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28 février 2007 3 28 /02 /février /2007 07:06


La Couronne effeuillée

J' irai, j' irai porter ma couronne effeuillée
Au jardin de mon père où revit toute fleur ;
J' y répandrai longtemps mon âme agenouillée:
Non père a des secrets pour vaincre la douleur.

J' irai, j' irai lui dire, au moins avec mes larmes:
"Regardez, j' ai souffert... " il me regardera,
Et sous mes jours changés, sous mes pâleurs sans charmes,
Parce qu' il est mon père il me reconnaîtra.

Il dira : " c' est donc vous, chère âme désolée
La terre manque-t-elle à vos pas égarés ?
Chère âme, je suis Dieu : ne soyez plus troublée;
Voici votre maison, voici mon coeur, entrez ! "

O clémence ! ô douceur ! ô saint refuge ! ô père !
Votre enfant qui pleurait vous l' avez entendu !
Je vous obtiens déjà puisque je vous espère
Et que vous possédez tout ce que j' ai perdu.

Vous ne rejetez pas la fleur qui n' est plus belle;
Ce crime de la terre au ciel est pardonné.
Vous ne maudirez pas votre enfant infidèle,
Non d' avoir rien vendu, mais d' avoir tout donné.


Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859)
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11 février 2007 7 11 /02 /février /2007 07:18
Itzhak-Leibush Peretz (1852-1915)


Ne crois pas…


Ne crois pas le monde une auberge - créée
Pour se frayer chemin par la griffe et le poing
Vers la table où l'on boit et l'on bâfre, tandis
Que regardent de loin les autres, les yeux glauques,
Défaillant, ravalant leur salive, serrant
Leur estomac que les crampes secouent,
Ô ne crois pas le monde une auberge!

Ne crois pas le monde une Bourse - créée
Afin que le puissant marchande avec le faible
Pour acheter leur déshonneur aux filles pauvres
Et aux femmes leur lait nourricier, aux hommes
La moelle de leurs os, leur sourire aux enfants,
Rare apparition des visages de cire,
Ô ne crois pas le monde une Bourse!

Ne crois pas le monde une jungle - créée
Pour les loups, les renards, rapine et duperie,
Le ciel - rideau tiré pour que Dieu ne voie rien,
La brume - afin qu'au mur nul regard ne te fixe,
Le vent - pour étouffer les plus farouches cris,
La terre pour lécher le sang des innocents,
Ô ne crois pas le monde une jungle!

Non, le monde n'est point auberge, Bourse ou jungle
Car tout y est pesé, tout y est mesuré,
Nulle goutte de sang et nul pleur ne s'effacent
Nulle étincelle en aucun œil ne meurt en vain,
Les pleurs deviennent fleuve et le fleuve une mer
Et déluge la mer, l'étincelle tonnerre,
Ô ne crois pas qu'il n'est Juge ni Jugement!

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9 février 2007 5 09 /02 /février /2007 07:42
Vieille femme en train de lire (La Mère de l'artiste), 1631
Rembrandt(1606-1669)



A qui la faute ?

Tu viens d’incendier la Bibliothèque ?

- Oui.
J’ai mis le feu là.

