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3 février 2009 2 03 /02 /février /2009 22:51
Vladimir-I-Vernadski-copie-1.jpgArticle tiré de la revue Fusion n°83 

Sur la différence énergéticomatérielle fondamentale entre les corps naturels vivants et non vivants dans la biosphère .
VLADIMIR VERNADSKI
1ère partie - 2nde partie

Le texte qui suit est un article que Vernadski a écrit en 1938 et qui n’a été publié en russe qu’en 1993, en annexe à une biographie. Il a été traduit en anglais par Jonathan Tennenbaum, puis en français par Emmanuel Grenier. Des légères coupures ont été opérées, signalées par des points de suspension entre crochets. Le texte que nous publions représente environ 80 % du texte original. Il ne s’agit donc certainement pas d’une traduction de référence, mais d’un premier jet qui pourra être ultérieurement amélioré. Vu le grand intérêt de ce texte, nous n’avons pas cru devoir attendre plus longtemps pour le présenter au public français.



Avant-propos :
   Travaillant actuellement sur le livre Les concepts de base de la biogéochimie en connexion avec la connaissance scientifique de la Nature, l’auteur considère qu’il vaut la peine de ne pas attendre qu’il soit fini – ce qui risque de prendre encore du temps – et de développer séparément certaines des questions spécifiques qu’il traite dans ce livre, sur lesquelles il souhaite attirer l’attention maintenant. L’un de ces problèmes, qui fait suite aux Questions de biogéochimie, est la caractéristique énergético-matérielle fondamentale de la matière vivante de la biosphère, qui la distingue de tous les autres objets et processus de la Nature ; distinction qui ne souffre aucune exception. L’auteur en est venu à cette question en étudiant la vie en tant qu’agrégat * de tous les organismes vivants sur la planète – autrement dit la matière vivante – en examinant la structure spatiale du domaine habité par la matière vivante – la biosphère –, en tant qu’unique région de la planète légitimement connectée avec les espaces extraterrestres. L’auteur estime que personne d’autre n’a encore approché le phénomène de la vie de ce point de vue. Dans le même temps, cette nouvelle approche fait émerger des conséquences importantes, qui peuvent être vérifiées par l’expérience et l’observation. L’auteur considère que le tableau publié ci-dessous [résumant les distinctions essentielles entre les matières vivante et non vivante, NdT] ne suppose aucune hypothèse spéciale ou théorie mais constitue une présentation des faits scientifiques et des généralisations empiriques qui découlent de ces faits. Le tableau ne sort pas du cadre de la science pour entrer dans celui de réflexions philosophiques mais il manifeste en même temps, de façon aiguë et décisive, l’importance de la vie – la matière vivante – dans la biosphère, en tant que processus planétaire. En connexion avec les questions générales soulevées ici, l’auteur aborde, dans une troisième publication devant être imprimée sous le titre Sur les états de l’espace physique, une question encore plus générale qui ne concerne pas seulement la bio-géochimie, mais toutes les études de la nature et qui est indissolublement liée aux problèmes de la biogéochimie.
Les sujets de ces deux publications sont intimement reliés.

Moscou, septembre 1938.

  * Vernadski utilise ici un terme propre à la chimie minérale (les roches sont des agrégats de divers minéraux) mais l’étend à la matière vivante qu’il considère comme la somme hétéroclite de tous les processus vivants, qu’ils appartiennent au règne animal ou végétal, NdT.



 I. Concepts de base

 La matière vivante, la biosphère en tant qu’enveloppe de la planète.
Son nouvel état géologique – la noosphère. Les corps naturels et les processus naturels de la biosphère – matière inerte, matière vivante et matière bio-inerte. Leur système – l’appareil scientifique. Les orientations chirales préférentielles de la matière vivante en tant que manifestation de l’état de l’espace occupé par cette matière. L’énergie libre de la biosphère en tant que manifestation de l’énergie biogéochimique de la matière vivante dans la biosphère.


1.
   Dans
mes travaux en biogéochimie, que j’ai poursuivi systématiquement et sans interruption depuis 1916, j’ai récemment formulé des conclusions qui soulignent la distinction profonde, infranchissable – de caractère énergético-matériel – entre les processus de la vie et tous les autres processus intervenant dans la biosphère ; distinction qui peut certes être exprimée en termes quantitatifs exacts, mais qui appelle en même temps de nouveaux travaux mathématiques dans le domaine de la géométrie. Ce qui nous est révélé, c’est un nouveau domaine de l’étude des processus vivants, qui ouvre de nouvelles facettes des phénomènes de la vie et de nouvelles possibilités pour le travail scientifique. Je considère donc utile d’attirer l’attention sur ces conceptions plutôt que d’attendre d’avoir terminé ma refondation de la biogéochimie.

