qui nous ont été transmis comme héritage national, c'est à nous de les remettre non seulement intacts, mais plus forts que jamais, à toutes les générations à venir.

    Nous autres Américains, comprenons maintenant combien serait précaire l'existence de notre système de partis, de notre liberté d'élections, de notre liberté de vie, si les doctrines dictatoriales devaient prévaloir. Car, si elles prévalaient, ce ne serait pas seulement en Europe.

    L'histoire des nations trahies durant l'année dernière, celle des nations conquises l'année dernière, devrait nous montrer ainsi qu'au reste du monde, ce que cela signifie que de vivre dans un univers organisé et régenté par la Gestapo.

    Demandons-nous franchement et sans peur : combien de temps pourrions-nous garder nos anciennes libertés en ces terribles conditions ? En quel bref délai devrions-nous accepter la doctrine qui veut que l'on combatte le feu par le feu ? Pendant combien de temps serait-il possible de maintenir l'apparence de notre système à deux partis dans un inonde dominé par lés nazis ? En quel bref délai déciderions-nous d'imiter le nazisme et d'abandonner notre système à deux partis pour enrégimenter notre peuple en un seul, qui ne serait certainement ni démocratique, ni républicain ?

    Si ces mauvaises heures devaient venir, nous ne tiendrions plus ces assemblées amicales, ni au Jour de Jackson, ni au Jour de Lincoln.

    Nous autres Américains, nous avons déjà soupesé ces questions avec soin et réflexion. Nous autres Américains, avons annoncé notre décision d'aider de toutes nos ressources et de tout notre pouvoir ceux qui arrêtent les dictateurs dans leur marche vers la domination du monde.

    La décision à laquelle nous avons abouti n'est pas partisane. Le chef du parti républicain — Mr. Wendel Wilkie — lui-même, par ses paroles comme par ses actions, montre ce que des Américains patriotes veulent dire par s'élever au-dessus de l'esprit partisan et se rallier à la cause commune. Et maintenant que le peuple franc de l'Amérique a fait connaître sa décision, les républicains et les démocrates, au Congrès, comme en dehors de lui, coopèrent patriotiquement à transformer cette décision en réalité positive.

 

Franklin Delano Roosevelt
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10 mars 2008 1 10 /03 /mars /2008 16:41
 
ECRITS POLITIQUES
FRANKLIN DELANO ROOSEVELT
COMBATS POUR DEMAIN

(autres textes)

 

CHAPITRE TROISIEME  - Première partie
Contre la Tyrannie et les dictateurs
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MESSAGE DU 14 AVRIL 1939 A HITLER ET MUSSOLINI


    Vous savez, j'en suis sûr, qu'à travers le monde, des centaines de millions d'êtres humains vivent aujourd'hui dans la crainte constante d'une nouvelle guerre ou même d'une suite de guerres.

    L'existence de cette peur et la possibilité d'un tel conflit concernent certainement le peuple des Etats-Unis au nom de qui je parle et les autres Nations de l'hémisphère ouest. Tous savent qu'un conflit important, même s'il restait circonscrit à d'autres continents pèserait lourdement sur eux pendant sa durée, et aussi sur les générations à venir.

    Puisqu'après la tension aiguë dans laquelle le monde a vécu pendant ces dernières semaines, il semble qu'il y ait une détente au moins provisoire, puisqu'actuellement il n'y a pas de troupes en marche, c'est peut-être le moment opportun pour moi de vous envoyer ce message.

    En une précédente occasion, je me suis adressé à vous en faveur du règlement des problèmes politiques, économiques et sociaux par des méthodes pacifiques et sans recours aux armes.

    Mais la marée des événements semble être revenue à la menace par les armes. Si de telles mesures continuent, il semble inévitable qu'une grande partie du monde soit entraînée dans une ruine commune. Le monde entier, pays vainqueurs, pays vaincus, pays neutres, souffrira. Je me refuse à croire que le monde soit nécessairement un tel prisonnier du destin. Au contraire, il est clair que les chefs des grandes nations ont en leur pouvoir de libérer leurs peuples du désastre qui menace. Il est également clair qu'au fond de leur esprit comme au fond de leur cœur, les peuples désirent la fin de leurs craintes.

    Il est cependant malheureusement nécessaire de prendre connaissance des faits récents.

    Trois nations en Europe et une en Afrique ont vu se terminer leur vie indépendante. Un vaste territoire dans une autre nation indépendante de l'Extrême-Orient a été occupé par un état voisin. Des rapports, que nous ne croyons pas, insistent sur le fait que de nouvelles agressions sont projetées toujours contre d'autres nations indépendantes. Il est évident que le monde va vers le moment où cette situation se terminera en catastrophe, à moins qu'une manière plus rationnelle de diriger les événements ne soit trouvée.

    Vous nous avez, à plusieurs reprises, assuré que vous et le peuple allemand n'avaient aucun désir de guerre. Si cela est vrai, il n'y a pas besoin de conflit.