- Mais c’est un crime inouï !
Crime commis par toi contre toi-même, infâme !
Mais tu viens de tuer le rayon de ton âme !
C’est ton propre flambeau que tu viens de souffler !
Ce que ta rage impie et folle ose brûler,
C’est ton bien, ton trésor, ta dot, ton héritage
Le livre, hostile au maître, est à ton avantage.
Le livre a toujours pris fait et cause pour toi.
Une bibliothèque est un acte de foi
Des générations ténébreuses encore
Qui rendent dans la nuit témoignage à l’aurore.
Quoi ! dans ce vénérable amas des vérités,
Dans ces chefs-d’oeuvre pleins de foudre et de clartés,
Dans ce tombeau des temps devenu répertoire,
Dans les siècles, dans l’homme antique, dans l’histoire,
Dans le passé, leçon qu’épelle l’avenir,
Dans ce qui commença pour ne jamais finir,
Dans les poètes ! quoi, dans ce gouffre des bibles,
Dans le divin monceau des Eschyles terribles,
Des Homères, des jobs, debout sur l’horizon,
Dans Molière, Voltaire et Kant, dans la raison,
Tu jettes, misérable, une torche enflammée !
De tout l’esprit humain tu fais de la fumée !
As-tu donc oublié que ton libérateur,
C’est le livre ? Le livre est là sur la hauteur ;
Il luit ; parce qu’il brille et qu’il les illumine,
Il détruit l’échafaud, la guerre, la famine
Il parle, plus d’esclave et plus de paria.
Ouvre un livre. Platon, Milton, Beccaria.
Lis ces prophètes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille
L’âme immense qu’ils ont en eux, en toi s’éveille ;
Ébloui, tu te sens le même homme qu’eux tous ;
Tu deviens en lisant grave, pensif et doux ;
Tu sens dans ton esprit tous ces grands hommes croître,
Ils t’enseignent ainsi que l’aube éclaire un cloître
À mesure qu’il plonge en ton coeur plus avant,
Leur chaud rayon t’apaise et te fait plus vivant ;
Ton âme interrogée est prête à leur répondre ;
Tu te reconnais bon, puis meilleur ; tu sens fondre,
Comme la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs,
Le mal, les préjugés, les rois, les empereurs !
Car la science en l’homme arrive la première.
Puis vient la liberté. Toute cette lumière,
C’est à toi comprends donc, et c’est toi qui l’éteins !
Les buts rêvés par toi sont par le livre atteints.
Le livre en ta pensée entre, il défait en elle
Les liens que l’erreur à la vérité mêle,
Car toute conscience est un noeud gordien.
Il est ton médecin, ton guide, ton gardien.
Ta haine, il la guérit ; ta démence, il te l’ôte.
Voilà ce que tu perds, hélas, et par ta faute !
Le livre est ta richesse à toi ! c’est le savoir,
Le droit, la vérité, la vertu, le devoir,
Le progrès, la raison dissipant tout délire.
Et tu détruis cela, toi !

- Je ne sais pas lire.


Victor Hugo
25 juin 1871

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7 février 2007 3 07 /02 /février /2007 07:53

Friedrich Schiller, Les grues d'Ibycus (1797)


Ibycus se rendait à la lutte des chars et des chants, qui, sur l'isthme de Corinthe, rassemble joyeusement les peuples de la Grèce: Ibycus, l'ami des dieux, à qui Apollon accorda le don du chant, une voix aux accents mélodieux. S'appuyant sur son léger bâton, il s'éloigne de Rhégium, plein du dieu qui l'inspire.


Déjà, sur le dos élevé de la montagne, l'Acrocorinthe attire les yeux de notre voyageur, et il pénètre avec une horreur pieuse dans la forêt de pins de Neptune. Rien ne se meut autour de lui; il n'est accompagné que d'essaims de grues qui, formées en escadron grisâtre, vont chercher au loin les chaleurs du Midi.

" Salut, troupes amies, qui m'escortiez sur mer! Je vous prends pour un heureux présage. Mon sort ressemble au vôtre. Nous venons de loin, vous et moi, et nous cherchons un toit hospitalier.... Que le Dieu de l'hospitalité nous soit propice, lui qui écarte l'outrage de l'étranger! "

Il presse gaiement le pas, et bientôt se voit au milieu de la forêt. Tout à coup, dans l'étroit sentier, deux assassins lui barrent le passage. Il faut qu'il s'apprête au combat, mais bientôt sa main retombe épuisée. Elle a tendu les cordes légères de la lyre, mais jamais l'arc puissant.

Il invoque et les hommes et les dieux: nul sauveur n'entend sa prière; aussi loin qu'il lance sa voix, pas un être vivant ne se montre: " Il me faut donc mourir ici, délaissé, sur la terre étrangère, où nul ne me pleurera! périr de la main de ces misérables, sans même voir paraître un vengeur."

Atteint d'un coup mortel, il tombe. A ce moment retentissent les ailes des grues. Il entend, car déjà il ne peut plus voir, il entend près de lui leurs voix rauques pousser un cri terrible:
" O grues qui volez là-haut, si nulle autre voix ne parle, vous du moins, dénoncez le meurtre! " Tel est son dernier cri, et son œil s'éteint.

On trouve le cadavre dépouillé, et bientôt, malgré les plaies qui le défigurent, son hôte, à Corinthe, reconnaît les traits qui lui sont chers: " Est-ce ainsi que je devais te retrouver? Et pourtant j'espérais ceindre de la couronne de pin les tempes du chanteur, brillant moi-même d'un rayon de sa gloire. "

Tous les étrangers réunis pour la fête de Neptune gémissent en apprenant cette nouvelle; la Grèce entière est saisie de douleur: tous les cœurs ont ressenti sa perte, et le peuple afflue en tumulte chez le Prytane; sa fureur exige qu'on venge les mânes de la victime, qu’on les apaise avec le sang du meurtrier.