2.
   Les
fondations de la biogéochimie reposent sur quelques conceptions essentielles, qui ne présupposent pas d’hypothèse spécifique mais constituent des concepts scientifiques clairs et précis et des généralisations scientifiques d’expériences et d’observations empiriques des naturalistes. Surtout, le concept de matière vivante dans la biosphère représente une de ces généralisations scientifiques empiriques – irréfutable, en tant que fait correctement et scientifiquement établi.
   La matière vivante de la biosphère est l’agrégat de tous ses organismes vivants.
   Dans la suite du texte, j’utiliserai, au lieu du concept de vie, le concept de matière vivante au sens que je viens d’indiquer. Du point de vue de la biosphère, l’organisme vivant individuel est perdu de vue. C’est l’agrégat des organismes, la matière vivante, qui occupe la première place. Cependant, en biogéochimie – dans certains cas rigoureusement définis – il est nécessaire de porter son attention sur l’organisme discret, sur son individualité. Il est indispensable de le faire lorsque, comme nous le verrons bientôt, l’activité de l’homme apparaît comme facteur géologique, dans lequel la personnalité individuelle apparaît quelquefois clairement et se reflète dans des phénomènes à grande échelle de caractère planétaire. La personnalité humaine change, accélère et exprime son importance considérable par son action sur la biosphère.
   Nous vivons une nouvelle époque géologique. L’homme, par son travail, et sa relation consciente à la vie, est en train de transformer la Terre – la région géologique de la vie, la biosphère. L’homme fait naître un nouvel état de la biosphère : à travers son travail et sa conscience, la biosphère est en transition vers la noosphère. L’homme est en train de créer de nouveaux processus biogéochimiques qui n’avaient encore jamais existé. On est, par exemple, en train de créer sur notre planète des masses énormes de nouveaux métaux purs ou de leurs alliages, qui n’avaient jamais existé sous cette forme auparavant, comme l’aluminium, le magnésium ou le calcium.
   La vie animale ou végétale se change et se réorganise. De la façon la plus drastique. De nouvelles espèces et de nouvelles races sont générées.
   La face de la Terre change de façon drastique. L’étape de la noosphère est en train d’émerger. La biosphère de la Terre vit une gigantesque floraison, dont le développement futur nous apparaît grandiose.
   Dans ce processus géologique, qui est fondamentalement un processus biogéochimique, un seul individu vivant – une grande personnalité, qu’il s’agisse d’un scientifique, d’un inventeur ou d’un dirigeant politique – peut avoir un rôle fondamental, décisif, directeur et se manifester en tant que force géologique. L’émergence de ces individualités dans des processus ayant une grande importance biogéochimique est un nouveau phénomène planétaire.
   Il émerge et se manifeste de façon toujours plus aiguë et profonde au cours du temps, depuis les dix mille dernières années, à comparer aux milliards d’années de l’histoire de la biosphère, pendant lesquels ce phénomène n’existait pas.

3.
   A
côté du concept de matière vivante, nous proposons deux autres généralisations empiriques : le concept du milieu de vie, la biosphère ; et le concept de corps naturel vivant.
   La matière vivante n’existe sur notre planète que dans la biosphère, qui est la région de la vie.
   Cette caractérisation définit les limites de la biosphère de façon très précise. Selon cette définition, l’ensemble de la troposphère appartient à la biosphère. Aujourd’hui, des organismes vivants – les hommes et leurs compagnons inévitables : insectes, plantes, micro-organismes – pénètrent encore plus loin, seuls ou à l’aide de machines, jusque dans la stratosphère. Dans le même temps, l’humanité civilisée (toujours avec ses compagnons inévitables) pénètre à plusieurs kilomètres en dessous de la surface de la planète, au-delà des limites du relief de surface de la planète en contact avec la biosphère. La science actuelle révèle la signification planétaire de la découverte, à la fin du siècle dernier, d’organismes vivants – de la matière vivant microbienne, principalement anaérobie – dans les régions souterraines à plus de trois kilomètres de profondeur, et sans doute encore plus profondes. Les frontières inférieures de la biosphère s’étendent ainsi à plusieurs kilomètres en dessous du niveau de la géoïde.
   L’ensemble des océans appartient à la biosphère.
   La biosphère constitue une enveloppe géologique bien définie, nettement différenciée de toutes les autres couches géologiques de notre planète. Cela n’est pas seulement dû au fait que la biosphère est habitée par une matière vivante qui a une énorme importance en tant que force géologique, retravaillant la biosphère en profondeur et transformant ses propriétés physiques, chimiques et mécaniques. C’est aussi la seule enveloppe de notre planète à recevoir l’énergie extraterrestre, transformée par la matière vivante.
   La principale source de cette énergie est le Soleil. L’énergie du Soleil – thermique, lumineuse et chimique – constitue, avec l’énergie des éléments chimiques, la principale source de production de matière vivante.
   La matière vivante traverse l’ensemble de la biosphère et, dans une grande mesure, la crée. Elle accumule l’énergie de la biosphère, principalement l’énergie thermique et chimique du rayonnement solaire, ainsi que l’énergie chimique des atomes de la Terre. Il est possible que les éléments radioactifs jouent aussi un rôle.

