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1 novembre 2004 1 01 /11 /novembre /2004 10:58

  PRINCIPES DE LA SCIENCE SOCIALE
PAR M. H.-C. CAREY (De Philadelphie)

 

henry_charles_carey.jpg


TRADUITS EN FRANÇAIS PAR MM. SAINT-GERMAIN-LEDUC ET AUG. PLANCHE

  1861

 

 

 

 

CHAPITRE XIV :

CONTINUATION DU MÊME SUJET.

    

Notes de bas de page

 

1  M. Chapman donne des tableaux, d'où il résulte qu'en même temps que la réduction dans le prix de transport du coton, du lieu de production dans l'Inde, n'a été que de sept pence par livre, la réduction en Angleterre, a été de dix pence ; ce qui démontre que la rémunération afférente à la culture de la terre et au travail, en ce pays, a baissé considérablement, avec la substitution du trafic, au commerce qui existait antérieurement. (Du coton et du commerce de l'Inde, p. 77).

2  « Si nous passons des affaires intérieures aux relations internationales, nous cherchons vainement une nation vertueuse. Chaque société, à mesure qu'elle arrive, à son tour, au pouvoir, dédaigne toutes les lois de la justice, et ne se soumet qu'à la loi de la force qu'elle cherche à imposer partout. Aussi l'histoire du monde est-elle souillée de tous les crimes qui rendent l'homme odieux. » (WESTMINSTER REVIEW. Janvier 1851.)

3  « Plus un corps est imparfait, dit Goethe, plus les parties qui le composent ressemblent au tout. » Dans une société purement agricole, toutes les parties sont exactement semblables, et le tout n'est qu'une des parties amplifiée.

4  L'auteur des passages cités ci dessous, bien qu'il soit en dissidence considérable avec nous relativement à des questions très-importantes, s'est trouvé forcé, en observant certains faits qui se sont passés dans nos États du sud, d'adopter les idées que nous avons exprimées antérieurement :
    « Sous l'influence du système de libre-échange, un sol fertile, avec de bonnes routes et des rivières navigables comme moyens d'écoulement, devient le plus grand fléau dont un pays puisse être affligé. La richesse du sol invite à l'agriculture, les routes et les rivières servent à exporter les récoltes, pour les échanger contre les produits manufacturés de contrées plus pauvres, où se trouvent placés les centres du trafic, du capital et de l'industrie. Dans l'espace de quelques siècles, on d'un temps moins considérable, la consommation des récoltes au dehors appauvrit le pays qui les a produites. Dans le pays doté de ce sol fertile, il ne s'élève ni villes, ni manufactures, parce que le besoin n'en existe pas. On ne se livre pas à des occupations qui exigent de l'intelligence ou du talent ; la population est, nécessairement disséminée, ignorante et illettrée ; l'absentéisme règne généralement ; les riches quittent le pays pour leur plaisir et pour leur éducation ; les individus pauvres et entreprenants pour chercher du travail. Un ami intelligent me suggère l'idée, qu'abandonné à la nature, le mal se guérira de lui-même. Il se peut que cela soit, lorsque le pays est ruiné, si la population, comme celle de la Géorgie, est douée d'un caractère élevé et se livre à d'autres travaux que la simple agriculture, et répudie complètement les doctrines du libre-échange. L'objection de notre ami ne fait que prouver la vérité de notre théorie. Nous sommes bien certains que l'esprit de l'homme ne peut imaginer un moyen aussi efficace pour appauvrir un pays que de s'adonner exclusivement à l'agriculture. Les ravages de la guerre, de la peste et de la famine sont promptement effacés ; il faut des siècles pour refaire un sol épuisé. Plus on gagne rapidement de l'argent dans ce pays qui jouit de la liberté du trafic, plus tôt ce pays s'appauvrit ; car l'épuisement du sol est plus considérable ; et ceux qui font des récoltes abondantes en dépensent le produit au dehors ; ceux qui n'en font que de faibles le dépensent à l'intérieur. En l'absence de la liberté du trafic, ce pays si riche fabriquerait pour son propre usage, bâtirait des villes, construirait des écoles et des colléges, se livrerait à tous les travaux et pourvoirait à tous les besoins ordinaires de l'homme civilisé. C'est ainsi que l'argent gagné à l'intérieur serait aussi dépensé et placé à l'intérieur ; les récoltes seraient consommées dans le pays, et chaque ville et chaque village fourniraient l'engrais qui fertiliserait le sol environnant. Nous croyons que c'est une théorie communément admise que, sans cette consommation à l'intérieur, aucun sol ne peut rester riche d'une façon durable. Il naîtrait une population compacte, parce qu'elle serait nécessaire ; les riches n'auraient plus besoin de quitter le pays natal pour leur plaisir, ni les pauvres pour trouver du travail. » (FITZHUGH. Sociologie pour le Sud, pp. 14-16.)

5  « Je ne sais pas exactement ce qu'on entend par ces expressions : civiliser les peuples de l'Inde. Ils peuvent laisser quelque chose à désirer sous le rapport de la théorie et de la pratique d'un bon gouvernement ; mais si un bon système d'agriculture, si des manufactures sans rivales, si la capacité qui suffit à produire ce que le confort ou le luxe demande, si l'établissement d'écoles pour la lecture et l'écriture, si la pratique générale de la bienveillance et de l'hospitalité, et par dessus tout, si un respect, une délicatesse scrupuleuse envers le sexe féminin, forment les traits caractéristiques d'un peuple civilisé, alors les Hindous ne sont pas inférieurs en civilisation aux populations européennes. » (Sir THOMAS MUNRO.)

6  « Sur dix-neuf années de la présente charte, quinze se sont passées en guerre.» (London, Daily-News.)

