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1 novembre 2004 1 01 /11 /novembre /2004 10:58

PRINCIPES DE LA SCIENCE SOCIALE
PAR M. H.-C. CAREY (De Philadelphie)

henry_charles_carey.jpg

TRADUITS EN FRANÇAIS PAR MM. SAINT-GERMAIN-LEDUC ET AUG. PLANCHE

  1861

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE XII :

CONTINUATION DU MÊME SUJET.

  

    § 1. — Phénomènes sociaux, tels qu'ils se présentent dans l'histoire du Portugal.


    La splendeur du Portugal au XVIe siècle, résultant de l'exercice de sa puissance d'appropriation dans l'Orient, a été, ainsi qu'il arrive toujours, suivi d'une faiblesse croissante ; et la fin de ce siècle même l'a trouvé, ainsi que l'a vu le lecteur, réduit à la condition d'une province espagnole. Quarante ans plus tard, il réussit à recouvrer son indépendance, et, à la fin du XVIIe siècle, on le vit faire de vigoureux efforts pour continuer à s'en assurer la possession, en établissant, parmi les individus qui formaient sa population, l'habitude d'association nécessaire pour développer leurs facultés et étendre leur commerce. Depuis une époque reculée, le Portugal avait été renommé pour la qualité de ses laines, mais pendant longtemps il avait manqué des moyens de la convertir en drap. Maintenant, cependant, dans le but de réaliser l'idée si bien exprimée par Adam Smith que, pour arriver à développer le commerce, il est nécessaire de condenser « non-seulement les quatre-vingts livres de laine, mais encore les milliers de livres de blé nécessaires à l'entretien des ouvriers, en une pièce de drap, » le Portugal avait importé des artisans étrangers, à l'aide desquels la fabrication des étoffes de laine s'était développée assez rapidement pour répondre complètement aux demandes de drap à l'intérieur ; et pouvoir ainsi, tout en développant le commerce, diminuer considérablement sa dépendance des chances et des vicissitudes du trafic extérieur.

    Cependant l'administration du pays passa en d'autres mains, et, en 1703, fut signé le fameux traité de Méthuen, par lequel, en retour de la faveur accordée à ses vins, l'idée de créer dans son sein, un marché pour les substances alimentaires et la laine, et de développer ainsi son commerce, fut entièrement rejetée. Immédiatement, ses marchés furent inondés de produits, ses manufactures ruinées, et les métaux précieux disparurent (1).

    Ainsi transformé de nouveau en pays purement agricole, l'épuisement du sol devint une conséquence nécessaire ; et l'épuisement du sol fut suivi à son tour de la diminution de la population, diminution qui continua si longtemps, que cette population n'est aujourd'hui que de trois millions, la décroissance, au siècle dernier seulement, ayant presque atteint le chiffre de 700 000. Avec la diminution de la population et de la puissance d'association, il se manifesta un accroissement dans la difficulté d'effectuer les changements de lieu, des produits et des individus. Dans un pays qui, même au temps de César, était pourvu de routes, on transporte maintenant les dépêches à dos de mulet, à raison de trois milles par heure, entre la capitale et les villes de province. Comme il n'y a de moyen de transport d'aucune espèce, si ce n'est sur la route de Lisbonne à Oporto, les voyageurs sont forcés de louer des mulets, s'ils veulent se rendre d'un lieu dans un autre. « Non-seulement, dit un voyageur moderne, il n'existe aucune route digne de ce nom, mais les rues mêmes et les lieux de passages sont convertis en pépinières pour l'engrais, et le seul mode de transport pour les marchandises d'un poids considérable consiste à se servir de charrettes traînées par des boeufs, et, pour les marchandises plus légères, des mulets ou des épaules des Galiciens ; la valeur de l'homme, en ce pays, étant regardée comme tellement insignifiante, qu'il est assimilé à une simple bête de somme. »

    L'isolement arrive, nécessairement, à la suite de la dépopulation, et le développement des facultés humaines diminue ; la qualité des instruments de production diminue, en conséquence, et la puissance de la nature augmente aux dépens de celle de l'homme. « On est surpris de voir, au rapport d'un autre voyageur, à quel point les Portugais ignorent, ou du moins connaissent superficiellement, toute espèce de main-d'oeuvre ; le charpentier est maladroit, et gâte toute besogne qu'il entreprend ; et la façon dont sont unies les portes et les boiseries de maisons, ayant une belle apparence, aurait été digne des siècles les plus grossiers. Leurs véhicules de toute nature, depuis le carrosse de famille de l'hidalgo jusqu'à la charrette qui conduit le paysan, leurs instruments agricoles, leurs clefs et leurs serrures sont ridiculement mal confectionnés. Ils semblent dédaigner le progrès et sont placés si énormément au-dessous du pair et à un degré d'infériorité si frappant, relativement au reste de l'Europe, qu'ils forment une sorte de honteux sujet d'étonnement au milieu du XIXe siècle. »

    L'utilité de la terre et de ses produits diminue conséquemment, en même temps qu'il y a constante augmentation dans la valeur des denrées nécessaires pour les besoins de l'homme et diminution dans la valeur de l'homme lui-même ; c'est là précisément le contraire de ce qu'on observe, dans les pays où celui-ci peut satisfaire ce premier besoin de sa nature qui le porte à rechercher l'association avec ses semblables.

