FRANKLIN DELANO ROOSEVELT
COMBATS POUR DEMAIN
Contre la tyrannie et les dictateurs
IL N'Y A PAS DE COMPROMIS AVEC LA BARBARIE. NOUS DEVONS ETRE LE GRAND ARSENAL DE LA DÉMOCRATIE
Le combat de la démocratie contre la conquête du monde est aidé considérablement et doit l'être encore davantage par le réarmement des Etats-Unis et l'envoi de chaque once, de chaque tonne de munitions et d'approvisionnements dont nous pouvons disposer pour secourir ceux qui sont sur le front. Il n'est pas plus contraire à la neutralité que nous agissions ainsi, qu'il ne l'est pour certains voisins de l'Allemagne de lui envoyer chaque jour de la semaine, de l'acier, du minerai, de l'huile et autres matières premières de guerre.
Nous préparons notre propre défense, de toute urgence, et dans son sens large, nous devons y inclure les besoins de guerre de la Grande-Bretagne et des autres nations libres qui luttent contre l'agression.
Ce n'est pas une question de sentiment, ou d'opinion personnelle discutable. C'est une question de tactique pratique et réaliste, basée sur l'avis d'experts militaires, qui sont bien au courant de la guerre actuelle. Ces experts de l'armée de terre et de la marine, comme les membres du Congrès et de l'Administration, n'ont qu'un seul but : la défense des États-Unis.
La nation fait un gros effort pour produire tout ce qui est nécessaire en cette alerte — et aussi vite que possible. Ce grand effort rend nécessaire de grands sacrifices.
Je ne voudrais demander à personne de défendre une démocratie, qui, à son tour, ne défendrait pas chacun de ses membres contre le besoin et les privations. Ce pays ne sera pas affaibli par la carence du gouvernement à son devoir de protection du bien-être économique du citoyen.
Si notre capacité de production dépend des machines, on ne doit jamais oublier que c'est l'habileté et la force des travailleurs qui font marcher ces machines.
Puisque le gouvernement est décidé à protéger les droits des travailleurs, le pays a le droit de s'attendre à ce que les hommes qui font marcher les machines s'occupent exclusivement des besoins urgents de la défense.
Le travailleur a la même dignité humaine et a droit à la même sécurité sociale que l'ingénieur, le directeur ou le propriétaire. Ce sont les travailleurs qui fournissent la main-d'oeuvre qui produit les destroyers, les avions et les chars.
Le pays compte sur nos arsenaux pour travailler sans l'interruption des grèves et des lock-outs. Il compte et veut que le patronat et les travailleurs s'entendent à l'amiable ou par les voies légales pour continuer à produire les approvisionnements qui sont si douloureusement nécessaires.
Dans le plan économique de notre grand programme de défense, nous faisons, comme vous le savez, tout pour maintenir la stabilité des prix et celle du coût de la vie.
Il y a neuf jours, j'ai annoncé la création d'une organisation plus efficace pour diriger notre effort gigantesque de production de munitions. L'affectation de grandes sommes d'argent et une direction bien coordonnée ne sont pas en elles-mêmes suffisantes. Les canons, les avions, les navires, et bien d'autres choses, doivent être construits dans les usines et les arsenaux de l'Amérique. Ils doivent être produits par les travailleurs, les directeurs et les ingénieurs, avec l'aide des machines qui • doivent, elles-mêmes, être construites par des centaines de milliers de travailleurs, partout dans le pays.
Pour cette grande oeuvre, il y a eu une coopération magnifique entre le Gouvernement, l'industrie et les travailleurs ; et j'en suis très reconnaissant.
Il a été fait appel au génie industriel américain, sans rival dans le monde pour la solution des problèmes de production ; il a mis ses ressources et ses talents en oeuvre. Des fabricants de montres, de machines agricoles, de linotypes, de caisses enregistreuses, d'automobiles, de machines à coudre, de tondeuses à gazon, de locomotives, font maintenant des fusées, des caisses à bombes, des pieds de lunettes télescopiques, des obus, des révolvers et des chars.