7  Où aboutissent les guerres dans l'Inde, p. 56.

8  « Le trafic ne peut d'une façon absolue s'entretenir et se développer, sans être précédé et protégé par d'autres influences qui lui frayent la route. Si nous n'avions été aveuglés par certains dogmes économiques, nous aurions appris cette vérité dans d'autres parties du globe… ; Nous avons pris ces exemples au hasard ; nous pourrions en grossir la liste ; mais nous en avons déjà en assez grand nombre pour prouver que l'épée peut tracer la route au commerce, que la diplomatie peut accomplir des alliances et ouvrir des territoires, et qu'une influence personnelle, telle que l'influence d'un Ashburton ou d'un Dunham, peut entraîner des classes considérables, ou de vastes continents dans la ligue commerciale du libre trafic. On se vantait, il n'y a pas longtemps, que le trafic pouvait agir par lui-même ; qu'il pouvait creuser ses tunnels, acheter les moyens de se protéger lui-même et s'ouvrir des territoires ; mais ici nous trouvons que le commerce compte sur l'oeuvre de l'épée et sur les négociations de la diplomatie. » (Le Spectateur, 4 septembre 1854.)
    Tous les journaux anglais récents contiennent des aperçus semblables à ceux-ci ; tous trouvent une compensation, à la perte énorme d'hommes et d'argent qui a eu lieu en Crimée, dans l'accroissement probable du trafic futur.

9  Voy. plus haut, chap. XIII p, 394-396.


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  PRINCIPES DE LA SCIENCE SOCIALE
PAR M. H.-C. CAREY (De Philadelphie)

 

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TRADUITS EN FRANÇAIS PAR MM. SAINT-GERMAIN-LEDUC ET AUG. PLANCHE

  1861

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE XV :

DES CHANGEMENTS MÉCANIQUES ET CHIMIQUES DANS LES FORMES DE LA MATIÈRE.

 

    § 1. — Pour opérer les changements dans les formes de la matière, il est nécessaire d'en connaître les propriétés. L'oeuvre de transformation est plus concrète et plus spéciale que celle du transport, et conséquemment, plus tardive dans son développement. Elle tend à augmenter l'utilité de la matière, et à diminuer la valeur des denrées nécessaires aux besoins de l'homme.


    Pour transporter les pièces de bois au moyen desquelles notre colon pût, de quelque façon, s'abriter contre le vent et la pluie, il ne fallait qu'appliquer la force brutale ; mais, avant qu'il pût réussir à transformer en arc l'une d'entre elles, il fallait qu'il se familiarisât avec les propriétés de la matière, connues sous le nom d'élasticité et de ténacité.  Pour effectuer les changements de forme, il était donc nécessaire de connaître les qualités des choses à transformer, tandis que pour effectuer les changements de lieu, le colon n'avait besoin de connaître que leur quantité, leur grandeur ou leur poids ; et, comme conséquence nécessaire, il s'en suivit que l'oeuvre de transformation, plus concrète et plus spéciale, ne vint, dans l'ordre de développement, qu'après l'oeuvre plus abstraite du transport.

    La terre nous fournit peu de choses sous la forme précise qu'elles doivent avoir pour servir aux besoins de l'homme.  Il peut manger des pommes, des oranges, des dattes ou des figues, telles qu'elles ont été cueillies sur l'arbre ; mais la pomme de terre a besoin d'être cuite, les grains de blé d'être écrasés, la farine d'être mise au four avant de pouvoir servir à sa nourriture.  Il peut envelopper ses épaules d'une peau de bête ; mais avant de pouvoir convertir la laine en un vêtement susceptible de le garantir du froid de l'hiver, il doit se familiariser avec les propriétés distinctives de la laine.  Le feuillage peut, en certains moments, le protéger contre l'ardeur du soleil ; mais pour obtenir un abri convenable contre la température, il faut qu'il apprenne à abattre un arbre et à le convertir en poutres ou en planches.  L'accomplissement de ces actes exige la science ; à chaque pas qu'il fait dans l'acquisition de celle-ci, il obtient un empire plus étendu sur les forces naturelles destinées à son usage ; en même temps qu'à chaque pas se développe, de plus en plus, l'utilité du blé, de la laine et du bois de construction, avec une diminution constante dans la valeur des subsistances, des vêtements, de l'abri dont il a besoin, et un accroissement de richesse également constant.

    De toutes les magnifiques et merveilleuses mesures de prévoyance de la nature, il n'en est probablement pas de plus belle que celle qu'on peut observer ici.  La nécessité de changer la forme des produits végétaux et animaux, avant qu'ils puissent être appropriés à la consommation de l'homme, constitue un obstacle qu'il faut surmonter ; obstacle qui n'existe pas pour les oiseaux, pour les quadrupèdes, ou les poissons, auxquels la nourriture est fournie sous la forme qui leur est précisément nécessaire.  Il en est de même du vêtement que la nature fournit, aussi, complètement aux autres animaux ; tandis que l'homme est obligé de changer la forme du lin, de la soie et de la laine, avant qu'ils puissent servir à ses besoins ; et c'est ici que nous trouvons le puissant aiguillon pour l'activité de l'intelligence, qui conduit au développement de l'individualité et rend l'homme propre à l'association avec ses semblables.  Si la nourriture et le vêtement lui eussent été fournis libéralement, et sous la forme nécessaire, ses facultés seraient restées, partout, aussi complètement inertes et inutiles que le sont aujourd'hui celles des peuples habitant les régions tropicales, parmi lesquels des familles entières pourvoient à la première avec l'arbre seul qui porte le fruit à pain, tandis que le second est remplacé par le soleil d'un été perpétuel.  La nature fournissant à ces besoins spontanément, il n'existe que peu de motifs pour exercer les facultés par lesquelles l'homme se distingue de la brute, facultés qui, en conséquence, demeurent sans extension ; et, comme résultat nécessaire, la faculté et l'habitude d'association se trouvent ici le moins développées.  L'homme a été placé ici-bas pour conquérir l'empire de la nature, et, dans ce but, il a été doté de facultés susceptibles d'être mises en jeu, mais qui ont besoin d'être provoquées à l'activité par la nécessité de triompher des forces qui l'environnent, forces dont la puissance de résistance est toujours en raison directe du secours qu'elles peuvent lui prêter, pour l'aider à accomplir de nouveaux efforts, partout où elles ont été complètement soumises à sa domination.  Les sols fertiles de la terre peuvent récompenser largement ses travaux ; mais comme ils sont funestes à la vie et à la santé, il n'ose tenter de les occuper.  D'où il arrive, conséquemment, qu'on le voit commencer ses travaux dans les lieux où le sol est le plus ingrat, et que, de très-bonne heure, il s'associe à ses voisins pour acquérir une nouvelle puissance ; comme dans l'Attique couverte de rochers, dans la Norwége et l'Irlande, presque entièrement emprisonnées dans les glaces, sur les plateaux élevés de la Bohème, dans la Savoie montagneuse, et sur le sol granitique de la Nouvelle-Angleterre : dans tous ces pays, nous constatons que l'habitude de l'association a existé à un degré inconnu partout ailleurs.