4.
   La
substance énergético-matérielle qui constitue la biosphère est profondément hétérogène. De ce point de vue, nous devons distinguer l’importante masse de matière qui n’appartient pas aux organismes vivants et que j’appelle matière inerte – matière non vivante. L’essentiel, en termes de masse, est formé de roches solides, mais le plus gros volume est liquide et gazeux : l’océan et l’atmosphère.
   Il existe une connexion matérielle (respectivement énergétique) unifiée, ininterrompue entre la matière vivante et la matière inerte, que l’on retrouve dans les processus de respiration, de nourriture et de reproduction, nécessaires à sa survie : une migration biogénique d’atomes des éléments chimiques, des corps inertes de la biosphère vers les corps vivants et en sens inverse.
   Cela prend la forme d’un mouvement – le départ et l’arrivée d’éléments et de composés chimiques spécifiques de et vers les organismes vivants, en liaison avec leurs processus de nutrition, de respiration, d’excrétion et de reproduction, caractéristiques de la matière vivante. Ces processus définissent l’énergie biogéochimique de la matière vivante, dont la principale manifestation est la reproduction et la propagation de la matière vivante.
   Tous ces phénomènes de migration biogénique et d’énergie biogéochimique sont définis par les dimensions, la constitution chimique et l’énergie de la biosphère.
   De ce fait, seuls des organismes bien spécifiques (pas n’importe quelle sorte d’organisme arbitraire) peuvent exister dans la biosphère, ceux qui sont déterminés par la structure de la biosphère. Les organismes vivants et la matière vivante sont des fonctions légitimes de la biosphère. Les gens tendent à l’oublier facilement. Et de façon erronée – surtout pour leurs considérations philosophiques, mais aussi en biologie – ils opposent l’organisme vivant à son milieu, comme s’il s’agissait de deux objets indépendants. Cette sorte d’opposition est une erreur logique. On la retrouve surtout dans la philosophie et elle affaiblit le fondement de ses conclusions. Mais je ne cesserai de revenir sur ce point.