Mais où est la trace qui, dans ces flots pressés, dans la foule des peuples attirés par l'éclat des jeux, fera reconnaître l'auteur d'un si noir forfait? Sont-ce des brigands qui lâchement l'ont assassiné? Est-ce un ennemi secret poussé par l'envie? Hélios seul peut le dire, lui qui éclaire toute chose terrestre.

Peut-être, en ce moment même, marche-t-il effrontément au milieu des Grecs, et, tandis que la vengeance le cherche, jouit-il du fruit de son crime. Peut-être, sur le seuil même de leur temple, brave-t-il les dieux, ou se mêle- t-il hardiment à ces vagues humaines, là-bas, qui se pressent vers le théâtre.

Car déjà, serrés banc contre banc (les étais de l'amphithéâtre rompent presque sous le poids), les peuples de la Grèce, accourus de près et de loin, sont assis et attendent. Résonnant sourdement comme les flots de la mer, les gradins, en arcs de plus en plus ouverts, montent, fourmillant d'hommes, jusqu'à l'azur des cieux.

Qui peut compter, qui peut nommer les peuples que l'hospitalité rassemble en ce lieu? Ils sont venus de la ville de Cécrops, du rivage d'Aulis, de la Phocide, du pays des Spartiates, des côtes lointaines de l'Asie, de toutes les îles; et, de l'estrade où ils siégent, ils écoutent l'affreuse mélodie du chœur.

Qui, grave et austère, selon l'antique usage, sort du fond de la scène, d'un pas lent et mesuré, et fait le tour du théâtre. Ce n'est point ainsi que marchent des femmes terrestres; elles ne sont pas filles d'une race mortelle! Leur taille gigantesque s'élève bien au-dessus des proportions humaines.

Un manteau noir bat leurs flancs; elles agitent dans leurs mains décharnées la lueur rouge-sombre des torches; dans leurs joues il ne coule point de sang, et là où les cheveux ondoient gracieusement et voltigent avec charme autour des fronts mortels, on voit ici des serpents et des vipères gonfler leurs ventres gros de venin.

Et tournées en cercle, elles entonnent le mode effrayant de l’hymne qui pénètre et déchire le cœur, et serre autour du coupable les liens du remords. Aliénant le sens, égarant le cœur, le chant des Furies éclate: il éclate, consumant l'auditeur jusqu'à la moelle de ses os, et ne souffre pas les accords de la lyre:

" Heureux qui, exempt de faute et d'erreur, conserve son âme naïve et pure! Nous ne pouvons approcher de lui nos mains vengeresses; il suit librement le chemin de la vie. Mais malheur, malheur à qui commit dans l'ombre l'œuvre impie de l'homicide! Nous nous attachons à ses pas, nous les filles terribles de la Nuit.

" Et croit-il, par la fuite, nous échapper, nous avons des ailes et nous sommes là, lançant nos lacs autour de son pied fugitif: il faut qu'il tombe à terre. Nous le poursuivons sans relâche (point de repentir qui nous désarme!), en avant, toujours en avant, jusqu'au séjour des ombres, et là même nous ne le laissons pas libre. "

Chantant ainsi, elles dansent leur ronde, et le silence, un silence de mort, pèse lourdement sur l'assemblée, comme si la divinité était proche. Et solennellement, selon l'antique usage, faisant le tour du théâtre, d'un pas lent et mesuré, elles disparaissent au fond de la scène.

Et tous les cœurs tremblent et flottent, incertains encore, entre l'illusion et la réalité, et. ils rendent hommage à la puissance terrible qui veille et juge dans le secret des âmes; qui, impénétrable, inscrutable, tresse le sombre nœud du destin, et se révèle au fond du cœur, mais fuit la lumière du soleil.

Tout à coup, sur les plus hauts gradins, on entend une voix qui crie: " Vois donc, vois donc, Timothée! les grues d'lbycus!..." et en même temps le ciel s'obscurcit, et, au-dessus du théâtre, on voit passer en noir tourbillon une armée de grues.