 

 

 

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  1861

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE XV :

DES CHANGEMENTS MÉCANIQUES ET CHIMIQUES DANS LES FORMES DE LA MATIÈRE.

 

    § 2. — Instruments indispensables pour obtenir le pouvoir de disposer des services que rendent les forces naturelles. Ce pouvoir constitue la richesse. Les premiers pas faits dans cette voie sont les plus difficiles et les moins productifs.


    Cependant, avant que Robinson pût fabriquer un arc, il eut besoin de posséder une espèce quelconque d'instrument tranchant ; et cet instrument, il l'obtint, nous le savons, sous la forme d'un morceau de silex on d'une autre pierre dure, dont il avait aiguisé le bord au moyen du frottement.  De quelque côté que nous portions nos regards, même parmi les peuplades les plus sauvages, nous les voyons obtenir l'empire sur certaines forces naturelles, et cela grâce à des instruments dont la fabrication exige une certaine connaissance des propriétés de la matière.  Avec la science vient la puissance, et avec l'augmentation du pouvoir exercé sur la nature, on obtient une quantité constamment croissante de subsistances et de vêtements, en retour d'efforts musculaires constamment moins considérables.

    C'est là comme partout que le premier pas, en même temps qu'il est le plus difficile à faire, donne la rémunération la plus faible. Faisant d'abord usage d'une coquille, l'homme arrive ensuite à se servir d'un caillou ; de là il passe successivement au couteau de cuivre, de bronze, de fer et d'acier ; et, enfin, à la scie à mouvement circulaire, acquérant, à chaque pas, le pouvoir d'en faire un nouveau et plus important.  Le fuseau et le métier, au moment où ils parurent ont dû être des inventions très-étonnantes ; et à tel point qu'elles ont suffi au monde pendant plusieurs siècles.  Plus tard vint le métier à filer, et aujourd'hui la force de la vapeur a été substituée à celle de la main de l'homme, avec un accroissement immense de produit.  Et cependant ce n'a été là que le premier pas fait dans cette voie ; depuis cette époque, on a pu, à l'aide de la vapeur, non-seulement tisser la toile, mais la revêtir des couleurs et des dessins les plus variés. D'année en année, nous assistons à de nouveaux perfectionnements dont chacun, quel qu'il soit, dépasse en importance ceux dont nous sommes redevables aux dix siècles qui précèdent le commencement du XVIIIe. La quantité de toile qui est, aujourd'hui, le fruit du travail d'une demi-douzaine de femmes, est plus considérable que celle qu'on eût pu obtenir, il y a un siècle, du travail de cent individus.  Il y a cinquante ans, chaque morceau de fer en barres exigeait, pour sa production, l'intervention constante de la force d'individus travaillant les bras armés de marteaux, et obligés à chaque coup de soulever l'instrument, ce qui entraînait une énorme perte de puissance.  Arrivé à savoir que le fer pouvait se laminer, et à l'aide de la vapeur, l'homme acquit la faculté de disposer d'une grande force naturelle, avec le secours de laquelle ses travaux devinrent moins continus et plus efficaces, en même temps que devinrent moins considérables les demandes faites à ses propres forces. Le fer étant plus facile à se procurer, rendit plus facile l'acquisition de nouvelles quantité de houille et de minerai ferrugineux ; et ceux-ci, à leur tour, rendirent le même service, en fournissant des moyens mécaniques de tout genre, depuis le petit instrument qui sert à fabriquer des épingles et des aiguilles, jusqu'à la puissante machine à vapeur qui draine la mine, ou sert de moteur au moulin.

    Le pouvoir de diriger les forces de la nature constitue la richesse.  Plus la richesse est considérable, plus est faible la proportion des travaux de l'homme, nécessaire pour effectuer les changements chimiques ou mécaniques dans les formes de la matière, et plus est considérable la proportion de ces mêmes travaux que l'on peut consacrer à l'accomplissement des changements vitaux, à l'aide desquels on obtient une quantité plus considérable des choses à transformer.  Le moulin, grâce auquel l'eau, le vent ou la vapeur peuvent désormais accomplir le travail qu'exécutaient les bras autrefois — en convertissant le blé en farine, — a diminué la somme d'efforts humains, nécessaire pour effectuer des changements dans la forme des subsistances, et augmenter considérablement la somme d'efforts à consacrer à cette oeuvre : accroître la quantité de blé à moudre.  De même aussi le métier à filer et le métier à tisser, en diminuant le travail nécessaire pour opérer des changements dans la forme sous laquelle se présente la laine, ont laissé disponible une somme considérable de travail que l'on a pu consacrer à augmenter la quantité de laine.  C'est ainsi, également, que les choses doivent se passer, dans tous les cas où la puissance de la nature vient en aide au travail accompli par l'homme dans le but de convertir les produits que nous donne la terre, notre mère si féconde ; la proportion du travail de celui-ci qui peut être consacrée à augmenter la quantité des matières premières, tendant à s'accroître constamment avec chacun de ces surcroîts de puissance.

    Plus est faible la quantité de travail nécessaire pour l'oeuvre de transformation, plus est considérable celle qui peut être employée à préparer l'immense machine à laquelle nous devons à la fois les subsistances et la laine, et plus doit augmenter la facilité de soumettre à la culture des sols plus fertiles ; en se procurant ainsi de plus grandes quantités des subsistances nécessaires pour rendre les hommes capables de vivre entre eux dans des rapports étroits, en même temps qu'ils associent leurs efforts pour obtenir de nouveaux triomphes.  Plus ils s'associent, plus est rapide le développement de l'individualité, et plus augmente le pouvoir d'accomplir des progrès ultérieurs.

 

 

 

 


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  1861

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE XV :

DES CHANGEMENTS MÉCANIQUES ET CHIMIQUES DANS LES FORMES DE LA MATIÈRE.

 

    § 3. — La transformation diminue le travail exigé pour le transport, en même temps qu'elle augmente celui que l’on peut consacrer à la production. Changement qui en résulte dans les proportions des diverses classes entre lesquelles se partage la société.