5.
   Le
concept de corps naturel n’est pas moins important. De façon étrange, ce concept de base, qui par essence traverse toutes les sciences de la nature, est habituellement négligé et n’est pas soumis à l’analyse logique. Pourtant, les scientifiques utilisent ce concept, inconsciemment, à chaque étape de leur travail.
   Mon maître V.V. Dokoutchaïev, dans son travail créatif en pédologie, propose que le sol est un corps naturel spécial, distinct des autres matériaux solides de la croûte terrestre.
   Comme cela est bien connu, il a pu démontrer cette thèse et permettre ainsi à ses contemporains de saisir, grâce à un exemple frappant de synthèse réussie, les bases du travail créatif dans l’étude de la nature.
   Toutefois, ces type d’événements sont rares dans l’histoire de la science et dans la vie scientifique actuelle. D’ordinaire, les débats ne touchent pas aux hypothèses fondamentales de la vie scientifique.
   Les gens n’en parlent pas ; ils les oublient. En y réfléchissant, on se convainc aisément que les concepts de corps naturel et de phénomènes ou processus naturels sont à la base de toutes les sciences naturelles.
   Dans nos commentaires ultérieurs, nous ne toucherons qu’à la biosphère et considérerons seulement les processus impliquant la matière vivante.
   Les scientifiques n’étudient dans la biosphère que les objets qui y sont générés par des forces internes et que les processus qui naissent de ces forces. Les objets qu’ils traitent peuvent être appelés corps naturels, véritables ou réels, de la biosphère.
   La tâche de la science consiste à estimer, décrire et définir tous les corps et les processus naturels qui existent ou ont existé dans la biosphère. Ce travail implique des générations de scientifiques, et des milliards et des milliards de faits ainsi que de généralisations scientifiques – c’est-à-dire des corps et des processus naturels – que l’on peut saisir de façon scientifique, dont on peut rendre compte et que l’on peut mettre en système.
   C’est la base de la science ; à partir de là, on construit des généralisations empiriques, avant de revenir aux corps et processus naturels.
   C’est par ce processus que l’on génère le contenu de base de la science ; contenu dont, curieusement, il n’existe pas jusqu’à maintenant d’expression faisant l’unanimité. J’en suis venu à l’appeler appareillage scientifique.
   Cet appareillage a commencé à se former en astronomie des milliers d’années avant notre ère et nous a été transmis sous forme de données numériques sur les positions du Soleil, des étoiles, et des planètes dans les recueils helléniques (Hipparque, Ptolémée). Ce travail a été relancé au Moyen Age dans l’Asie centrale.
   Les chroniqueurs rapportent sans cesse des descriptions précises de comètes, de météorites, de boules de feu, etc. Au début du XIVe siècle, une accumulation rapide de ce type de matériel a permis les premières généralisations. Mais même en astronomie, le processus de base, se développant constamment et rapidement à partir de ce point, n’a vraiment commencé à grande échelle qu’au XVIIIe siècle. Dans ce siècle – le siècle des sciences naturelles descriptives – les tentatives d’observer, de décrire et de rendre compte précisément de chaque corps naturel, ainsi que d’enregistrer tout phénomène naturel, devinrent une tâche consciente des sciences naturelles exactes. Linné (1707- 1778), se basant sur les travaux des naturalistes qui l’avaient précédé, introduisit le concept de système de la Nature et calcula pour la première fois le nombre d’espèces d’animaux et de plantes – espèces de la matière vivante homogène qui peuplaient la biosphère. En tout, il comptabilisa 13 724 espèces différentes d’organismes vivants, et beaucoup moins d’espèces de roches et de minéraux.
   Aujourd’hui, le nombre d’espèces de plantes approche les deux cent mille et excède peut-être les trois cent mille. Le nombre estimé des espèces animales approche les huit cent mille et atteint sans doute plusieurs millions, voire dépasse les dix millions. Le système de la Nature, pris dans ce sens large, correspond à ce que j’ai appelé appareillage scientifique.
   L’accumulation colossale de données numériques correspondant aux propriétés chimiques et physiques de la matière – qui se déroule à la façon d’une boule de neige, sans cesse croissante avec le temps, obtenue principalement par des expériences scientifiques et non par l’observation de la biosphère ou par un travail scientifique commençant dans la biosphère, excède de plusieurs ordres de grandeur la quantité de corps naturels vivants et n’a pas de limites – rend selon moi la caractérisation de ces données comme un système naturel, peu claire logiquement, pleine d’inconvénients et inutile dans la pratique.
   Pour cette raison, le concept d’appareillage scientifique, que nous ne possédons que par le fait qu’il a été réduit à un système scientifique, est plus simple. Il comprend à la fois le système de la Nature et l’appareillage scientifique des communautés humaines, pleinement inspiré par la personnalité individuelle.

6.
   Tout
objet de science naturelle est un corps naturel ou un processus naturel. A l’heure actuelle, des milliards de milliards, sinon plus, de corps et de processus naturels ont été scientifiquement réunis, enregistrés et définis dans le système de l’appareillage scientifique. Le nombre des corps et processus s’accroît constamment et le système de l’appareillage scientifique est en amélioration constante. De ce fait, nous sommes confrontés, de façon toujours plus critique, à une accumulation infinie de faits scientifiques.       C’est à partir de celle-ci que l’on tire le contenu de base de la science. Retravaillés par des généralisations scientifiques, des hypothèses conditionnelles et des théories, et soumis à l’analyse et à la déduction mathématique, ils deviennent la vérité scientifique, dont la précision et la profondeur augmentent avec chaque génération.
   Cette science exacte se distingue de la philosophie, de la religion et de l’art, où il n’existe pas d’appareillage scientifique et où la vérité scientifique, parfois révélée par une intuition créatrice, ne peut être acceptée que lorsqu’elle a été scientifiquement validée. Cette intuition créatrice est parfois bien en avance sur la compréhension scientifique et dans ces domaines de la créativité humaine, les vérités scientifiques de l’avenir se dévoilent parfois, encore floues pour les contemporains. Cependant, nous ne pouvons les traiter en dehors de la science, sans les fonder sur l’appareillage scientifique.

7.
   Il
est possible de distinguer trois types de corps naturels dans la biosphère : les corps vivants (plantes, insectes, etc.), les corps inertes (pierres, quartz) et les corps bioinertes (sol, eau des lacs, etc.) La biosphère se décompose en domaines nettement délimités que sont les corps vivants, inertes et bio-inertes – les eaux, la matière vivante, les roches montagneuses, l’air, etc. Il y a une transition des corps vivants vers les corps inertes au moment de la mort ; lorsque les corps vivants cessent d’exister en tant que tels, ils se transforment en roche organogénique (par exemple les biolithes) et en Corps inertes
comme les gaz. Les biolithes sont souvent des corps bio-inertes. On n’a jamais observé de génération spontanée d’un organisme vivant à partir de corps inertes : le principe de F. Redi (toute vie vient de la vie) n’est jamais violé. Le concept de corps naturels inertes (morts) et vivants en tant qu’objets naturels bien distincts est une notion ancienne, enseignée au long des millénaires – un concept relevant d’un sain bon sens. Il ne peut pas être mis en doute et est clairement intelligible pour tous.
   Après des siècles de travaux scientifiques, on n’a relevé que très peu de cas douteux où l’on se demande si un corps naturel spécifique doit être considéré comme un Corps vivant
ou inerte, ou encore si un phénomène naturel donné est une manifestation de processus vivants ou non vivants.
   La question des virus relève de ces rares cas et c’en est sans doute l’illustration la plus profonde. [...]

