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1 novembre 2004 1 01 /11 /novembre /2004 10:58

PRINCIPES DE LA SCIENCE SOCIALE
PAR M. H.-C. CAREY (De Philadelphie)

 

henry_charles_carey.jpg


TRADUITS EN FRANÇAIS PAR MM. SAINT-GERMAIN-LEDUC ET AUG. PLANCHE

  1861

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE XVII :

CONTINUATION DU MÊME SUJET.

 

    § 9. — Le système anglais tend à augmenter les proportions des diverses sociétés qui se livrent au trafic et au transport. Cet accroissement est la preuve d'une civilisation qui décline.


    Plus est élevé le prix des matières premières et plus est bas le prix des produits achevés, moins aussi sera considérable la proportion du produit total du travail absorbé par les individus qui s'occupent du transport et de la transformation, et moins grande sera nécessairement la proportion qui s'établira entre ces classes, relativement à la masse d'individus dont se compose la société. Plus le moulin est rapproché du fermier et plus l'instrument de celui-ci est perfectionné, plus le prix du froment et celui de la farine s'équilibreront, et plus sera faible la proportion entre le travail nécessaire pour transporter le produit brut au moulin, le convertir en farine, et transporter de nouveau la farine à la maison, relativement au travail qui a été consacré à l'amélioration du sol nécessaire pour la production du froment lui-même. Conséquemment, dans le cours ordinaire des choses, la part proportionnelle du travail de l'homme, consacrée à augmenter la quantité des matières premières, devra être constamment croissante, et la part consacrée à leur faire subir des changements de lieu ou de forme, constamment décroissante.

    Complètement contraire est l'effet produit par le système qui se propose de fonder le trafic sur les ruines du commerce. Les Indiens, qui produisaient le coton et le riz, pouvaient autrefois les échanger directement avec leurs voisins qui les transformaient en toile ; et tous pouvaient consacrer la totalité de leur temps à produire la laine et les subsistances, d'une part, et, d'autre part, la toile. Maintenant, tous sont obligés d'expédier ou de transporter leur riz et leur laine dans un lieu éloigné de leur demeure de 15 milliers de milles, et d'accomplir ces travaux à l'aide de boeufs, de chevaux, de navires, de barques naviguant sur des canaux, et d'autres instruments ; d'où il suit que la part proportionnelle du travail, consacrée au transport et à la transformation des matières, s'est accrue considérablement, tandis que celle consacrée à la production, a décru aussi invariablement. On peut constater le résultat dans ce fait, qu'après avoir anéanti les manufactures indiennes, la quantité totale de coton fournie aujourd'hui à l'Angleterre ne dépasse pas celle qui pourrait être transformée dans une petite ville ne renfermant que 20 000 ouvriers. Il en a été de même en Irlande, où il fallait consacrer une proportion si considérable de travail à changer de lieu les choses et les hommes, qu'il n'en restait guère à appliquer à la production ; et il se trouve que plus on s'était assuré complètement le marché pour les produits des manufactures anglaises, plus le marché avait, de jour en jour, perdu de sa valeur (8). Pareille chose s'est passée à la Jamaïque, en Portugal et en Turquie, où l'on a vu que la proportion du travail nécessaire à ces objets a augmenté la consommation des articles produits par les manufactures anglaises. C'est un système d'épuisement ; et c'est ce qui engendre la nécessité constamment croissante de chercher des marchés nouveaux et plus éloignés, avec une tendance chaque jour plus considérable à l'accroissement proportionnel de la population anglaise, employée à transporter, à transformer et à échanger les produits des pays lointains.

    Les faits suivants, fournis par les divers recensements de la population britannique publiés récemment, démontrent que ce résultat se produit constamment.

        Individus qui se livrent    Au trafic        Aux autres
Années.    à l'agriculture.            et à l'industrie.        Professions (9).    Total.