    La facilité de transformation augmentant avec le développement de la puissance d'association, chaque degré de progrès de la société est suivi d'un accroissement de facilité pour l'entretien du commerce.  La laine et le blé se convertissent en drap ; et le minerai de fer, la houille, le drap et le blé reparaissent sous la forme de barres de fer, qui, à leur tour, se combinent avec une plus grande quantité de subsistances, pour reparaître sous la forme d'instruments tranchants ; et c'est ainsi que les produits de la terre se condensent dans leur forme, en même temps qu'il y a diminution constante dans la quantité de travail nécessaire pour effectuer les changements de lieu de la matière ; et nous avons alors un nouvel accroissement, dans la proportion de travail que la société peut consacrer à l'augmentation de la somme de denrées nécessaires pour l'entretien et le bien-être de l'homme.  On estime que les machines à vapeur mises en oeuvre aujourd'hui en Angleterre peuvent faire le travail de 600 millions d'individus ; et comme ces machines sont employées principalement à condenser sous la forme de drap le blé et la laine, le blé, la houille et le minerai sous la forme de fer, et le fer sous la forme de machines, l'effet produit par les machines à vapeur peut se constater, dans la possibilité constamment croissante de consacrer à la fois son temps et son intelligence au développement de la puissance de cette immense machine à laquelle nous devons les aliments, la laine, la houille et le minerai.

    On a établi que le nombre des machines à raboter des États-Unis, mues par la vapeur, ne s'élevait pas à moins de 30 000, dont chacune fait le travail de soixante ouvriers ; soit, dans l'ensemble, le travail de 1 800 000 individus.  Il y a là une grande économie d'efforts humains ; mais il faut y ajouter encore l'économie de travail résultant du transport de produits achevés ; comparé avec celui de produits non achevés ; ces deux effets combinés laissent disponible une somme immense d'efforts physiques et intellectuels, que l'on peut appliquer à augmenter la quantité de bois de charpente à scier ou à raboter, de houille et de minerai à convertir en fer, ou de blé à moudre.  Chacune de ces opérations tend au développement de la puissance productive de la terre, et à son appropriation plus complète aux besoins de l'homme.

 

 

 

 

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CHAPITRE XV :

DES CHANGEMENTS MÉCANIQUES ET CHIMIQUES DANS LES FORMES DE LA MATIÈRE.

 

    § 4. — Économie des efforts de l'activité humaine résultant d'une plus grande facilité de transformation.


    A chaque progrès vers une plus grande facilité dans l'oeuvre de transformation accomplie presque sans déplacement, on assiste à un merveilleux accroissement dans l'économie d'efforts humains résultant d'une plus grande économie des dons de la nature.  Le pauvre sauvage de l'ouest passe des nuits et des jours à errer dans les prairies en quête de sa subsistance, et il est cependant obligé de perdre la plus grande partie des produits de sa chasse ; eu même temps que le colon des premiers jours détruit l'arbre, et en vend les cendres à des individus venus de points éloignés, qui les achètent volontiers, en y ajoutant tous les frais énormes de transport qui augmentent leur prix primitif.  A mesure que la richesse et la population augmentent, la tige de l'arbre devient susceptible de fournir des planches pour la construction des maisons et des moulins ; l'écorce sert à approprier les peaux qui seront converties en chaussures, et les branches fourniront les chevilles qui servent à leur confection.  Les chiffons d'un établissement pauvre et isolé se perdent ; mais, à mesure que la population augmente, les moulins apparaissent, et ces mêmes chiffons se transforment en papier.  Le petit fourneau solitaire de l'ouest perd la moitié de la puissance motrice que fournit son combustible ; mais la chaleur du vaste fourneau de l'est est appliquée au mouvement d'une machine et son gaz employé à chauffer l'air.  Entre les mains du chimiste, l'argile devient de l'alumine et promet de remplacer parfaitement et à bon marché l'argent métallique.  « Les clous tombés dans les rues pendant le trafic de la journée, reparaissent, dit un auteur moderne, sous la forme d'épées et de fusils.  Les rognures du chaudronnier ambulant, dit-il encore, se mêlent à celles des sabots des chevaux qui viennent de l'atelier du forgeron, ou avec les vêtements de laine des plus pauvres habitants d'une île soeur, sont mis au rebut, et, bientôt après, reparaissent sous la forme de matières tinctoriales de la couleur la plus éclatante, et servent à rehausser la toilette des dames de la cour.  Le principal élément de l'encre, avec laquelle nous écrivons, a peut-être fait partie du cerceau qui entourait un vieux baril à bière.  Les os des animaux morts servent de principaux matériaux pour les allumettes chimiques.  La lie du vin que rejette avec soin le buveur de Porto, lorsqu'il décante sa boisson favorite, est absorbée par lui sous la forme de poudre de Seidlitz, pour réparer les suites de son orgie.  Les restes de repas abandonnés dans les rues et le lavage du gaz de houille, reparaissent, soigneusement conservés, dans le flacon à odeur de nos dames, où doivent aromatiser le blanc-manger qu'elles serviront à leurs amis.  »

    La livre de lin, après avoir passé entre les mains du fabricant de dentelles, s'échange pour plus que son poids en or.  En Silésie, les feuilles du sapin et du pin sont transformées en couvertures, Les morceaux de cuir sont transformés en colle forte, et les cheveux coupés sur la tête humaine s'échangent contre des gants et des rubans ; et c'est ainsi que les hommes deviennent, de plus en plus, capables de s'associer et de combiner leurs efforts : chaque parcelle de la matière est utilisée, en même temps qu'il y a diminution dans la valeur des denrées nécessaires pour les besoins de l'homme, et accroissement constant dans la valeur personnelle de celui-ci.

 

 

 


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CHAPITRE XV :

DES CHANGEMENTS MÉCANIQUES ET CHIMIQUES DANS LES FORMES DE LA MATIÈRE.

 

    § 5. — Déperdition de travail, lorsque le lieu de transformation est éloigné du lieu de production. La tendance au développement des trésors de la terre est en raison directe de la proximité du consommateur, par rapport au producteur.