8.
   Le
concept de corps naturel bioinerte est nouveau – défini en termes biogéochimiques précis et distinct des concepts de corps naturels vivants et inertes. Les corps naturels de ce type se manifestent très clairement dans la biosphère et jouent un grand rôle dans son organisation.
   Les corps bio-inertes sont caractéristiques de la biosphère. Ce sont des structures légitimes, se composant simultanément de corps vivants et inertes (les sols, par exemple), pour lesquelles les propriétés physicochimiques exigent des corrections – parfois très grandes – par rapport aux résultats que l’on obtiendrait si, en les étudiant, on ignorait l’activité de la matière vivante qui y existe. La migration biogénique des éléments chimiques (les atomes) joue un grand rôle dans leurs propriétés – très souvent un rôle dominant.
   Tout sol est un corps bio-inerte typique, comme le reconnaissait déjà clairement V.V. Dokoutchaïev. La très grande majorité des eaux terrestres sont des corps bio-inertes. Les cas où la matière vivante ne joue pas un rôle fondamental sont très isolés.
   Le processus d’altération des roches est un processus bio-inerte – fait habituellement oublié. Ce fait explique à mon sens l’arriération de ce domaine de la biologie chimique (l’altération de la croûte terrestre) par rapport au niveau actuel de la connaissance. L’approche biogéochimique devrait contribuer grandement à résoudre ce problème.

9.
   Jusqu’ici,
je n’ai pas franchi les bornes des concepts : matière vivante, biosphère, corps et processus naturels (inertes, vivants et bio-inertes) – concepts basés sur un énorme matériau d’expériences et observations empiriques. Ces concepts ne peuvent soulever aucun doute théorique et ils ne nécessitent pour être compris aucune nouvelle hypothèse scientifique ou construction théorique. On peut donc procéder calmement au travail, si fructueux en science, de la généralisation de faits scientifiques accumulés et de leur construction en système.
   Toutefois, pour la compréhension de ce qui va suivre, je dois nécessairement toucher à deux nouveaux phénomènes de grande importance, dont l’étude scientifique ne peut être effectuée sur la base de simples généralisations de faits scientifiques, mais qui nécessitent l’introduction de nouveaux concepts et la recherche d’une nouvelle forme de cognition de ces faits. Chacun de ces phénomènes est encore très peu compris d’un point de vue théorique et leur importance scientifique n’est pas reconnue.
   Ils se trouvent aujourd’hui à la frontière de la connaissance scientifique contemporaine. Il s’agit, premièrement, du concept de chiralité (dissymétrie moléculaire) et deuxièmement du concept d’énergie biogéochimique.
   La chiralité est un concept qui existe depuis les temps anciens mais qui n’a presque jamais été abordé de façon scientifique ou philosophique. Louis Pasteur est le premier à avoir attiré l’attention sur son importance fondamentale pour la compréhension de la vie – de l’organisme vivant, de la matière vivante.
   Indépendamment de Pasteur, et quelque peu auparavant, Beshan avait réalisé la même chose. Néanmoins, Pasteur comprit la question plus profondément et y identifia un phénomène qui nous permet de pénétrer de façon scientifiquement précise dans ce domaine immense, dont le savant français lui-même ne pouvait prévoir la pleine signification.
   Le concept d’énergie biogéochimique fut introduit par moi en 1925, dans mon rapport à la Fondation Rosenthal à Paris, rapport qui ne fut jamais publié intégralement.
Dans mon livre, je traite cette question aussi complètement que possible aujourd’hui. Examinons d’abord la question de la chiralité dans sa relation à la matière vivante de la biosphère.