1811 . . .        35.2            44.4            20.4            100
1821 . . .        33.2            45.9            20.9            100
1831 . . .        28.2            42.0            20.8            100
1841 . . .        25.17            44.64            30.19            100

    Nous trouvons ici une diminution graduelle dans la proportion des individus employés à augmenter la quantité des choses qui ont besoin d'être transformées ou échangées, jusqu'au point que de 7/20, elle est tombée à 5/20, et cela dans le court espace de trente ans ; et le changement qui nous est ainsi révélé est proclamé par les économistes anglais comme la preuve d'une civilisation en progrès ! C'est cependant précisément le contraire de ce que nous avons le droit d'attendre, la puissance de la vapeur ayant été substituée à celle de l'homme dans la proportion de milliards de bras, et toute la force ainsi conquise ayant été consacrée à faire subir les changements de lieu et de forme aux matières premières répandues sur la surface du globe. Le résultat aurait dû être de laisser disponibles les travaux de millions d'individus, qui auraient pu être appliqués à l'augmentation de la quantité de choses susceptibles d'être transformées ou échangées, tandis que le contraire a eu lieu, de telle sorte que la proportion des individus qui s'occupent de transporter, de transformer et d'échanger, s'est accrue de 13, 20 à 15, 20, et cet accroissement s'est produit dans l'espace de trente années seulement. Plus la nature a pu remplacer le labeur des hommes dans ces branches d'industrie, plus est considérable la proportion de leur travail absorbée par ces individus. Là, comme partout ailleurs, le mouvement est rétrograde, et, considéré comme tel, peut-être nous mettra-t-il à même de nous rendre compte de l'invention des doctrines Ricardo-Malthusiennes.

    Le moulin à farine devient inutile s'il n'y a pas de blé à moudre, et le moulin à coton reste inactif s'il n'y a pas de laine à filer et à tisser. Moins il y a besoin du travail nécessaire pour moudre l'une ou filer l'autre, moins est grande la nécessité d'augmenter le nombre des moulins, à moins que le temps et l'intelligence, ainsi restés disponibles, ne soient employés à développer la puissance productive de la terre et à augmenter ainsi la quantité de matières premières qu'il faut transformer. Si le travail économisé reçoit cette application, alors on aura besoin d'un plus grand nombre de moulins, et la quantité de travail appliquée à l'oeuvre de la transformation, ou du transport, peut être augmentée avec avantage, mais non pas autrement. Dans le cas qui s'offre à nous, la proportion du travail consacrée à la transformation augmente en raison directe de la diminution du besoin que l'on en a, et la proportion consacrée à la production diminue en raison de l'augmentation du nombre des machines employées pour la transformation des choses produites. Il y a, conséquemment, un accroissement constant dans le nombre des individus qui ont besoin d'être nourris et vêtus, accompagné d'une décroissance également constante dans celui des individus s'occupant de fournir les matières à employer par ceux qui ont besoin de subsistances et de vêtements.

    Le quart seulement de la population anglaise consacrant son travail à augmenter les quantités de denrées, tandis que les trois autres quarts sont entièrement inactifs ou s'occupent de leur faire subir des changements de lieu, de forme, ou de propriétaire, il suit de là, nécessairement, que la majeure partie des choses produites est absorbée dans son passage, du lieu de production au lieu de consommation. Nous savons que les choses se passent ainsi par un des principaux journaux de l'Angleterre (10). Il informe ses lecteurs « que le nombre des détaillants et des boutiquiers est hors de toute proportion avec les besoins de la société ou le nombre des classes productrices. » « En beaucoup d'endroits, continue-t-il, il se trouve dix boutiquiers pour faire la besogne qui suffirait à un seul ; telle est du moins l'évaluation de M. Mill. Or, ces individus, quelque laborieux et quelque actifs qu'ils soient, n'ajoutent rien à la production et, conséquemment, à la richesse de la société. Ils distribuent simplement ce que d'autres produisent ; et, de plus encore, dans la proportion de leur excédant, ils diminuent la richesse sociale. A la vérité, la plupart d'entre eux vivent en s'arrachant réciproquement le pain de la bouche ; mais cependant ils vivent, et souvent réalisent des profits considérables. Évidemment, ils le font en grevant l'article qu'ils vendent d'un droit de tant pour cent. Si donc une société doit entretenir deux détaillants lorsqu'un seul suffirait pour accomplir le travail, les articles qu'ils vendent doivent coûter à cette société plus qu'il ne faut, et le pays s'appauvrit d'autant, en entretenant un trop grand nombre de travailleurs improductifs. Tout homme qui examine un pareil sujet est surpris de constater quelle portion insignifiante du prix payé par le consommateur, pour un article quelconque, revient au producteur ou à l'importateur, et quelle part considérable est prélevée par le distributeur (11). »