    Bien différente est la marche des choses, dans les pays où la population disséminée est forcée d'accomplir son labeur en pure perte sur les sols les plus ingrats.  Dans la Caroline, où quelques individus cultivent encore une terre dont une acre ne donne qu'un boisseau de blé, on détruit souvent des forêts entières de pins, en vue d'obtenir quelques quantités de térébenthine ; et, conséquemment, la térébenthine de rebut est elle-même perdue, à raison de son éloignement d'un lieu quelconque, où l'on pourrait modifier sa forme, de façon à l'approprier aux besoins de l'homme (1).  Les tiges du cotonnier, susceptibles de produire un lin d'une grande force de résistance, et offrant de belles fibres, sont brûlées sur le terrain même de la plantation, à raison de l'absence de ce pouvoir résultant de l'association, à l'aide duquel on pourrait les utiliser pour les besoins de l'homme.  Les graines du même arbuste, qui peuvent donner de l'huile, sont perdues également (2).  A l'intérieur et au dehors les manufacturiers n'ont qu'une quantité excessivement faible de plantes fibreuses.  « Et cependant, dit M.  Ewbank (3), elles abondent partout parmi les roseaux, les joncs et les gazons grossiers, et dans les feuilles de plusieurs arbrisseaux et arbres très-communs.  Le bananier et ses analogues donneraient, dit-il, outre le fruit, de neuf à douze mille livres par acre de substance fibreuse de tous les degrés de finesse, depuis celle de la corde jusqu'à celle de la mousseline.  D'innombrables millions de tonnes de cette substance, et d'autres semblables, poussent spontanément chaque année et s'engloutissent dans la terre, dédaignés par l'homme, en même temps que d'autres millions innombrables de tonnes de bois de teinture les plus précieux croissent dans le voisinage de ces substances, attendant la venue de l'homme pour lui offrir leurs services.  »

    Chacun des articles que nous citons ici, partout où il se trouve, est aussi susceptible d'être utile à l'homme qu'il le serait dans le voisinage de Paris et de Londres ; mais son utilité est latente, et ne peut être développée qu'au moyen de l'association et du concert des efforts actifs entre les individus.  Isolé, l'homme se trouve incapable de faire le premier pas, le plus difficile de tous, celui qui sert de prélude à des pas nouveaux et plus importants qui le suivraient infailliblement.  C'est la population qui fait surgir les subsistances des sols fertiles de la terre, et communique l'utilité à toute la matière dont elle se compose, en même temps qu'elle produit une diminution constante dans la valeur de toutes les denrées nécessaires pour les besoins de l'homme, et un accroissement constant dans la valeur de celui-ci.  La dépopulation, au contraire, — en forçant d'avoir recours aux sols plus ingrats, — dépouille de son utilité la matière qui entoure l'homme de toute part, en même temps qu'elle produit une diminution constante dans la valeur qui lui est propre, et dans son pouvoir de se procurer des aliments, des vêtements, ou autres choses nécessaires à la vie.

    Il en est de même à l'égard de l'intelligence.  L'accroissement de population, mettant en activité toutes les diverses facultés de l'homme, chaque individu trouve la place qui lui convient véritablement, en même temps qu'il y a accroissement constant du commerce.  La dépopulation, au contraire, forçant tous les individus à rétrograder pour chercher leurs moyens de subsistance, substitue à l'intelligence la simple force brutale, et amène constamment la diminution du commerce.  Pour que le commerce existe, il faut qu'il y ait différence de travaux, et plus cette différence est considérable, plus la circulation doit être rapide, et plus le commerce doit être développé.

    Le poids d'une société quelconque tend à un accroissement rapide, toute augmentation dans sa population étant suivie d'une augmentation correspondante dans le développement des facultés latentes des individus dont elle se compose.  Le mouvement d'une société tend pareillement à s'accroître dans une proportion constamment plus rapide, tout accroissement d'individualité étant suivi d'un accroissement correspondant dans la puissance d'association et dans la continuité d'action.  La quantité de mouvement étant la vitesse multipliée par le poids, et ces deux derniers tendant à une accélération constante dans le degré d'accroissement, nous pouvons, dès lors, comprendre sans peine pourquoi il arrive que la force déployée par une société tend à se développer à un degré d'autant plus rapide, qu'il se révèle par son accroissement de population.  Si nous supposons le nombre dix comme poids actuel, et le même nombre comme vitesse, la quantité de mouvement serait cent.  En doublant les chiffres dans une période de vingt-cinq ans, et laissant la faculté intellectuelle se développer dans le même rapport, le poids, à la fin de cette période, serait quadruplé ; et, en faisant la part d'une facilité plus grande d'association, résultant de l'accroissement de population et d'une économie correspondante du travail et des produits de la terre, nous obtenons la même quantité comme représentant la vitesse ; et les deux, multipliés l'un par l'autre, donnent alors seize cents, au lieu de deux cents qu'on obtiendrait, si le pouvoir productif de l'individu ne subissait aucun changement.

    La tendance à développer les ressources que la terre nous offre, ainsi que la puissance de l'homme, étant en raison directe du mouvement de la société, est toujours accompagnée de cet accroissement d'attraction locale qui produit l'amour du pays ; il suit de là, nécessairement, qu'une société doit croître en individualité et en force, en même temps qu'il y a développement du pouvoir et du désir de s'associer, parmi les individus dont elle se compose.

 

 

 

 

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1 novembre 2004 1 01 /11 /novembre /2004 10:58

  PRINCIPES DE LA SCIENCE SOCIALE
PAR M. H.-C. CAREY (De Philadelphie)

 

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TRADUITS EN FRANÇAIS PAR MM. SAINT-GERMAIN-LEDUC ET AUG. PLANCHE

  1861

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE XV :

DES CHANGEMENTS MÉCANIQUES ET CHIMIQUES DANS LES FORMES DE LA MATIÈRE.

 

    § 6. — Le mouvement sociétaire tend à s'accroître dans une proportion géométrique, lorsqu'on lui permet d'accomplir des progrès sans subir aucune perturbation. Il est souvent arrêté. Causes de perturbation. Efforts pour obtenir le monopole de l'empire sur les forces naturelles, nécessaires dans l'oeuvre de transformation.