10.
   Nous
n’avons besoin, ici, de traiter du cas d’A. Beshan, naturaliste profond et bon expérimentateur.
   Contemporain, ennemi et rival de Pasteur, il lui survécut plusieurs années mais fut incapable de trouver les conditions nécessaires à un travail systématique. Il est parti exactement du même fait que Pasteur – la découverte, au début du XIXe siècle, dans une petite entreprise alsacienne, de la transformation de l’acide racémique ou ses sels en acide tartrique gauche, pendant le développement de la lie de vin (levure). Sur cette base, on a pu établir la production d’acide tartrique gauche. Pasteur et Beshan, tous deux chimistes chevronnés, voyaient dans cette action chimique de la levure, en tant qu’organisme vivant, une propriété unique et exclusive de la vie – la matière vivante – ; quelque chose de non compris, inhabituel, inconnu et apparemment impossible à réaliser par des réactions chimiques ordinaires. Penser et remarquer ces faits – voir le problème qu’ils recelaient – était déjà un grand accomplissement, mais ce n’était qu’une première étape. Il fallait encore étudier le phénomène et l’exprimer en faits scientifiques précis.
   Les circonstances de la vie de Beshan ne le lui permirent pas. Pasteur, de son côté, relia le nouveau phénomène avec la propriété très spéciale des cristaux énantiomorphes, caractérisant – sous l’influence de la vie – les acides et les sels racémiques.
   Un énantiomère était produit – le gauche ou le droit seulement, mais pas l’autre, peut être consommé par l’organisme. Pasteur y vit une violation nette de la loi de symétrie cristalline. Cette violation tenait au fait que des formes énantiomorphes manifestaient des degrés de stabilité complètement différents à l’intérieur des corps vivants, faisant preuve de comportement chimique très différent – jamais observé autrement dans les corps naturels inertes. Evidemment, puisque ces derniers sont incapables de produire cet effet.
   Il appela ce phénomène dissymétrie mais n’attira pas l’attention dessus et ne le relia pas aux chiralités que l’on retrouve normalement dans la matière vivante, dans ses structures morphologiques et physiologiques. Il étudia le phénomène comme un cristallographe et un chimiste, mais pas comme un biologiste. Pasteur lui-même ne fournit pas de définition précise de la dissymétrie et ne considérait pas les changements intervenus en cristallographie lorsqu’il retourna à ces problèmes à la fin de sa vie.
   Mais la découverte par Pasteur de la dissymétrie moléculaire, complètement analogue à la dissymétrie des cristaux polyhédriques, fut beaucoup plus importante. Il lança ainsi une science complètement nouvelle, la stéréochimie. La chimie s’enrichit ainsi du concept d’asymétrie (c’està- dire l’absence de symétrie dans la configuration spatiale environnant un atome de carbone). Ce terme est utilisé dans des sens complètement différents en chimie et en physique, ce qui génère des confusions.

11.
   Une
confusion survint qui interféra avec ces travaux. La dissymétrie moléculaire, découverte par Pasteur, montrait qu’il apparaissait dans les formes chimiques reflétant la présence de matière vivante, y compris dans les solutions, une non-équivalence des structures atomiques gauche et droite. Elles sont chimiquement distinctes dans la matière vivante, mais chimiquement identique dans un milieu chimique inerte. Pasteur ne savait pas qu’il s’agissait essentiellement (comme on le découvrit après sa mort) du même phénomène que celui qu’il avait découvert dans les cristaux. Il avait affaire à un arrangement spatial d’atomes sous formes de spirales gauches et droites, analogues à la structure atomique dans les molécules.
   Cette conclusion émergea de façon précise à partir du concept d’espace cristallin – pour utiliser le langage contemporain – élaboré géométriquement par E.C. Fedorov et K. Schoenflies à la fin du siècle dernier.
   Dans la coïncidence des 230 groupes (en fait 219) avec les arrangements des atomes dans l’espace cristallin, E.C. Fedorov voyait, correctement, une preuve de la structure atomique des composés chimiques.    Ceci fut définitivement démontré au XXe siècle grâce à l’analyse des cristaux par rayons X. Les contemporains de Pasteur – Zeeber, Ampère et Goden – l’avaient pressenti, mais Pasteur n’était pas atteint par l’influence de leurs idées. Après Pasteur, Pierre Curie généralisa le concept de dissymétrie, considérant le phénomène découvert par Pasteur dans les organismes vivants comme un cas particulier, et appliquant le concept de dissymétrie aux phénomènes physiques en général – champs magnétiques, électriques, etc. – en le posant comme un postulat de base.
   Cependant, Curie ne put développer complètement ses idées ; son travail fut interrompu en plein essor par sa mort soudaine. On ne retrouva pas, dans ses papiers, de présentation cohérente de ses résultats. Il suffit de noter que Curie démontra l’existence de formes différentes de « dissymétrie » et conclut logiquement que des phénomènes reliés à une forme donnée de dissymétrie devaient avoir des causes possédant la même forme de dissymétrie. On a l’habitude d’appeler cette conclusion le principe de Curie.
   A cette étape, je crois qu’il est plus correct de laisser de côté le concept et le terme de dissymétrie, et d’employer plutôt la conception plus ancienne, mieux connue, de la différence dans les organismes des orientations main-gauche ou maindroite (chiralité), qui se manifeste si profondément chez l’homme. Puisqu’il existe une théorie (à mon avis fausse) sur l’émergence supposée de la chiralité chez l’homme qui ne serait intervenue qu’au Néolithique, il vaut mieux utiliser la conception plus générale que Curie employait avant sa mort, sur la distinction entre différents états de l’espace. Il ne put élaborer ce concept avant sa mort mais cela correspond parfaitement, en essence, aux différentes formes de géométrie sur lesquelles travaillaient Curie et Pasteur.
   Ce concept était largement connu chez les naturalistes travaillant dans le domaine des sciences naturelles descriptives et persista dans tout le XVIIIe siècle. Le sujet avait souvent trait aux différents états de l’espace sur notre planète, liés à son mouvement orbital autour du Soleil... Pasteur reconnut la possibilité d’états différents de l’espace cosmique et expliquait ainsi le phénomène de la dissymétrie de la matière vivante, découvert par lui. En fait, nous devrions voir dans l’état de l’espace le substrat géométrique de base pour tous les phénomènes temporels et énergétiques qui s’y déroulent.
   Dans le cas présent, ce sera un état de l’espace dans lequel les énantiomères gauche et droite, exprimées sous formes de structures atomiques spirales gauche et droite, sont identiques dans la matière inerte et diffèrentes dans la matière vivante.
   On n’a pas accordé assez d’attention à ce fait, qui est l’une des propriétés géométriques les plus profondes des corps naturels, que ce soit en philosophie, en mathématique ou en sciences de la nature.          Mais chacun de nous y est très familier dans la vie courante. Nous le savons depuis notre enfance, puisque l’être humain est un corps vivant naturel dans lequel les énantiomères droite et gauche sont nettement distinctes l’une de l’autre (y compris en termes chimiques). Par exemple, les gauchers représentent une personne sur 16 000. Ce phénomène a commencé, ces temps derniers, à attirer une plus grande attention, encore insuffisante à mon avis, en biologie.
   Les mathématiciens – en particulier les géomètres – ne peuvent plus l’ignorer mais doivent élaborer ce phénomène géométrique fondamental...
   Je pense qu’il est pertinent de parler, dans ce contexte, d’espace-temps physique, comme Helmholtz le proposa.