    Le système a duré un siècle et demi, et pendant tout ce laps de temps le pouvoir de commander les services de la nature a diminué, ainsi qu'on le voit manifestement par la difficulté constamment croissante de se procurer les subsistances, les vêtements et l'abri nécessaires pour entretenir l'existence de l'homme. La part proportionnelle des produits du travail, nécessaire pour payer les frais de transport, a constamment augmenté, à mesure que la quantité des choses produites a diminué ; et le résultat peut se constater maintenant dans ce fait, qu'avec la décadence du commerce à l'intérieur, le pouvoir de l'entretenir au dehors a diminué à tel point, que le Portugal a cessé de compter parmi les nations, même pour ceux qui, en 1703, convoitaient si vivement le trafic avec ce pays. L'individualité de la communauté sociale a disparu avec l'individualité du peuple qui la constitue ; et, ainsi que nous le voyons rapporté dans un ouvrage récent qui jouit d'une grande réputation : « Les finances sont dans le plus déplorable état, le trésor est à sec, et tous les services publics sont eu souffrance. Une insouciance et une apathie réciproques règnent dans toutes les administrations, et, il faut le dire aussi, dans la nation. Pendant que partout, en Europe, on cherche à améliorer, le Portugal reste stationnaire. Le service postal de ce pays en offre un curieux exemple ; il faut encore 19 à 21 jours à une lettre, pour aller et revenir de Lisbonne à Bragance ; la distance est de 423 kilomètres (soit environ 300 milles américains). Toutes les ressources de l'État sont épuisées aujourd'hui, et il est probable que les recettes provenant des ventes, redevances, fermages, pensions censitaires, droits sur ventes, dettes à l'État, ne donneront pas le tiers du montant pour lequel on les fait figurer au budget (2). »

    Tel était l'état des affaires, il y a quelques années ; mais les résultats épuisants d'une culture exclusive deviennent, chaque année, plus évidents. Le marché intérieur pour le blé s'est transformé en un marché étranger pour la vigne ; mais aujourd'hui ce dernier lui-même a cessé d'exister, parce qu'on a enlevé sans relâche au sol tous les éléments constitutifs de la vigne. Des classes entières d'individus, en Portugal, sont maintenant réduites à une complète pauvreté, en même temps qu'à Madère des individus périssent faute de subsistance, ainsi qu'il arrive en tout pays, à défaut de cette diversité de travaux, qui est la cause du commerce et développe les facultés latentes de l'individu. La nation qui commence par exporter les produits bruts du sol doit finir par l'exportation, ou l'extermination des individus.

    Lorsque la population s'accroît et que les hommes se réunissent, un terrain ingrat même peut devenir fécond ; et c'est ainsi que « la puissance fertilisante de l'engrais fait rapporter, aux terres de pauvre qualité du département de la Seine, trois fois autant que celles des bords de la Loire (3). » Lorsque la population diminue et que les hommes sont, par cette raison, forcés de vivre à de plus grandes distances les uns des autres, les terres riches elles-mêmes s'appauvrissent, et il n'est pas besoin d'en chercher une meilleure preuve que celle qui s'offre ici. Dans le premier cas, chaque jour rapproche davantage les individus de cette parfaite liberté de pensée, de parole et d'action indispensable au développement du commerce. Dans le second, ces mêmes individus deviennent, de jour en jour, plus barbares et plus asservis, et sont de plus en plus la proie des classes qui « vivent, se meuvent, et n'ont d'existence » qu'en vertu de l'exercice de leur puissance d'appropriation, — c'est-à-dire les soldats et les trafiquants. La force des nations est en raison inverse des proportions où se trouvent ces classes par rapport à la masse dont la société se compose. Ces proportions augmentent avec la décroissance du commerce. Le commerce augmente toutes les fois qu'il y a diminution dans la nécessité d'effectuer des changements de lieu et de dépendre des services de ces individus qui ne subsistent, qu'en transportant des armes, équipant des navires ou mettant des véhicules en mouvement. Il diminue toutes les fois que cette nécessité augmente. Si l'on voulait une preuve de cette assertion, on la trouverait en comparant l’état passé et l'état présent du Portugal, pays naturellement riche, si longtemps soumis au système de cet autre pays où la théorie de l'excès de population a pris naissance.

 

 

 

 

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