" D'lbycus !..."' Ce nom chéri rallume la douleur dans toutes les âmes, et, comme dans la mer le flot succède au flot, ces mots volent de bouche en bouche: " D'Ibycus? que nous pleurons, qu'une main meurtrière a frappé? Que dit-il de lui? Quelle peut être sa pensée? Qu'a-t-il à dire de cette volée de grues ?..."

La question se répète de plus en plus bruyante; et, prompt comme l'éclair, un pressentiment traverse tous les cœurs: " Prenez garde! C'est la puissance des Euménides! Le pieux poète est vengé! le meurtrier s'offre lui-même! Saisissez l'homme qui a dit cette parole, et celui à qui elle s'adressait."

Cependant, à peine ce mot lui a t’il échappé, qu'il voudrait le retenir dans son sein; mais c'est en vain: l'effrayante pâleur de leurs lèvres trahit aussitôt les deux complices. On les arrache de leur place, on les traîne devant le juge; la scène est transformée en tribunal, et les scélérats font l'aveu de leur crime, atteints des foudres de la Vengeance.


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1 janvier 2007 1 01 /01 /janvier /2007 00:11

 

Ce magnifique poème a été écrit par Schiller en 1786. 
Beethoven a manifesté l’intention de composer une œuvre
à partir de l’Ode à la Joie de Friedrich von Schiller au moins
dès 1792. Dès 1799, Beethoven avait esquissé une mise en
musique, sous forme d'un Lied, puis s'était servi de quelques
vers dans Leonore-Fidelio, son opéra. Enfin, Beethoven
adapta le texte pour sa neuvième symphonie. A cette fin, il
s'inspira d'une version de 1803 révisée par Schiller lui-même.

Cette Ode à la Joie correspond aux idéaux fraternels de
Beethoven, d’où sa volonté incessante de composer une
œuvre à la mesure de l’écrit de Schiller : « L'homme est
pour tout homme un frère – Que tous les êtres s'enlacent !
- Un baiser au monde entier !
».
Ode à la Joie
O Joie, belle étincelle divine, 
Fille de l'Elysée,
Nous entrons ivres d'enthousiasme,
Ô Déesse, dans ton sanctuaire.
Tes charmes réunissent
Ce que la mode sépare ;
Tous les hommes deviennent frères
Là où tes douces ailes reposent.

Choeur

Soyez unis êtres par million !
Qu'un seul baiser enlace l'univers !
Frères, au-dessus du pavillon des étoiles
Doit résider un père bien-aimé !


Que celui qui a l'inestimable bonheur
D'être l'ami d'un ami,
Que celui qui a conquis une douce femme
Unisse sa joie à la nôtre !
Et aussi celui qui n'a qu'une âme
Sur la terre ;
Et celui qui n'a jamais connu cela s'éloigne
En pleurant de notre cercle !

Choeur

Que tout ce qui habite le globe
Rende hommage à la sympathie !
Jusqu'aux étoiles ils aspirent,
Où l'inconnu trône.


Tous les êtres puisent la joie
Aux seins de la nature ;
Tous, bons et méchants,
Suivent ses traces de rose.
Elle nous donne les baisers
Et la vigne, l'ami, fidèle jusqu'à la mort ;
Le vermisseau lui-même connait la volupté
Et le Chérubin est devant Dieu.

Choeur

Vous vous prosternez, millions d'êtres ?
Monde, pressens-tu ton créateur ?
Cherche-le au-dessus de la voûte des étoiles,
C'est au-dessus des étoiles qu'il doit habiter.


La joie est le moteur puissant
Dans l'éternelle nature.
La joie, la joie fait tourner les rouages
Dans la grande horloge du monde.
Elle fait sortir les fleurs de leurs germes,
Briller le soleil au firmament,
Rouler dans l'espace les sphères
Que l'astronome ne connaît pas.

Choeur

Joyeux comme le soleil qui vole
A travers les splendides plaines du ciel,
Courrez, frères, votre carrière,
Heureux comme le héros qui court à la victoire.


Du miroir étincelant de la vérité
La joie sourit à celui qui la cherche.
Sur le sentier escarpé de la vertu
Elle soutient les pas du malheureux.
Sur les hauteurs rayonnantes de la foi
On voit flotter sa bannière,
A travers l'ouverture des sépulchres brisés
Elle se tient dans le choeur des anges.

Choeur

Souffrez avec courage millions d'êtres !
Souffrez pour un monde meilleur !
Là haut, au-delà de la voûte étoilée
Un Dieu puissant vous récompensera.