    Rien ne peut persuader les peuples de la terre qu'un gouvernement a le droit ou le besoin d'infliger les conséquences d'une guerre à son propre peuple, ou à un autre, sauf le cas de la défense indiscutable de la mère patrie.

    En faisant cette déclaration, nous, Américains, ne parlons pas par égoïsme, peur ou faiblesse. Si nous parlons maintenant, c'est avec la voix de la force et par amitié pour l'humanité. Je suis toujours certain que les problèmes internationaux peuvent être résolus à une table de conférence.

    Ce n'est donc pas une réponse à un appel en faveur d'une discussion pacifique que de déclarer, pour une des parties, qu'à moins de recevoir des assurances préliminaires d'un verdict en sa faveur, elle ne déposera pas les armes. Dans les conférences comme devant les tribunaux, il est nécessaire que les deux parties abordent la discussion de bonne foi, admettant qu'une justice réelle en résultera pour elles deux, et il est habituel et nécessaire qu'elles déposent leurs armes pendant qu'elles confèrent.

    Je suis convaincu que la cause de la paix mondiale ferait un grand pas en avant si les pays du monde obtenaient une déclaration franche quant à la politique présente et future des gouvernements.

    Puisque les Etats-Unis, en tant que nation de l'hémisphère ouest, ne sont pas inclus dans les discussions présentes, qui ont survenu en Europe, je pense que vous pouvez désirer me faire cette déclaration à moi, en tant que chef d'une nation éloignée de l'Europe, de façon à ce que, agissant avec la responsabilité et les obligations d'un intermédiaire amical, je puisse communiquer une telle déclaration à d'autres nations, actuellement effrayées de la voie que peut prendre la politique de votre gouvernement.

    Voulez-vous donner l'assurance que vos forces armées n'attaqueront ni n'envahiront le territoire ou les possessions des nations indépendantes suivantes : Finlande, Esthonie, Lettonie, Lithuanie, Suède, Norvège, Danemark, Hollande, Belgique, Grande-Bretagne et Irlande, France, Portugal, Espagne, Suisse, Liechtenstein, Luxembourg, Pologne, Hongrie, Roumanie, Yougo-Slavie, Russie, Bulgarie, Grèce, Turquie, Irak, Arabie, Syrie, Palestine, Egypte et Iran.

    Une telle assurance doit clairement se référer non seulement au présent, mais également à un futur suffisamment étendu pour donner toutes les chances de travailler à une paix plus stable par des méthodes pacifiques. C'est pourquoi je suggère que vous donniez au mot futur, en l'appliquant à une période minimum de non agression, une signification de dix ans au moins, d'un quart de siècle, si nous osons voir aussi loin.

    Si de telles assurances sont données par votre gouvernement, je les transmettrai immédiatement aux gouvernements des nations que j'ai nommées et je demanderai en même temps si, comme j'en suis sûr, chacune des nations énumérées veut me donner une semblable assurance pour que je vous la transmette.

    Des assurances comme celles que j'ai ébauchées apporteront au monde un soulagement immédiat.

    Je propose que si elles sont données, deux problèmes essentiels soient rapidement discutés dans l'atmosphère de paix qui en résultera et le gouvernement des Etats-Unis sera heureux de prendre part à ces discussions.

    Les discussions auxquelles je pense se rapportent à la manière la plus efficace et la plus rapide grâce à laquelle les peuples du monde peuvent obtenir un soulagement progressif du poids écrasant des armements, ce poids chaque jour, les rapproche de la berge du désastre économique. En même temps, le gouvernement des Etats-Unis serait disposé à prendre part à des discussions recherchant le moyen de créer des courants commerciaux internationaux, afin que chaque nation de la terre puisse acheter et vendre sur un pied d'égalité au marché international et qu'elle soit de même sûre d'obtenir les matières premières et les produits nécessaires à une vie économique pacifique.

    En même temps, les gouvernements, directement intéressés, autres que celui des Etats-Unis, pourraient entreprendre toutes les discussions politiques qu'ils considéreraient comme nécessaires ou désirables.

    Nous savons reconnaître les problèmes complexes qui concernent toute l'humanité, mais nous savons que leur étude et leur discussion doit se tenir dans une atmosphère de paix. Une telle atmosphère de paix ne peut exister si sur les négociations planent les ombres de la crainte de la force ou de la peur de la guerre.

    J'espère que vous ne vous méprendrez pas sur l'esprit de franchise dans lequel je vous envoie ce message. Les têtes des grands gouvernements, à cette heure, sont littéralement responsables du destin de l'humanité dans les années à venir. Ils ne peuvent rester sourds aux prières de leurs peuples, demandant protection contre le chaos prévisible de la guerre. L'histoire les tiendra pour responsables de la vie et du bonheur de tous, jusqu'au plus humble.

    J'espère que votre réponse permettra à l'humanité d'abandonner la crainte et de retrouver la sécurité pour de nombreuses années.


Franklin Delano Roosevelt

 

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