    Le mouvement de la société et la puissance de l'homme tendent à s'accroître dans une proportion géométrique, toutes les fois qu'on laisse celui-ci marcher progressivement, et sans être contrarié dans sa marche, vers l'établissement de son empire sur la nature, qui doit s'acquérir au moyen de l'association avec ses semblables.  De quelque côté que nous jetions nos regards, nous voyons que son progrès dans cette voie a été, à certaines époques, entravé, et souvent arrêté tout à fait ; en même temps qu'à d'autres époques, l'homme a rétrogradé au point d'avoir été contraint d'abandonner les sols les plus fertiles, après avoir fait une dépense considérable de force physique et intellectuelle, nécessaire pour les dompter ; ainsi qu'autrefois, dans cette partie de l'Asie qui nous avoisine, en Égypte, en Grèce et en ltalie, et, de nos jours, en Irlande, à la Jamaïque, dans la Virginie et la Caroline, il s'en rencontre des exemples, dont nous pouvons maintenant rechercher les causes.

    L'histoire du monde, à toutes ses pages, nous présente l'homme fort foulant aux pieds le faible, et ce dernier s'efforçant, au moyen de l'association avec ses semblables, de mettre des bornes à la puissance de ceux qui l'oppriment.  Le premier, ainsi que nous le voyons, s'est partout approprié de vastes portions de terre, forçant le second de les cultiver à son profit, et exigeant que celui-ci employât non-seulement sa terre, mais encore ses moulins et ses machines de toute espèce, toutes les fois qu'il voulait faire subir à la matière des changements de lieu ou de forme.

    A certaines époques, le premier a composé avec ceux qui lui payaient l'impôt, moyennant certaines portions du produit de la terre, prélevant parfois les trois quarts, les deux tiers ou la moitié ; mais alors même il a généralement exigé que, lorsqu'ils auraient besoin de convertir leur blé en farine, ils lui fournissent une redevance en échange de ce privilége ; qu'une autre taxe lui fût allouée lorsqu'ils voudraient convertir la farine en pain, et une autre encore lorsqu'ils voudraient échanger avec leurs voisins, leur pain ou leur blé contre d'autres denrées nécessaires à leur usage.  S'ils voulaient transformer leur laine en drap, ils étaient obligés d'acheter ce privilége sous la forme d'excise, ou d'autres droits.  Si la population de la ville et de la campagne cherchait à entretenir le commerce, elle devait payer la permission de le faire sous la forme de droits d'octroi, comme en France ; ou, si, comme en Espagne, elle voulait accomplir un échange quelconque, ceux qui percevaient les droits du gouvernement, réclamaient un dixième sur toute transmission de propriété, sous le nom d'alcavala.  Le droit de travailler était considéré comme un privilége dont l'exercice exigeait une patente qui devait s'acheter à un prix onéreux.  Sous toutes les formes, le petit nombre d'individus qui étaient forts et pouvaient vivre en vertu de l'exercice de leur puissance d'appropriation, a cherché à empêcher le grand nombre, qui, pris individuellement, était faible, d'associer ses efforts à d'autres conditions que celles qu'ils dictaient eux-mêmes.  L'esclavage a existé sous des formes variées, plus ou moins oppressives, à diverses époques ; mais, en toute circonstance, il est résulté des efforts de ceux qui étaient vigoureux de corps et d'esprit, pour dépouiller ceux qui étaient faibles du pouvoir de décider au profit de qui ils travailleraient, ou quelle serait leur rémunération, et d'empêcher ainsi le développement du commerce.

    A mesure que la population a augmenté, les hommes sont devenus de plus en plus capables de s'associer, pour acquérir l'empire sur leurs propres actions et sur les forces naturelles qui pouvaient si efficacement aider leurs efforts ; élevant des villes, c'est-à-dire des centres locaux où l'artisan et le commerçant pouvaient s'associer pour leur défense personnelle.  Plus il leur fut permis de s'associer, plus l'individualité se développa ; et c'est aussi pourquoi nous voyons que la liberté s'est développée si rapidement dans les bourgs et dans les villes de la Grèce et de l'Italie, dans celles de France et d'Allemagne, dans les Pays-Bas et en Angleterre.

    La puissance est ainsi résultée de l'association et de la combinaison des efforts ; mais trop souvent, en général, l'acquisition de cette puissance a été accompagnée du désir égoïste d'assurer aux individus associés les monopoles de son exercice, pour les en faire jouir aux dépens de leurs semblables.  Les Phéniciens gardaient soigneusement le secret de leurs teintures ; et les Vénitiens étaient si jaloux de leurs secrets, qu'ils réduisaient leurs artisans à une condition voisine de l'esclavage, en leur interdisant l'émigration.  Les Flamands, à leur tour, ayant réussi à établir parmi eux la diversité des travaux nécessaires au développement de la force intellectuelle, à l'économie du labeur humain et à l'utilisation des produits de la terre, exercèrent, pendant une longue période de temps, la puissance d'association à un degré alors unique dans une partie quelconque du nord ou du centre de l'Europe.  L'esprit de monopole apparut cependant, même dans les Flandres, amenant avec lui des règlements qui tendaient à concéder au trafiquant des avantages, d'une part sur l'ouvrier, et de l'autre sur le producteur de matières premières ; et donnant lieu ainsi à l'émigration du premier et à une guerre de tarifs de la part du second ; et en temps et lieu, la puissance flamande suivit dans sa marche celle de Carthage et de Tyr.  Les Hollandais, profitant des embarras des Flamands, leurs rivaux, devinrent les manufacturiers les plus considérables de l'Europe.  Mais eux aussi, à leur tour, en même temps qu'ils agrandissaient leur domination dans toutes les directions, concédèrent aux diverses corporations des autorisations de monopole, ayant pour but d'empêcher toute relation commerciale entre les régions importantes du globe, excepté par l'intermédiaire de leurs navires, de leurs ports, de leurs marins et de leurs négociants.  La nature vexatoire d'un pareil système força la France et l'Angleterre à prendre des mesures de résistance qui se firent jour dans l'acte de navigation de Cromwell, dans le droit de tonnage et le tarif promulgués par Colbert.  A partir de cette époque, la puissance de la Hollande commença à s'éclipser, ainsi qu'avait déjà fait celle de Venise et de Gènes.  Dans toutes ces circonstances, l'objet qu'on s'était proposé avait été d'empêcher la circulation au dehors, dans le but de produire une augmentation de mouvement à l'intérieur et de protéger la centralisation, en forçant le commerce d'acquitter des taxes extraordinaires sous la forme de transport, au bénéfice de ceux qui le taxaient ; et dans toutes ces circonstances, les résultats, ainsi que nous le voyons, se trouvèrent être les mêmes, — l'affaiblissement et la décadence, — lors même qu'ils n'aboutirent pas à la ruine absolue.