Mais notre effort présent est insuffisant. Nous avons besoin de plus de bateaux, de plus de canons, de plus d'avions, — de plus de tout. Cela ne sera possible que si nous écartons l'idée « des affaires comme d'habitude ». Cette tâche ne peut se faire, ajoutant aux productions actuellement existantes ce dont le pays a besoin pour sa défense.
Notre effort de défense ne doit pas être arrêté par ceux qui ont peur des conséquences futures d'un suréquipement. Les conséquences possibles de l'échec de notre effort de défense, seraient, dès maintenant, beaucoup plus à craindre.
A la fin des besoins actuels de notre défense, un remaniement habile des besoins de paix du pays réclamera toute la nouvelle capacité de production — sinon plus.
Il n'est pas de politique pessimiste pour l'avenir de l'Amérique qui puisse retarder l'expansion immédiate des industries essentielles à la défense. Nous en avons besoin.
Je veux qu'il soit évident nue le but du pays est de construire maintenant, avec toute la rapidité possible, toutes les machines, tous les arsenaux et toutes les usines dont nous ayons besoin pour créer notre matériel défensif. Nous avons les hommes, le savoir-faire, les ressources, et plus que tout, la volonté.
Si et là où la production de denrées de consommation ou de luxe dans certaines industries nécessitait l'usage de matières premières essentielles à notre but de défense, je sais que cette production s'arrêtera et qu'elle s'arrêtera bénévolement pour céder la place à notre objectif premier et nécessaire. •
Je fais appel aux propriétaires d'usines, aux directeurs, aux travailleurs, à nos propres fonctionnaires, pour qu'ils n'épargnent pas leurs efforts pour produire ces munitions rapidement et sans limites. En même temps que je fais cet appel, je vous donne la garantie de ce que, nous tous, qui sommes les officiels de votre Gouvernement, nous dévouerons également de tout notre coeur, à la grande tâche qui est devant nous.
Quand les avions, les navires, les canons, les obus, sortiront, alors votre Gouvernement pourra choisir, avec l'aide de ses experts défensifs, la meilleure manière de les utiliser pour la défense de cet hémisphère. La décision relative à la quantité à envoyer à l'étranger et à celle qui doit rester à la mère patrie doit être prise en considération de nos besoins militaires supérieurs.
Nous devons être le grand arsenal de la démocratie. Pour nous, ceci est une alerte aussi sérieuse que la guerre. Nous devons nous atteler à notre tâche avec la même résolution, la même conscience, le même esprit de patriotisme et de sacrifice que nous montrerions si nous étions en guerre.
Nous avons fournis aux Britanniques une grande aide matérielle, et nous lui en fournirons une bien plus grande à l'avenir.
Il n'y aura pas « d'étranglement » dans notre résolution d'aider la Grande-Bretagne. Ni dictateur, ni association de dictateurs n'affaibliront cette décision en agitant la menace des méthodes par lesquelles ils vont y parer.
Les Britanniques ont reçu une aide militaire de valeur inappréciable de la part de l'héroïque armée grecque, et des forces de tous les gouvernements en exil. Leur force augmente. C'est celle d'hommes et de femmes qui placent la liberté au-dessus de la vie.
Je crois que les puissances de l'Axe ne gagneront pas cette guerre. Je base cette opinion sur les meilleurs et les derniers renseignements. Il n'y
a pas d'excuse au défaitisme. Nous avons toutes les bonnes raisons d'espérer la défense de notre civilisation et la construction d'une civilisation meilleure dans l'avenir.
J'ai la conviction profonde que le peuple américain est maintenant décidé à faire un effort plus grand que jamais pour augmenter la production des moyens de défense et faire face à la menace à notre foi démocratique.
En tant que Président des Etats-Unis, je demande cet effort national. Je le demande au nom de ce pays que nous aimons et honorons et que nous avons la chance et la fierté de servir. Je le demande à notre peuple, avec la foi absolue que notre cause commune connaîtra un succès éclatant.