On ne peut récompenser les Dieux,
Il est beau de leur ressembler.
Que les pauvres et les affligés se mêlent,
Et se réjouissent avec les joyeux.
Que la haine et la colère soient oubliées,
Que notre ennemi mortel soit pardonné,
Que nulle larme ne fatigue ses yeux,
Que nul remords ne le ronge.

Choeur

Anéantissons le souvenir des offenses !
Que le monde entier soit réconcilié !
Frères, au-dessus du dôme des étoiles,
Dieu juge comme nous jugeons.


La joie pétille dans les verres,
Dans les flots dorés de la vigne,
Les Cannibales puisent la douceur,
Le désespoir y puise du courage.
Frères, levez-vous de vos sièges
Quand le verre rempli circulera,
Laissez l'écume de la boisson énivrante jaillir vers le ciel :
Offrez ce verre au bon génie.

Choeur

A celui que les astres célèbrent,
A celui que chante l'hymne du Séraphin !
Ce verre au bon génie
Au-dessus de la voûte des étoiles !


Courage et fermeté dans les souffrances !
Secours à l'innocent qui pleure,
Eternité de serments,
Vérité envers l'ami et l'ennemi,
Virile fierté devant les trônes des rois,
Frère ce qu'il faut sacrifier nos biens et notre vie, —
Au devoir accompli sa couronne,
Le malheur au mensonge !

Choeur

Fermez le cercle sacré,
Jurez par ce vin doré :
Être fidèle à vos serments,
Jurez-le par le souverain céleste.


Affranchissement des chaînes de la tyrannie,
Générosité envers le méchant,
Espoir sur le lit de mort,
Grâce sur l'échafaud !
Que les morts vivent aussi !
Buvez, frères, et répétez à la fois
Que tous les péchés soient pardonnés,
Et que l'enfer ne soit plus !

Choeur

Une douce gaieté à la dernière heure !
Un doux sommeil dans le tombeau !
Frère, une sentence de paix
Sur les lèvres de Celui qui juge les morts !




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28 décembre 2006 4 28 /12 /décembre /2006 00:11
Colomb
 
En avant, hardi navigateur! Que l'esprit moqueur te raille; que le pilote au gouvernail laisse tomber sa main fatiguée. Vogue toujours, toujours vers l'Occident! Là se montrera, il le faut, la côte; car enfin elle s'étend, distincte et brillante, aux yeux de ton génie. Confie-toi au dieu qui te guide, et suis l'Océan silencieux. Quand elle n'existerait pas encore, elle sortirait maintenant au sein des flots. La nature est alliée au génie par un pacte éternel; ce que l'un promet, l'autre le tient à coup sûr.

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21 décembre 2006 4 21 /12 /décembre /2006 07:34
John Keats (1795-1821)


Ode sur une urne grecque

Ô toi! épouse encore inviolée de la quiétude,
Ô toi! nourrisson du silence et des lentes heures,
Rhapsode sylvestre, qui peut chanter
Un conte fleuri plus harmonieux que nos vers:
Quelle légende enveloppe tes contours d'une frange feuillagée ?
Est-elle de divinités ou de mortels, ou des deux,
Dans la vallée de Tempé ou les gorges d'Arcadie?
Quels dieux ou quels hommes sont là? Quelles vierges résistent?
Quelle folle poursuite? Quelle lutte pour échapper?
Quelles flûtes sont là? Quels tambourins? Quelle sauvage extase?


Les mélodies entendues sont douces, mais celles qu'on n'entend pas
Sont plus douces encore; donc, suaves pipeaux, continuez de jouer:
Non pour l'oreille sensuelle, mais des ballades plus chéries,
Des ballades pour l'esprit, sans sonorités!
Bel éphèbe, sous ces arbres, tu ne peux quitter
Ta chanson, pas plus que les arbres ne quittent leurs feuilles;
Audacieux amoureux, jamais, jamais tu n'obtiens les baisers,
Quoique tu sois proche du but - cependant, ne te chagrine pas;
Elle ne peut se flétrir, quoique tu n'atteignes pas ton bonheur,
À jamais tu aimeras, et elle sera belle!


Ah! heureux, heureux rameaux! qui ne pouvez perdre
Vos feuillages, ni jamais dire au printemps adieu;
Et toi, heureux mélodiste, jamais lassé,
Modulant à jamais des chants qui ne vieillissent jamais;
Plus heureux amour, plus heureux, heureux amour!
Que l'on peut goûter sans cesse, à jamais ardent,
À jamais haletant, à jamais jeune;
Soupirant bien au-dessus de toute passion humaine,
Qui laisse le coeur repu et plein d'amertume,
Le front brûlant et la langue desséchée.