    Nous trouvons ici la difficulté réelle de la société anglaise et la source de l'idée de la théorie extraordinaire de Malthus. Le système tend à accroître d'une façon anormale la proportion des consommateurs, et à donner lieu à l'absorption d'une part si considérable du produit du travail dans son trajet, du champ où il est créé, à la bouche qui a besoin de le consommer, ou bien aux épaules qui ont besoin de le porter, que le producteur ne peut qu'avec peine se procurer les moyens de soutenir son existence. L'individu qui travaille aux champs, sur un sol qui donne 30 ou 40 boisseaux par acre, ne reçoit que 6 schellings, soit le prix d'un seul boisseau, pour son travail d'une semaine ; et cependant le produit de son travail annuel n'équivaut guère probablement à moins de mille boisseaux. Sa part est donc de 6, 8 ou 10 pour cent, tandis que 90 pour cent ou davantage se trouvent absorbés par ceux qui possèdent les instruments avec lesquels il travaille, par ceux qui en surveillent l'emploi, — par ceux qui dirigent l'État, ceux qui portent les armes, ceux qui vivent dans les maisons de charité, et ceux enfin qui de mille autres manières, se placent entre la production des subsistances et leur consommation.

    Le pauvre diable de l'ouest de l'Irlande est charmé de tirer cinq pence d'une paire de poulets qui, à Londres, se vendra pour autant de schellings ; et, de cette façon, il reçoit huit pour cent, comme prix de son travail, les quatre-vingt-douze pour cent restant se trouvant absorbés par la classe des intermédiaires (12). Lors donc qu'il veut placer ses produits en sucre, il paie cinq pence pour ce qui n'avait pas coûté à son producteur primitif autant de toile qu'on en pourrait acheter avec un farthing, et c'est ainsi que plus des neuf dixièmes du travail sont absorbés par les intermédiaires qui vivent en exerçant leur puissance d'appropriation. Le pauvre Hindou vend son coton à raison de 3 demi-pence la livre, sur lesquels le gouvernement prend une moitié et le préteur d'argent la moitié de ce qui reste ; et lorsque, plusieurs années après, ce coton lui revient sous la forme de tissu, il le paye à raison de 12, 15 ou 20 pence, c'est-à-dire 40 ou 50 fois plus qu'il ne lui a rapporté. Que devient toute la différence? elle est absorbée dans son trajet, du pays où le coton a été produit pour revenir à la demeure de l'Hindou, peut-être sur la même terre où résident les individus qui doivent user le tissu. Le fermier de Jowa vend son blé dix cents le boisseau ; mais pendant le temps nécessaire, pour qu'il arrive au consommateur de Manchester, ce blé a tellement augmenté de valeur, qu'il paie plusieurs journées de travail. Ce travail donne des centaines de yards d'étoffes de coton, mais pendant le temps nécessaire pour qu'il arrive à Jowa, il a, à son tour, tellement augmenté de valeur, qu'un boisseau de blé se donne en échange d'un seul yard ; c'est-à-dire qu'il n'y a pas eu moins de quatre-vingts pour cent sur la totalité qui ont été absorbés dans l'opération des échanges.

    Le système tend à augmenter la disproportion entre le prix du produit brut de la terre et celui du produit achevé ; il tend à amener le bas prix des matières premières et la cherté des produits de l'industrie ; et cette voie-là conduit à la barbarie. Il cherche à augmenter les obstacles qui surgissent entre le consommateur et le producteur, tandis qu'il édifie les fortunes des individus qui se placent entre eux, et c'est là ce qui a fait naître l'idée de l'excès de population, idée qui se lie d'une façon indissoluble à celle de l'asservissement de l'homme (13).

 

 

 


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