 

 

 

 

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PAR M. H.-C. CAREY (De Philadelphie)

 

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TRADUITS EN FRANÇAIS PAR MM. SAINT-GERMAIN-LEDUC ET AUG. PLANCHE

  1861

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE XV :

DES CHANGEMENTS MÉCANIQUES ET CHIMIQUES DANS LES FORMES DE LA MATIÈRE.

 

    § 7. — L'égoïsme, au sein des sociétés, de même que parmi les individus, se perd lui-même, généralement. Il vaudrait mieux pour l'homme que les forces naturelles n'existassent pas, plutôt que de voir leurs services monopolisés.


    Parmi les individus, l'égoïsme en général se perd lui-même ; il en est de même à l'égard des nations.  Toutes les sociétés que nous avons citées plus haut cherchaient à acquérir la force et la puissance, non pas en commun avec d'autres, — non pas en faisant avec d'autres un commerce basé sur l'extension du commerce parmi elles-mêmes, — mais en continuant le trafic pour les autres sociétés, dans le but de s'enrichir elles-mêmes aux dépens de celles-ci.  Les droits naturels de toutes étaient égaux ; et si ce principe eût été pleinement reconnu, toutes auraient pu devenir riches, fortes et libres ensemble ; mais, de la façon dont les choses se comportaient, chacune d'elles appauvrit d'abord ses voisines plus faibles et se trouva, à son tour, appauvrie par les mesures mêmes auxquelles elle avait eu recours pour accroître sa richesse et sa puissance.  La parfaite harmonie de tous les intérêts réels et l'avantage d'une parfaite moralité internationale sont des leçons que nous enseigne chaque page de l'histoire ; et cependant, après tant de siècles d'expérience, les premières nations du monde agissent, même aujourd'hui, comme si la route de la prospérité pour elles-mêmes ne devait s'ouvrir que par l'adoption de mesures tendant au détriment de toutes les nations qui les entourent.

    Pour que le pouvoir de diriger les forces de la nature soit profitable à l'espèce humaine, il est indispensable que les connaissances à l'aide desquelles il est acquis soient répandues largement.  Donnez à un membre seul d'une société le secret de la poudre à canon, et permettez-lui de le monopoliser, et il asservira ses voisins.  Avec le temps, ces derniers acquerront peut-être la science nécessaire pour faire la poudre ; mais ce résultat, ils l'obtiendront, si jamais ils y parviennent, malgré toute la résistance que pourra leur opposer le monopoleur, déjà devenu assez puissant pour être à même d'empêcher l'association parmi les malheureux individus qui dépendent de lui.  Il en est de même à l'égard des nations.  Restreignez à une seule la faculté de disposer de la vapeur, ou le pouvoir de convertir la laine en drap, la houille et le minerai en fer, ou le blé en farine et cette nation exercera assurément un empire tyrannique sur l'univers, au détriment de toutes, jusqu'à elle-même inclusivement.  La centralisation , quelque part que vous la rencontriez, tend à amener à sa suite la pauvreté, l'esclavage et la mort ; et il en est si complètement ainsi, relativement aux connaissances scientifiques, qu'il vaudrait mieux que la vapeur n'existât pas, plutôt que de voir la faculté de disposer d'une telle force restreinte à une seule société de notre globe.  Pendant quelque temps, cette société pourrait s'enrichir ; mais, avec l'esclavage, là comme partout, le dommage causé à l'esclave retomberait sur le maître.  Épuisant toutes les sociétés qui l'environnent, elle ne tarderait pas elle-même à voir naître la maladie de « l'excès de population, » tendant à produire, à l'intérieur, le même asservissement qu'elle avait produit au dehors.

    Le trafic avait élevé parmi les Flamands l'édifice de fortunes considérables, dont la possession ne fit qu'exciter leur convoitise pour en acquérir de nouvelles, en même temps qu'il augmentait leur pouvoir de diriger les mouvements des autres nations, pour arriver à l'accomplissement de leurs desseins égoïstes.  Dans ce but, ils cherchèrent à créer un monopole à l'intérieur et au dehors ; mais le résultat fut bien différent de ce qu'ils avaient espéré ; leurs mesures provoquèrent la résistance au dedans et au dehors.  Les ouvriers émigrant en Angleterre trouvèrent, dans Édouard III, un monarque comprenant parfaitement les avantages qui pouvaient résulter de ce fait, de mettre à même le fermier et l'artisan de se rapprocher l'un de l'autre ; et ils trouvèrent aussi, en lui, un monarque capable de leur accorder toute la protection dont ils avaient besoin, et disposé à le faire.  Non-seulement on leur concéda des franchises, mais toutes les mesures restrictives relatives au commerce intérieur, en ce qui concernait la fabrication de la toile furent immédiatement rapportées ; en même temps que par acte du Parlement, de l'année 1337, l'exportation de la laine et l'importation de la toile étaient à la fois prohibées.  L'égoïsme des Flamands, s'efforçant de monopoliser la connaissance qu'ils avaient acquise, dans le but de convertir les dons de la nature en instruments d'oppression, avait ainsi produit une résistance dont nous examinerons les effets dans un autre chapitre.

 

 

 


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  1861

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE XV :

DES CHANGEMENTS MÉCANIQUES ET CHIMIQUES DANS LES FORMES DE LA MATIÈRE.

 

Notes de bas de page

 

 

1  « J'ai vu aujourd'hui, ainsi que je l'indiquerai plus tard, trois mille barils d'un article valant un dollar et demi à New-York, rejetés pour n'être plus qu'un monceau de débris inutiles, parce qu'il coûterait, de transport, plus qu'il ne vaut.» (OLMSTEAD.  Les États à esclaves sur les bords de la mer, p.  330.)          Retour

2  La récolte actuelle qui s'élève à trois millions et demi de balles peut donner, nous dit-on, 90 millions de gallons d'huile.
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Le Monde est un atelier, p.  89.
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  1861

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE XVI :

CONTINUATION DU MÊME SUJET.

 

    § 1. — Caractère grossier du commerce anglais au commencement du XIV siècle. Les phénomènes qu'il offre à cette époque sont exactement semblables à ceux qui se révèlent dans les sociétés agricoles de nos jours.