Quels sont ces gens allant au sacrifice?
Vers quel autel verdoyant, ô prêtre mystérieux,
Conduis-tu cette génisse qui mugit aux cieux,
Ses flancs soyeux tout parés de guirlandes?
Quelle petite ville sur une rivière ou sur le bord de la mer
Ou bâtie sur une montagne avec une paisible citadelle,
Est vide de cette foule en cette pieuse matinée?
Et toi, petite ville, tes rues à jamais
Demeureront silencieuses; et pas une âme, pour dire
Pourquoi tu es déserte, ne peut revenir jamais.


Ô chef-d' oeuvre Attique! contours si purs qu'étroitement
Enserrent une race d'hommes et de vierges de marbre,
Des branches des forêts et des herbes foulées;
Forme silencieuse, ton énigme excède notre pensée
Comme fait l'éternité: Froide Pastorale!
Quand la vieillesse consumera cette génération,
Tu resteras, au milieu d'autres douleurs
Que les nôtres, une amie de l'homme, à qui tu dis:
« Beauté, c'est Vérité, Vérité, c'est Beauté», voilà tout
Ce que vous savez sur terre, tout ce qu'il vous faut savoir.

John Keats

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18 décembre 2006 1 18 /12 /décembre /2006 07:18


Lumière et chaleur

L’homme le meilleur entre dans le monde avec une joyeuse confiance. Il croit trouver autour de lui ce qui fait palpiter son âme, et, animé d’une noble ardeur, il consacre à la vérité son bras.

Mais tout lui semble si petit, si étroit ! Dès qu’il a fait cette preuve, dans le tourbillon du monde, il ne cherche plus qu’à se garder soi-même, et dans son calme froid et fier, il se ferme à l’amour.

 

Hélas, les purs rayons de la vérité ne répandent pas toujours la chaleur. Heureux celui qui ne paye pas les joies de la science par les tristesses de son cœur. Pour assurer votre félicité, joignez aux pensées sérieuses du rêveur enthousiaste le coup d’œil de l’homme du monde.

 

Friedrich Schiller


Qui est Schiller? Cliquez ici

Merci à Messer Gaster
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17 décembre 2006 7 17 /12 /décembre /2006 09:26
La Ballade des pendus est le poème le plus connu de François Villon. Villon a eu des démêlés avec la justice et a été une fois condamné à mort (il a été gracié par Louis XI). Peu après cette affaire où il échappe à sa pendaison, on perd sa trace.
Dans ce poème, Villon donne la parole à des suppliciés qui revendiquent le lien fondamental qui les unit à tous les êtres humains et qui en appelle à la miséricorde des vivants. Ce poème est un appel à la charité chrétienne, valeur très puissante au Moyen Âge. La rédemption est au cœur de la ballade. Villon reconnaît qu'il s'est trop occupé de son être de chair au détriment de sa spiritualité.



Ballade des pendus


Frères humains, qui après nous vivez,
N'ayez les coeurs contre nous endurcis,
Car, si pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tôt de vous mercis.
Vous nous voyez ci attachés, cinq, six :
Quant à la chair, que trop avons nourrie,
Elle est piéça dévorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et poudre.
De notre mal personne ne s'en rie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

Se frères vous clamons, pas n'en devez
Avoir dédain, quoique fûmes occis
Par justice. Toutefois, vous savez
Que tous hommes n'ont pas bon sens rassis.
Excusez-nous, puisque sommes transis,
Envers le fils de la Vierge Marie,
Que sa grâce ne soit pour nous tarie,
Nous préservant de l'infernale foudre.
Nous sommes morts, âme ne nous harie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

La pluie nous a débués et lavés,
Et le soleil desséchés et noircis.
Pies, corbeaux nous ont les yeux cavés,
Et arraché la barbe et les sourcils.
Jamais nul temps nous ne sommes assis
Puis çà, puis là, comme le vent varie,
A son plaisir sans cesser nous charrie,
Plus becquetés d'oiseaux que dés à coudre.
Ne soyez donc de notre confrérie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

Prince Jésus, qui sur tous a maistrie,
Garde qu'Enfer n'ait de nous seigneurie :
A lui n'ayons que faire ne que soudre.
Hommes, ici n'a point de moquerie ;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !


Version moderne:

Frères humains qui après nous vivez,
N'ayez pas vos cœurs durcis à notre égard,
Car si vous avez pitié de nous, pauvres,
Dieu aura plus tôt miséricorde de vous.
Vous nous voyez attachés ici, cinq, six:
Quant à notre chair, que nous avons trop nourrie,
Elle est depuis longtemps dévorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et poussière.
De notre malheur, que personne ne se moque,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre!

Si nous vous appelons frères, vous n'en devez
Avoir dédain, bien que nous ayons été tués
Par justice. Toutefois vous savez
Que tous les hommes n'ont pas l'esprit bien rassis.
Excusez-nous, puisque nous sommes trépassés,
Auprès du fils de la Vierge Marie,
De façon que sa grâce ne soit pas tarie pour nous,
Et qu'il nous préserve de la foudre infernale.
Nous sommes morts, que personne ne nous tourmente,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre!

La pluie nous a lessivés et lavés
Et le soleil nous a séchés et noircis;
Pies, corbeaux nous ont creusé les yeux,
Et arraché la barbe et les sourcils.
Jamais un seul instant nous ne sommes assis;
De ci de là, selon que le vent tourne,
Il ne cesse de nous ballotter à son gré,
Plus becquétés d'oiseaux que dés à coudre.
Ne soyez donc de notre confrérie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre!

Prince Jésus qui as puissance sur tous,
Fait que l'enfer n'aie sur nous aucun pouvoir :
N'ayons rien à faire ou à solder avec lui.
Hommes, ici pas de plaisanterie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre


Bruegel, La pie sur le gibet (1568)

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13 décembre 2006 3 13 /12 /décembre /2006 07:12
Je m’étais endormi la nuit près de la grève.
 
Un vent frais m’éveilla, je sortis de mon rêve,
 
J’ouvris les yeux, je vis l’étoile du matin.
 
Elle resplendissait au fond du ciel lointain
 
Dans une blancheur molle, infinie et charmante.
 
Aquilon s’enfuyait emportant la tourmente.
 
L’astre éclatant changeait la nuée en duvet.
 
C’était une clarté qui pensait, qui vivait ;
 
Elle apaisait l’écueil où la vague déferle ;
 
On croyait voir une âme à travers une perle.
 
Il faisait nuit encor, l’ombre régnait en vain,
 
Le ciel s’illuminait d’un sourire divin.
 
La lueur argentait le haut du mât qui penche ;
 
Le navire était noir, mais la voile était blanche ;
 
Des goélands debout sur un escarpement,
 
Attentifs, contemplaient l’étoile gravement
 
Comme un oiseau céleste et fait d’une étincelle ;
 
L’océan, qui ressemble au peuple, allait vers elle,
 
Et, rugissant tout bas, la regardait briller,
 
Et semblait avoir peur de la faire envoler.
 
Un ineffable amour emplissait l’étendue.
 
L’herbe verte à mes pieds frissonnait éperdue,
 
Les oiseaux se parlaient dans les nids ; une fleur
 
Qui s’éveillait me dit : C’est l’étoile ma soeur.
 
Et pendant qu’à longs plis l’ombre levait son voile,
 
J’entendis une voix qui venait de l’étoile
 
Et qui disait : - Je suis l’astre qui vient d’abord.
 
Je suis celle qu’on croit dans la tombe et qui sort.
 
J’ai lui sur le Sina, j’ai lui sur le Taygète,
 
Je suis le caillou d’or et de feu que Dieu jette,
 
Comme avec une fronde, au front noir de la nuit.
 
Je suis ce qui renaît quand un monde est détruit.
 
Ô nations ! Je suis la Poésie ardente.
 
J’ai brillé sur Moïse et j’ai brillé sur Dante.
 
Le lion Océan est amoureux de moi.
 
J’arrive. Levez-vous, vertu, courage, foi !
 
Penseurs, esprits ! Montez sur la tour, sentinelles !
 
Paupières, ouvrez-vous ! Allumez-vous, prunelles !
 
Terre, émeus le sillon ; vie, éveille le bruit ;
Debout, vous qui dormez ; - car celui qui me suit,
 
Car celui qui m’envoie en avant la première,
 
C’est l’ange Liberté, c’est le géant Lumière !

Victor Hugo,
Les châtiments, Livre VI, 1853.



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