12.
   Il
nous faut encore discuter d’un autre phénomène, qui a été à peine abordé par des généralisations scientifiques – celui de l’énergie active de la matière vivante dans la biosphère. R. Maïer, il y a presque cent ans, considérait déjà les manifestations de la matière vivante. Il montra que dans les minéraux organogéniques – les gisements houillers – nous avons affaire à une accumulation d’énergie libre, développée sous cette forme par la matière vivante au Carbonifère, en utilisant l’énergie solaire de cette époque. La forme générale de l’idée – la création et l’accumulation d’énergie libre dans la biosphère par la matière vivante et les processus naturels connectés à la matière vivante – naquit dans beaucoup d’esprits au milieu du XIXe siècle, au moment où le concept d’énergie était développé.
   Je veux en parler plus concrètement ; non pas comme d’une question de base sur la structure énergétique de notre planète mais comme un problème biogéochimique.
   L’énergie libre générée par la matière vivante dans la biosphère, convertie en travail, liée au mouvement des atomes et au mouvement de la matière vivante, fut appelée par moi en 1925 énergie biogéochimique (voir § 17). Etant donné que c’est l’énergie biogéochimique qui distingue nettement la matière vivante de la matière inerte, il est indispensable de mentionner ici ses caractéristiques fondamentales.