    Au commencement du XIVe siècle, le commerce de l'Angleterre était tel que l'indiquait la condition très-grossière de sa population ; il consistait en laine, en peaux et en étain (depuis des siècles, elle approvisionnait le monde de ce dernier article), qui formaient la liste des objets d'exportation, et en toile, formant le principal article d'importation. On cherchait à obtenir la clientèle des nations étrangères pour ces matières premières, au moyen de concessions de privilèges à leurs négociants, en même temps que des droits vexatoires faisaient peser sur les fermiers du pays toutes les charges imposées par l'État. Expédiés à l'état le plus grossier, leurs produits leur revenaient sous la forme de toile et étaient alors admis contre l'acquittement d'un droit purement nominal, de moins d'un pour cent (1). La matière première était conséquemment à très-bon marché, tandis que les produits manufacturés étaient fort chers.

    Le commerce à l'intérieur était contrarié par d'innombrables mesures restrictives, tandis que tous les marchés nationaux, dans les bourgs et les foires, étaient si librement ouverts aux Flamands et aux manufacturiers des autres nations, qu'en lisant l'histoire des Plantagenets, on ne peut guère ne pas être frappé de l'identité du système anglais à cette époque, avec celui que suivent, de nos jours, les Turcs, et sous l'influence duquel l'empire ottoman est arrivé à son état actuel de dépérissement. En même temps qu'ils jouissaient, dans l'intérieur du royaume, de privilèges dont l'exercice était refusé aux Anglais, les marchands étrangers n'épargnaient aucun effort pour monopoliser l'achat de la matière première ; d'un côté du détroit, et sa transformation de l'autre côté, et pour maintenir ainsi la différence la plus considérable, entre les prix de la laine qu'ils désiraient acheter et la toile qu'ils désiraient vendre. La mise à exécution de ces desseins était l'objet des règlements des villes flamandes, auxquels nous avons fait allusion plus haut.

    La puissance d'association, — ou le commerce —, existait à peine alors en Angleterre, la diversité des travaux n'étant guère connue. Comme conséquence de ce fait, bien que la laine fût à bas prix, tous les articles de subsistance étaient cependant, comparativement, à bien plus bas prix, leur volume étant à tous égards, trop considérable pour permettre leur exportation dans des pays éloignés et ne trouvant à l'intérieur qu'un marché très-restreint. La première, représentant les subsistances qui avaient subi une seule opération de fabrication, pouvait s'échanger, tonne pour tonne, contre vingt fois sa valeur de métaux précieux. Les frais de transport étant donc comparativement faibles, elle pouvait avec quelque facilité circuler à une certaine distance ; tandis que les subsistances étaient souvent gaspillées en certaines parties du royaume, tandis que la famine régnait dans d'autres parties ; et, c'est ainsi qu'on voyait les moutons et les porcs former, presque entièrement, le capital de ceux qui faisaient profession d'affermer la terre.

    Les faits offerts ainsi à notre examen par l'Angleterre de cette époque sont identiques à ceux qui se présentent, de nos jours, dans les pays purement agricoles. Le coton de l'Inde peut être expédié au loin, parce que, de même que la laine anglaise, il représente les subsistances qui ont subi une seule opération de fabrication. Les subsistances de l'Inde ne peuvent s'exporter, même d'une partie du pays à une autre ; et il arrive, en conséquence, que les famines règnent dans un district, tandis que le blé se perd, faute de demande, dans tous les autres. Le blé de la Russie peut difficilement être exporté, mais la laine peut l'être facilement. Le blé de l'Illinois et de l’Iowa est absorbé en si grande proportion, dans son trajet pour arriver sur le marché, que le fermier désire, partout où cela est possible, le soumettre à une première et grossière élaboration ; il le fait donc passer dans l'estomac du cochon, amenant ce blé sur le marché sous la forme d'un porc. Le blé de la Virginie passe dans l'estomac des nègres, hommes et femmes, et arrive au marché sous la forme d'esclaves. Le blé de la Caroline, après avoir été digéré par des hommes et des femmes, s'introduit en Angleterre sous la forme de coton. Dans ce dernier pays, on sentit, ainsi qu'on le sent aujourd'hui, que la nécessité d'effectuer les changements de lieu était le grand obstacle au progrès ; et comme cet obstacle diminuait, avec chaque diminution dans le volume des denrées qui avaient besoin d'être transportées, il n'y a pas lieu d'être surpris que nous voyions le bon sens du peuple anglais l'amener à faire le premier pas dans une carrière dont les avantages avaient été si clairement révélés par Adam Smith, lorsqu'il démontrait combien était considérable le poids de blé et de laine contenu dans une pièce de toile ; et avec quelle facilité tous deux pouvaient être transportés lorsqu'ils avaient pris cette forme.

    A cette époque, ainsi qu'aujourd'hui, l'éloignement du marché produisait une grande fluctuation dans la demande des produits encombrants de la terre et dans leur approvisionnement ; à certain moment, le travailleur mourait faute de subsistances ; et le moment suivant, le fermier se trouvait ruiné, à défaut d'une population qui eût besoin de les consommer et pût payer le blé qu'il désirait vendre. De 1302 à 1317, le prix du blé haussa constamment, jusqu'à ce que, de 12 schellings, la première de ces années, il eût atteint, pendant la dernière, celui de 5 liv. 18 schellings ; et quelques années plus tard, nous le voyons baisser à 6 schell., 10 schell., et 1 liv. 7 schell.(2). Partout la culture était restreinte aux sols légers ; les terres les plus fertiles du royaume étant alors, ainsi qu'elles continuèrent de l'être plusieurs siècles après, tellement couvertes de bois ou saturées d'humidité qu'elles devenaient inutiles pour les besoins de l'homme. De l'autre côté du détroit tout se passait bien différemment. Le concert des efforts actifs résultant de la diversité des travaux ayant fait exploiter les sols les plus fertiles, l'agriculture avait déjà atteint une position plus élevée, probablement, que celle occupée par aucune partie de l'Angleterre, même au commencement du XVIIIe siècle. Chaque jour, le peuple hollandais et le peuple flamand obtenaient un pouvoir plus considérable sur la nature et de plus grandes facilités pour accumuler de nouvelles richesses.
 

 

 

 

 

 

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