13.
   L’énergie
biogéochimique de la matière vivante est intimement liée à trois caractéristiques fondamentales de la matière vivante dans la biosphère : d’abord, l’unité de toute la matière vivante de la biosphère ; ensuite, la génération constante, dans la biosphère, d’énergie libre capable de produire du travail ; enfin, la colonisation de la biosphère par la matière vivante.
   Dans chacun de ces trois cas, l’énergie biogéochimique se manifeste différemment ; prise globalement, l’énergie biogéochimique est inhomogène. En dernière analyse, elle est liée au mouvement de la matière vivante dans la biosphère, aux autres déplacements, actifs ou passifs (liés à la matière vivante), connectée avec la mobilité des masses dans la matière vivante de la biosphère, finalement réductible au mouvement des atomes et des éléments chimiques.
   A partir de ce que j’ai dit, il est clair que l’énergie biogéochimique n’est pas une forme spéciale d’énergie appartenant à la vie. Ce n’est pas l’énergie de la vie que recherchait W. Ostwald, analogue à l’énergie thermique, chimique, lumineuse ou électrique. Elle n’est pas concernée par la loi de conservation de l’énergie mais apparaît dans ce contexte sous des formes d’énergie déjà connues auparavant.
   Nous pouvons maintenant remonter avec précision à la source réelle de l’énergie biogéochimique.
Cette source, en dernière analyse, est l’énergie rayonnante (lumineuse, thermique et chimique [c’est-à-dire ultraviolette, NdT]) du Soleil et l’énergie des éléments chimiques dont sont constitués les corps de matière vivante (énergie thermique et chimique). Il y a probablement une contribution des atomes radioactifs.
   Un calcul quantitatif exact des effets thermiques des processus vivants établit sans aucun doute, à mon avis, la source de cette action.
   Il s’agit, essentiellement, du résultat de l’organisation de la biosphère et de l’organisation de la matière vivante qui peuple la biosphère.
   Je ne puis ici avancer davantage sur ce sujet. Je voudrais simplement mentionner les principales formes de manifestation de cette organisation. La plus importante, c’est l’énergie biogéochimique, reliée à la colonisation de la planète.
   J’ai essayé de la calculer, pour chacune des espèces de matière vivante, sous forme de vitesse maximum de propagation de ce type de matière vivante – comme j’ai essayé, peut être sans succès, de définir ce terme auparavant – ; autrement dit, la vitesse de colonisation de la planète entière par l’organisme donné.   
   Cette énergie est liée à la reproduction des organismes vivants. Chaque forme de matière vivante peut se propager de cette façon à une allure bien déterminée, spécifique à chaque forme de matière vivante, et peupler ainsi théoriquement la planète entière.
   Dans le cas le plus rapide, celui des bactéries, cette colonisation peut être réalisée en un jour et demi ; alors que pour l’éléphant – l’un des organismes les plus lents à se reproduire – cela prendrait mille à mille cent années. Pour une colonisation complète de la planète, la matière vivante doit couvrir toute la surface de la planète...
   Lorsque je parle de colonisation de la planète, j’émets l’hypothèse que cette colonisation interviendrait dans des conditions telles qu’elle pourrait se dérouler normalement si elle n’était pas limitée par le manque d’espace. La vitesse de colonisation, exprimée par la grandeur V, peut varier dans une gamme très vaste, allant d’une vitesse proche de celle du son, plus de 33 000 cm/s (pour certaines bactéries) à quelques centièmes de centimètre par seconde (dans le cas de l’éléphant).
   En d’autres termes, nous discutons de la population durable, à long terme, de la planète par un organisme vivant dans ses conditions normales, dans lesquelles il peut exister pendant des générations ; et non de ces explosions de vie où l’excès d’organismes vivants est régulé par la mort, due à l’insuffisance de nutriments ou d’espace.
   Ces conceptions ne sont pas encore entrées dans la conscience scientifique. Je suis convaincu que l’avenir verra leur emploi. Il faut noter que la vitesse du son correspond à des conditions réelles, dans lesquelles le milieu de respiration dans lequel vit l’organisme – même dans le cas d’organismes aquatiques (dans les eaux naturelles, il existe une atmosphère sous-marine) –, n’est pas détruit. Ceci montre que l’énergie biogéochimique, sous cette forme, a presque atteint ses limites physiques...
   Cependant, l’énergie biogéochimique de la population ne subsume pas toutes les manifestations de cette énergie. Je mentionnerai encore deux de ses formes.
   D’abord, la production de la masse d’un organisme vivant et son maintien par le métabolisme à une valeur constante pendant la durée de son existence.
   Et deuxièmement, la grande forme nouvelle d’énergie biogéochimique que constitue le processus de travail de l’espèce humaine dans la biosphère, qui est dirigé de façon complexe par la pensée humaine – la conscience. Il est remarquable de constater que la croissance des machines au cours du temps, au sein de la structure de la société humaine, suit aussi une progression géométrique, tout comme la reproduction de la matière vivante, y compris des êtres humains. Cette manifestation de l’énergie biogéochimique n’a pas encore été du tout, à ce jour, abordée par les études scientifiques.
   Il est maintenant indispensable d’orienter les travaux scientifiques vers ce domaine de la biogéochimie, non seulement à cause de sa grande importance théorique mais aussi, à mon avis, en vue de son importance certaine pour les devoirs de l’Etat. Il est nécessaire d’approcher le processus autodéveloppant de transition entre la biosphère et la noosphère, qui se déroule en ce moment, de façon consciente.
   C’est donc une tâche de la première importance que de rassembler les faits et d’étudier les problèmes liés à l’énergie biogéochimique. Je ne doute pas que cela se fasse, un jour ou l’autre. J’espère y revenir dans mon livre.
La caractéristique distinctive de base de l’énergie biogéochimique se manifeste clairement et distinctement par l’accroissement de l’énergie libre de la biosphère avec le temps géologique et, de façon particulièrement radicale, lors de la transition de la biosphère à la noosphère.

A suivre ici
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commentaires

J
<br /> Merci pour le soutien.<br /> <br /> <br />
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A
<br /> merci pour cette article<br /> bonne continuation<br /> <br /> <br />
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